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Ces Français qui ne prennent plus l’avion pour préserver la planète

À l’instar des Suédois, certains Français renoncent à prendre l’avion pour préserver l’environnement (photo d’illustration). 119167296/Sergey - stock.adobe.com

ENQUÊTE - Afin de préserver l’environnement, certains Français renoncent totalement à prendre l’avion, quitte à abandonner leurs rêves de voyages à l’autre bout du monde. Ils privilégient des destinations plus proches, accessibles en train.

59%: c’est le pourcentage de personnes qui se disent prêtes à «préférer le train à l’avion pour des raisons écologiques», à l’occasion d’une question en ligne récemment posée aux internautes du Figaro (près de 40.000 votants). Cette question faisait écho à l’émergence d’un phénomène en vogue en Suède et très relayé ces derniers jours: le «flygskam». Par souci d’écologie, de plus en plus de Suédois cèdent à la «honte de prendre l’avion» et privilégient le train, même pour de longs trajets.

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Pour rappel, selon l’agence européenne de l’environnement (AEE)*, un passager en avion émet 285 grammes de C02 sur un kilomètre, contre 158 grammes en voiture et seulement 14 grammes en train. Le phénomène du «flygskam» existe-t-il aussi en France? Qui sont ces Français ayant décidé de voyager autrement?

« Tous mes efforts quotidiens étaient éradiqués par un simple trajet en avion... à quoi bon continuer ? »

Bénédicte, 30 ans

Bénédicte, 30 ans, vit en Loire-Atlantique et travaille dans la communication. «J’ai pris l’avion sans compter pendant plusieurs années. Un de mes objectifs de vie était de voyager le plus possible», explique-t-elle. Avant de poursuivre: «Lorsque j’ai commencé à m’intéresser à la préservation de l’environnement, je me suis rendu compte que si tout le monde prenait l’avion comme moi, une à deux fois par an, la planète serait dans un état encore plus catastrophique qu’aujourd’hui». La jeune femme, qui mange «local» au maximum et tend vers le «zéro déchet» depuis 4 ans, prône un mode de vie écologique. «J’ai totalement arrêté de prendre l’avion il y a 3 ans. De mon point de vue, c’était nécessaire pour une cohérence maximale. Tous mes efforts quotidiens étaient éradiqués par un simple trajet en avion... à quoi bon continuer?», interroge-t-elle. «J’ai honte d’avoir pris autant l’avion et j’espère que les personnes qui continuent à le prendre comprendront que c’est un moyen de locomotion destructeur. Le voyage en France et en Europe, en train ou en voiture, offre d’incroyables possibilités de voyages moins polluants», conclut Bénédicte.

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« Je pars moins souvent mais plus longtemps. Exit les week-ends en avion dans des capitales européennes »

Ingrid, 32 ans

Ingrid, 32 ans, est attachée de presse. «J’ai eu la chance durant mon adolescence de vivre à l’étranger et de beaucoup voyager», explique-t-elle. Avant de poursuivre: «Même si je garde le goût des voyages, j’essaie depuis plusieurs années de réduire drastiquement mes trajets en avion, seulement pour des longs courriers et une fois toutes les quelques années». «C’est compliqué quand on a des frères et sœurs vivant à plusieurs milliers de kilomètres! Du coup, je pars moins souvent mais plus longtemps. Exit les week-ends en avion dans des capitales européennes», raconte Ingrid. La jeune femme a déjà pris le train pour aller à Berlin, Copenhague, Lisbonne, Stockholm ou encore Bucarest. «Dans ces cas-là, le trajet fait vraiment partie du voyage. Il permet d’éprouver la distance, de prendre le temps qu’on n’a pas dans la vie de tous les jours pour lire, préparer son séjour... Sur place aussi, on a plus de temps pour vraiment découvrir le pays dans lequel on met les pieds», explique Ingrid. «Malheureusement, le train reste souvent plus cher que l’avion, et beaucoup de trains de nuit ont disparu ces dernières années», conclut-elle.

« Je fais ce qui est en mon pouvoir pour mener une vie plus simple et plus lente »

Léo, 27 ans

Léo, 27 ans, est lui sans emploi. Depuis 9 mois, il a choisi de voyager à travers l’Europe, par le biais de l’entraide (auto-stop, hébergement chez des habitants). «Je fais ce qui est en mon pouvoir pour mener une vie plus simple et plus lente. Pour moi, c’est un devoir moral», explique-t-il. Il poursuit: «Afin de lutter contre le réchauffement climatique, une partie de l’humanité doit complètement et rapidement revoir son mode de vie. Le jeune homme a ainsi décidé ne plus du tout prendre l’avion. «J’ai déjà pris l’avion 4 ou 5 fois entre 2014 et 2016 pour faire mes études à l’autre bout de la France, en privilégiant le train lorsque c’était possible. Je n’étais déjà pas fier de le prendre à l’époque et je l’ai surtout fait car le train était parfois beaucoup trop cher», raconte-t-il. Pour voyager, il a fait une croix sur les destinations à l’autre bout du monde. «Je préfère ma version du tourisme: rencontrer et partager des moments avec des habitants par l’intermédiaire du volontariat, en prenant mon temps pour me déplacer, en auto-stop, en train ou en bus», conclut Léo.

« Je rêve d’aller en Nouvelle-Zélande mais ma culpabilité m’a pour l’instant empêchée de concrétiser cette envie »

Alexia, 33 ans

Alexia, 33 ans et ingénieure à Toulouse, est elle aussi dans une situation similaire. «Je n’ai jamais beaucoup pris l’avion mais depuis que je suis consciente des enjeux écologiques, il m’est devenu difficile d’envisager le prendre», explique la jeune femme. «J’ai eu des déplacements imposés par mon précédent emploi. Pour une conférence en Europe, j’en avais pour plus de 24 heures de train, j’ai dû renoncer la mort dans l’âme et prendre l’avion», poursuit Alexia. Exerçant un nouveau travail depuis, la Toulousaine a déjà fait en train ou refusé des déplacements qui étaient prévus en avion. «Pour mon usage personnel, je vais toujours voir ma famille en train malgré la durée de 7 heures minimum que cela implique. Je déplore à ce titre la disparition du train de nuit qui nous facilitait bien la vie avant que la SNCF ne le supprime», poursuit Alexia. Avant de conclure: «Je rêve d’aller en Nouvelle-Zélande voir les sites de tournage du Seigneur des Anneaux mais ma culpabilité m’a pour l’instant empêchée de concrétiser cette envie».

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Les Français et l’avion en quelques chiffres

D’après l’enquête nationale 2017 de la direction générale de l’Aviation civile auprès des passagers aériens, en France, 49% des voyages sont pour des vacances ou des loisirs, contre 28% pour des motifs professionnels et 22% privés (visite à des amis ou de la famille).

Par ailleurs, selon l’enquête 2016 sur les pratiques environnementales des Français - menée par le ministère de la Transition écologique -, le milieu socio-économique joue fortement sur l’usage de l’avion. Ainsi, en 2016, 81% des ouvriers déclaraient «ne pas avoir pris l’avion l’an passé», contre 72% des employés et seulement 47% des cadres supérieurs. 78% des personnes vivant en milieu rural indiquaient «ne pas avoir pris l’avion l’an passé», contre seulement 54% des personnes vivant en agglomération parisienne.

Selon le calculateur de la direction générale de l’aviation civile (DGAC), une personne émet une tonne de CO2 durant un aller-retour Paris/New-York en avion: c’est l’équivalent des émissions annuelles moyennes d’un Français pour le chauffage de son domicile.


Comment les gouvernements incitent-ils les citoyens à moins prendre l’avion?

Dans les témoignages que nous avons recueillis, certains expliquent que «le train reste souvent plus cher que l’avion». Pour plusieurs trajets intra-européens de courte distance, l’avion est effectivement plus avantageux économiquement. Par exemple, pour un Paris - Londres le 29 avril (aller simple pour un adulte), un trajet avec la compagnie aérienne «low cost» Easyjet coûte 57,77 euros, contre plus de 100 euros en Eurostar. Même chose pour un Paris - Amsterdam: il en coûte 63 euros avec la compagnie aérienne Transavia, contre plus de 130 euros en Thalys.

Pour un Paris - Londres, le 29 avril, il est possible de voyager en avion pour 57,77 euros. Capture d'écran
Pour un Paris - Londres, le 29 avril, un trajet en Eurostar coûte plus de 100 euros. Capture d'écran

Pour rendre les prix de l’avion plus dissuasifs, et influencer les comportements, les gouvernements peuvent utiliser le levier de la fiscalité. La Suède a par exemple introduit une taxe écologique sur le transport aérien il y a un an. En mars, après les Pays-Bas en février, la Belgique avait plaidé - lors d’une réunion des ministres européens de l’environnement - pour la mise en place d’une taxe européenne sur le transport aérien afin de lutter contre le réchauffement climatique. La secrétaire d’État à la transition écologique, Brune Poirson, avait alors indiqué sur Twitter: «Le secteur aérien doit contribuer pleinement à la lutte contre la pollution. À Bruxelles, j’ai soutenu aujourd’hui aux côtés de la Belgique et des Pays-Bas des mesures visant par exemple à créer une taxe carbone sur les billets d’avion ou encore une taxe sur le kérosène». Le kérosène des avions et des bateaux échappe en effet aux taxes. Raphaël Glucksmann - tête de liste PS-Place publique en vue des élections européennes -, souhaite remédier à cette situation en instaurant une taxe sur le kérosène pour les vols intra-européens.

À l’occasion d’un récent débat télévisé pour les élections européennes, le candidat communiste, Ian Brossat, proposait lui de différencier la TVA sur l’avion et le train afin d’alourdir la taxation du transport aérien. Autre possibilité pour faire bouger les lignes: des décisions politiques «drastiques». Aux Pays-Bas, des députés souhaitent ainsi supprimer les vols Amsterdam-Bruxelles, considérés comme une absurdité environnementale. En Allemagne, le député écologiste Dieter Janecek a lui proposé de limiter à trois le nombre d’allers-retours en avion par an et par personne. Enfin, la prise de conscience citoyenne des enjeux environnementaux, comme en attestent les témoignages recueillis et les récentes marches pour le climat en France, est un élément déterminant. Selon un sondage Odoxa - Dentsu Consulting pour Le Figaro , publié le 4 avril à l’occasion des futures élections européennes, l’environnement est d’ailleurs la 3ème priorité des Français (à égalité avec la sécurité), derrière le pouvoir d’achat et l’immigration.

* L’AEE indique par ailleurs que les transports représentent plus d’un quart de la totalité des émissions de gaz à effet de serre en Europe: les transports routiers y contribuent à hauteur de 72%, l’aviation pour 13,3% et le transport maritime pour 13,6%. Le transport ferroviaire représente lui une part infime des émissions.

Ces Français qui ne prennent plus l’avion pour préserver la planète

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1190 commentaires
  • Altitude

    le

    Lé... ça ose tout, et c’est même à ça qu’on les reconnaît...

  • lou lou-lou

    le

    ben oui ...je vois que ces jeunes femmes représentent fidèlement les JF qui bossent en usines.......

  • frank nolax

    le

    Lobotomises par les medias on vous dit!!

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