Le drapeau du Sri Lanka dit tout de la complexité ethnique et religieuse du pays

Le drapeau du Sri Lanka.

Le drapeau du Sri Lanka. WIKIMEDIA COMMONS

Deux tiers du drapeau consacré aux bouddhistes, deux fines bandes pour les musulmans et hindouistes, rien (ou presque) pour les chrétiens...

Un drapeau national en dit souvent long sur l’histoire du pays. C’est particulièrement le cas de celui du Sri Lanka. Alors que le pays est ensanglanté par une terrible série d’attaques sans précédent contre la communauté chrétienne, ce drapeau mérite d’être regardé de plus près.

Conçu au lendemain de l’indépendance de la nation, en 1948, en remplacement de l’union Jack britannique, puis remanié en 1951 pour symboliser l’unité nationale, il symbolise toute la complexité ethnico-religieuse du pays, et la place qu’y occupent les minorités.

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Le Lion royal avec son épée et les feuilles rouges symbolisent la race cinghalaise. Le félin incarne la souveraineté du pays, mais aussi la place prépondérante de bouddhisme, largement majoritaire (plus de 70% de la population) dans ce petit pays multiculturel de 21,4 millions d’habitants, tandis que la bande orange représente la minorité tamoule, pour l’essentielle hindouiste, et la bande verte, la minorité musulmane, (9,7%, principalement sunnites). La communauté chrétienne, très minoritaire, est estimée à moins de 2 millions, soit 7,4% de la population, et n’y figure même pas… C’est la bordure jaune autour du drapeau, qui est censée représenter l’ensemble des autres minorités, parmi lesquelles…. les chrétiens.

C’est cette communauté qui a été clairement ciblée durant ces fêtes pascales, avec cette série d’attentats qui a fait près de 200 morts, dans une série d’églises réparties dans plusieurs endroits du pays.

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Pourquoi ces attaques contre les minorités ?

Voilà des années, en vérité, que représentants des communautés religieuses et ONG dénoncent dans une indifférence quasi générale, une politique de discrimination et des exactions récurrentes envers les minorités à la fois chrétiennes et musulmanes du pays. Des complicités avérées entre des membres du gouvernement et des attaques contre des minorités ont été clairement mises à jour. Des églises chrétiennes, dites « évangéliques » ou répondant à des groupes « non identifiés », ont dénoncé des attaques récurrentes, des agressions contre leurs membres, par la police ou par l’administration locale.

Faute à la fois de moyens et de volonté politique, alors que les cours d’éducations religieuses sont obligatoires, tous les cultes sont loin d’être représentés dans les établissements scolaires et de nombreux étudiants sont soumis à des cours d’éducation d’une religion différente de la leur, sérieuse source de tensions. Difficile de dire que le gouvernement fasse tout pour apaiser la situation.

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Harcèlement par les autorités locales

Ainsi en Juin 2017, le ministre de la justice de l’époque a menacé de prison Lakshan Dias, un célèbre avocat spécialiste des droits de l’homme pour avoir dénoncé dans une interview pas moins 190 attaques menées contre des églises évangéliques sous le gouvernement actuel. Tandis que des groupes bouddhistes défendent ouvertement un suprémacisme ethnique, dénigrant sans complexe les minorités religieuses, attisant l’incendie via les réseaux sociaux, les églises chrétiennes, évangéliques notamment, ne cessent de dénoncer le harcèlement et les attaques dont elles sont l’objet de la part de la police et des autorités locales. Depuis un an, ces attaques se sont intensifiées.

De son côté, le Conseil musulman du Sri Lanka (MCSL, sri Lankan Muslim Council) a lui aussi dénoncé des dizaines d’attaques contre des mosquées et des salles de prières, par des activistes bouddhistes cinghalais, durant le Ramadan notamment. Des commerces sont régulièrement incendiés.

Pour l’instant, ces attentats dramatiques contre la communauté chrétienne n’ont pas été revendiqués…

Le premier ministre Ranil Wickremesinghe, qui pilote les réunions de crise en l’absence du président, a appelé à la plus grande prudence.

«S’il vous plaît, évitez de propager des rapports non vérifiés et des spéculations » a-t-il déclaré sur Twitter:

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Puisse-t-il être entendu.

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