Environnement

Les forêts tropicales détruites en 2018 représentent la surface du Nicaragua

12 millions d’hectares de bois tropicaux ont disparu l'année dernière, la quatrième plus grande perte depuis 2001, selon le World Resources Institute. De plus en plus de pays sont concernés.
par Lucie Lespinasse
publié le 24 avril 2019 à 17h47

En 2018, dans le monde, des surfaces de forêts tropicales équivalentes à 30 stades de foot étaient détruites chaque minute. Tel est le triste constat que dresse le World Resources Institute (WRI) mardi. Et sur l'ensemble de l'année 2018, la surface mondiale de bois tropicaux détruite représentait 12 millions d'hectares, soit la taille du Nicaragua, la quatrième plus grande perte depuis 2001. L'année 2016 reste le «record» avec 16,9 millions d'hectares de disparition de forêts tropicale.

Plus inquiétant encore : la dévastation de 3,64 millions d'hectares de forêts tropicales primaires en 2018 (une surface plus grande que la Belgique). Ces zones boisées primaires (des forêts n'ayant jamais été exploitées, détruites ou influencées par l'action de l'homme) sont cruciales pour l'écosystème puisqu'elles permettent notamment d'emmagasiner plus de carbone, grâce aux arbres centenaires et millénaires, mais aussi d'abriter de nombreuses espèces animales.

Cette étude menée par Global Forest Watch (un réseau d'ONG créé par le WRI) grâce à des données de l'université du Maryland prend en compte la destruction des forêts dans les pays tropicaux. Aucune différence n'est cependant faite entre la destruction permanente (avec la déforestation) ou temporaire ou encore entre les causes naturelles ou humaines.

Des améliorations

Outre les résultats inquiétants sur la surface mondiale boisée, l'Institut fait une autre observation : le déplacement des frontières. En 2002, le Brésil et l'Indonésie représentaient à eux seuls 71% des pertes de forêts tropicales primaires. En 2018, leur chiffre est tombé à 46%. Dorénavant, la République démocratique du Congo (RDC), la Colombie et la Bolivie s'ajoutent aux deux pays précédents pour représenter plus des deux-tiers des régions touchées.

L'Indonésie signe en effet, avec ses 340 000 hectares de forêt primaire détruits en 2018, une réduction de 63% par rapport à son pic de 2016. Une baisse rendue possible en partie par les politiques du gouvernement mais aussi grâce à deux années humides successives, limitant les incendies.

Idem, au Brésil, l'année dernière, les niveaux de déforestation ont été bien plus bas qu'en 2016 et 2017, mais avec son 1,3 million d'hectares de forêt primaire détruits, le pays reste toujours au-dessus des niveaux historiques. Les déboisements dans l'Amazonie pour le développement du pâturage en sont la cause principale. Ces données ne portent que sur l'année 2018. Pire risque d'être celles de 2019, lorsque seront prises en compte les politiques anti-climatiques de président Bolsonaro. Mais d'ores et déjà, et d'après l'ONG Imazon, la déforestation en Amazonie a augmenté de 54% en janvier 2019 par rapport à janvier 2018.

Mais de nouveaux pays concernés

Pourtant ces améliorations ne sont pas visibles dans tous les pays concernés et l'Institut repère de nouveaux points chauds. Le Ghana et la Côte-d'Ivoire en font partie puisque ces deux pays signent la plus nette hausse (respectivement 60% et 26%) de pertes de forêts tropicales primaires entre 2017 et 2018 de tous les pays concernés. Les mines illégales et l'expansion des fermes de cacao, malgré des engagements de la part de ces dernières, en sont les principales raisons. La République démocratique du Congo connaît aussi une augmentation importante : + 38% par rapport à la moyenne de 2011-2017. L'agriculture, la demande en énergie et les déplacements de population ont, entre autres, causé la perte de 481 000 hectares de forêts primaires.

Enfin, le rapport met l'accent sur trois autres pays d'Amérique du Sud : la Colombie, la Bolivie et le Pérou. Trois pays où l'agriculture, le pâturage mais aussi la construction de routes entraînent une hausse des destructions de forêts. En Colombie en particulier, on assiste entre 2017 et 2018 à un accroissement de 9% de la déforestation, notamment à cause de l'accessibilité à de nouveaux territoires depuis le processus de paix.

Et si l'Institut rappelle que des centaines de pays et de villes tentent de limiter ou éliminer la déforestation en 2020 et assure que certains progrès sont visibles, il estime tout de même que beaucoup d'autres Etats vont dans la mauvaise direction.

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