New York s'attaque à sa principale source d'émissions carbone : ses gratte-ciel
Le conseil municipal de New York a adopté un texte qui obligera les gratte-ciel et grands bâtiments à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre de 40 % d'ici 2030. La « Trump Tower », qui consomme « plus d'énergie par mètre carré que 93 % des grands immeubles résidentiels », est concernée.
Par Leïla Marchand
Quoi de plus emblématique de New York que sa skyline ? C'est précisément cette vue de Manhattan qui est à l'origine de la majeure partie des gaz à effets de serre émis par la ville la plus peuplée des Etats-Unis. D'après des chiffres communiqués par la mairie new-yorkaise, les bâtiments représentent environ 70 % des émissions de ces gaz responsables du dérèglement climatique.
C'est pourquoi le conseil municipal a approuvé en fin de semaine un texte obligeant les bâtiments de plus de 2.300 mètres carrés à réduire de 40 % leurs émissions d'ici à 2030. Ce texte, adopté à une écrasante majorité (45 voix contre 2), fait partie d'un ensemble de lois sur la protection de l'environnement promulgué ce jeudi, comme la suppression progressive des centrales électriques à combustibles fossiles et la végétalisation de certains toits de la ville.
Ce « Climate Mobilization Act » est présenté par les élus d émocrates comme une version locale du « Green new deal », un plan très ambitieux porté par la jeune star démocrate du Congrès Alexandria Ocasio-Cortez pour rendre les Etats-Unis neutres en carbone.
Avec 50.000 bâtiments concernés, « il s'agit de la plus importante politique de réduction d'émissions jamais mise en place dans une ville », a affirmé le conseiller municipal de la ville qui a piloté le projet de loi, Costa Constantinides. En « modernisant les bâtiments », la ville espère « réduire considérablement la pollution à long terme », a souligné Ben Kallos, un autre membre du conseil, dans un communiqué.
La « Trump Tower », un des plus énergivores
Les gratte-ciel sont dans le viseur de la mairie. D'après une analyse d'ALIGN-NY, un groupe environnemental soutenant la législation, environ 2 % des bâtiments de la « Grosse Pomme » sont responsables de la consommation de 45 % de son énergie.
« Ce sont surtout les plus grands immeubles de la ville de New York, d'une superficie de plus de 4.500 mètres carrés, comprenant principalement des appartements de luxe, des locaux commerciaux et les complexes d'habitations multifamiliales » qui sont concernés, peut-on lire dans leur rapport de 2015.
La « Trump Tower », le gratte-ciel emblématique du président américain, émet plus de carbone que 92 % des bâtiments de la ville. D'autres bâtiments célèbres, tels que l'Empire State Building et le Chrysler Building, sont également particulièrement énergivores.
La loi limite le nombre de tonnes de carbone qu'un bâtiment peut produire par mètre carré, avec des limites différentes pour les bâtiments résidentiels, commerciaux et industriels. Des règles plus souples ont été fixées pour les hôpitaux, les lieux de culte et les logements à loyer réglementé.
4 milliards de dollars à payer par les propriétaires
Pour respecter ces plafonds, de nombreux bâtiments vont devoir remplacer leur système de chauffage ou de climatisation par des modèles plus efficaces ou engager des travaux pour améliorer leur isolation. Ils pourront également choisir d'utiliser de l'électricité provenant de sources non polluantes comme l'énergie solaire ou hydraulique.
Le secteur immobilier s'est battu contre le texte, qui pourrait coûter quelque 4 milliards de dollars aux propriétaires, selon certaines estimations. Le président du syndic d'un immeuble résidentiel de plus de 400 appartements dans le district du quartier du Queens, Ed Ermler, a affirmé que la tâche était impossible dans l'état actuel des technologies. « Ce n'est pas comme si on avait une baguette magique », a-t-il affirmé à des médias américains.
La mairie assume cette politique contraignante en faveur du climat. « Nous allons envoyer un message au reste du monde pour lui dire que c'est réalisable. Que d'autres villes peuvent adopter cette législation et la mettre en oeuvre », a déclaré Costa Constantinides, membre du conseil.
Le maire démocrate, Bill de Blasio, a déjà promis d'entériner le texte, et pourrait le signer lundi prochain, en l'honneur de la Journée de la Terre. La ville de New York s'est engagée à réduire ses émissions de 80 % d'ici 2050. Bastion démocrate, elle prend ainsi le contre-pied du gouvernement climatosceptique de Donald Trump.
Leïla Marchand