
POLITIQUE - C’était il y a 35 ans. En 1984, alors étudiante à Sciences Po Paris, Nathalie Loiseau, qui s’appelait à ce moment là Nathalie Ducoulombier, figurait en 6e position sur une liste composée à l’occasion des élections des délégués étudiants au conseil de direction et à la commission paritaire de la prestigieuse école.
Problème, révèle Mediapart ce lundi 22 avril, cette liste était celle de l’Union des étudiants de droite (UED), “un syndicat étudiant né sur les cendres du GUD”. Pour rappel, le Groupe union défense est une organisation étudiante d’extrême droite adepte du coup de poing ayant beaucoup fait parler d’elle pour des faits de violence dans les années 80.
Selon le site d’investigation, la liste sur laquelle figurait l’ex-ministre aux affaires européennes prônait l’union des droites, des maurassiens aux gaullistes. “L’UED s’opposera fermement à toutes les propositions qui, sous couvert de ‘démocratisation’, visent à instaurer la démagogie et le terrorisme marxiste”, promettait par exemple le programme du syndicat.
Ex-gudard et ami proche de Marine Le Pen, Frédéric Chatillon expliquait lui même dans un livre que cette organisation avait pour mission d’“incarner le nationalisme” au sein de l’établissement de la rue Saint-Guillaume. Voilà qui tombe plutôt mal pour celle qui entend justement lutter contre ce même nationalisme le 26 mai prochain.
“J’avais complètement oublié cet épisode”
Interrogé par Mediapart à ce sujet, l’entourage de la tête de liste LREM a d’abord louvoyé, affirmant dans un premier temps que les journalistes faisaient fausse route sur la base d’un “faux”. Mais quelques semaines plus tard, Nathalie Loiseau a elle-même reconnu avoir figuré sur cette liste.
″À ce moment-là, j’ai été, d’après mes recoupements -parce que pour être tout à fait honnête j’avais complètement oublié cet épisode-, approchée pour participer à une liste qui voulait accentuer le pluralisme à Sciences-Po, alors quasi inexistant, et qui cherchait des femmes. J’ai dit oui”, a-t-elle expliqué, jurant qu’elle ignorait la coloration politique de cette liste.
L’ancienne directrice de l’ENA affirme également ne pas avoir fait campagne et ne pas avoir été particulièrement attentive à la suite de cette élection. “Si j’avais identifié des membres du GUD sur cette liste, évidemment que je n’aurais pas accepté d’y figurer. Je regrette d’avoir été associée à ces gens-là”, assure Nathalie Loiseau qui, pour prouver sa bonne-foi, révèle qu’elle avait quitté l’université Paris-II-Assas avant son entrée à Sciences Po en raison justement de l’ambiance “irrespirable” instaurée par la “fachosphère”.
Même si cette histoire est vieille de plusieurs décennies, les adversaires politiques de Nathalie Loiseau n’ont pas manqué d’ironiser sur cet épisode qui n’apparaissait pas sur son CV. “On a le droit de changer d’avis, mais pour une formation politique qui fait toute sa com’ autour de l’idée qu’elle constitue le rempart face à l’extrême-droite, ça fait drôle”, a commenté sur Twitter Ian Brossat, tête de liste PCF aux élections européennes.
“Loiseau, Bardella, les deux faces de la même médaille : ce n’est plus un duel mais un duo”, a pour sa part raillé le député insoumis Bastien Lachaud, alors que son collègue LR Daniel Fasquelle a ironisé sur les “convictions” de Nathalie Loiseau.
Auprès de Mediapart, Nathalie Loiseau a tenu à insister: ”(je n’ai) jamais eu d’engagement à l’extrême droite, ni proche de l’extrême droite, ni de fréquentations d’extrême droite”. Cinq ans après cet épisode de Sciences Po, la jeune Nathalie Ducoulombier s’était présentée aux européennes sur une liste “fédéraliste”. Une orientation politique résolument pro-européenne pas vraiment compatible avec la ligne nationaliste de l’UED.
Avant elle, plusieurs personnalités politiques ont, à des degrés divers, eu un passif avec des formations d’extrême droite durant leurs études. Parmi elles, les anciens ministres de Nicolas Sarkozy, Patrick Devedjian et Gérard Longuet.
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