Jean-Luc Godard : "Je suis un archéologue du cinéma"

Jean-Luc Godard à Rolle (Suisse, 2019) ©Radio France - Henri Le Blanc
Jean-Luc Godard à Rolle (Suisse, 2019) ©Radio France - Henri Le Blanc
Jean-Luc Godard à Rolle (Suisse, 2019) ©Radio France - Henri Le Blanc
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À l'occasion de la diffusion sur Arte de son film "Le Livre d’image", Jean-Luc Godard accueille Olivia Gesbert chez lui en Suisse pour un entretien exceptionnel. Le cinéaste parle d'Europe, de journalisme et de son rôle d'archéologue du cinéma.

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Jean-Luc Godard est sûrement l’un des plus grands cinéastes au monde.  Un cinéaste référence pour toute une génération de réalisateurs français et étrangers. Depuis soixante ans, il n’a cessé de redéfinir son art, à travers ses films ou ses "Histoires du cinéma", transgressant les codes existants, du son à l’image. L’un des plus grands et l’un des plus prolifiques.

Plus d’une centaine de films depuis A bout de souffle, le film-manifeste de "La Nouvelle Vague". Arte le diffusera ce mercredi 24 avril dans le cadre d’une soirée spéciale, suivi de son dernier film inédit : Le Livre d’image, Palme d’or spéciale à Cannes l'an passé.  Il y poursuit son exploration inlassable de la grammaire cinématographique et du dialogue entre image et son.

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Pendant cet entretien en Suisse, il a ouvert sa bibliothèque et son atelier de montage à Olivia Gesbert. Il pense le monde à travers les images, les sons qu'il récolte et les archives. En s'appuyant sur des citations et des artistes qui lui sont chers, il ne cesse de renouveler sa pensée. Son travail, selon lui, est plus proche de l'archéologie que de l'archive :

"L’archéologue, c’est plus noble. L’archiviste, il classe, alors que l’archéologue, il sculpte l’histoire. Chez les sculpteurs non plus, il n’y a pas de scénario."

Dans une dynamique qui lui est propre,  jouant avec les associations d'idées, il fait des allers-retours entre passé et présent pour toujours mieux réfléchir et décrypter l’actualité, sensible à l’état de la France et à l’avenir de l’Europe. Car Jean-Luc Godard n’est pas que cinéaste : il se fait tour à tour essayiste, historien de l’art, linguiste et citoyen, et entretient un rapport complexe avec la figure de l'auteur :

"A l’époque, l’auteur était le scénariste, c’est-à-dire le fabriquant de texte. A Bout de souffle, je n’en suis pas l’auteur pour la loi. C’est Truffaut parce que j’avais repris un ancien scénario. A un moment, je lui ai demandé de me le redonner, et il ne pouvait pas : c’est inaliénable en France. Pour Le Livre d’image , il y a beaucoup d’auteurs qui sont réunis par un ami."

Cohérent, il a fait faux bond au tapis rouge de Cannes l’an passé, cinquante ans après 1968, où Godard, Truffaut et les autres avaient fait annuler le festival. "Les films appartiennent à ceux qui les font, on n'a pas le droit de les projeter contre la volonté de leurs auteurs", clamait en ce temps le réalisateur de La Chinoise, empêchant les projections. Mais, depuis, les rôles se sont inversés. Il y a dix ans, à Cannes, Jean-Luc Godard s’était prononcé contre la propriété intellectuelle et contre les privilèges des ayant-droits.

Le Livre d’image sera disponible en ligne à partir du 17 avril et sera diffusé le 24 avril sur Arte dans le cadre d’une soirée spéciale consacrée au cinéaste.

La Grande table idées
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