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Femmes

Comment fonctionne Les Lionnes, l'association contre le sexisme dans la publicité

Christelle Delarue a créé Les Lionnes, la première association française qui lutte contre le sexisme dans la publicité et la communication, née après les révélations de la "ligue du LOL". Comment s'organisent-elles? Quels sont leurs projets? Prochaine étape, la mise en place d'un programme antisexisme avec l'AACC, le syndicat professionnel du secteur.

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Christelle Delarue a monté Les Lionnes, une association de femmes qui lutte contre le sexisme dans la publicité.

Christelle Delarue présidente des Lionnes, association de femmes qui lutte contre le sexisme dans la publicité.

DR

Elles se font appeler "Les lionnes". Depuis mi-février, 200 femmes ont rejoint la première association française qui lutte contre le sexisme dans la pub. Le nom est une référence aux Lions de Cannes, le festival qui récompense la créativité dans la publicité, mais aussi un moyen de représenter, au figuré, des femmes prêtent à sortir les griffes pour se défendre. Habile comme un slogan publicitaire.

L’initiative vient de Christelle Delarue, 37 ans, qui a bourlingué dans les grandes agences en début de carrière : Euro RSCG à New York, TBWA, Buzzman et Marcel. Lasse d’imaginer des publicités trop stéréotypées, elle a fondé, il y a sept ans, sa propre agence Mad&Women, pour proposer des images plus inclusives. "A l’heure où les annonceurs se font taper dessus sur les réseaux sociaux pour des campagnes représentant une image des femmes rétrograde, les campagnes non-stéréotypées produisent des retours sur investissement de plus de 25%", précise-t-elle pour expliquer son choix. Si elle accepte depuis longtemps l’étiquette de "féministe", elle sent un réveil du milieu sur l’égalité femmes-hommes.

"Le premier déclic remonte à fin 2017 quand le mouvement #Metoo s’est déclenché. Je me suis exprimée et j’ai reçu plus de 200 témoignages de femmes de la pub dans ma boite mail, victimes de sexisme ordinaire ou de violences plus graves", se souvient Christelle Delarue. "Ces femmes n’étaient pas en lien avec des représentants syndicaux, elles ne se sentaient pas en confiance pour en parler avec leurs DRH, elles n’étaient pas en lien les unes avec les autres". Elle ouvre donc la porte de chez elle et en reçoit un certain nombre en rendez-vous en tête-à-tête le samedi matin. La voilà devenue porte-parole des victimes de sexisme dans la pub malgré elle. Christelle Delarue est persuadée qu’il y a un lien entre les contenus stéréotypés et l’atmosphère ambiante dans les agences. "On ne veut plus d’une industrie ringarde à la 99 francs [le roman de Frédéric Beigbeder publié en 2002], loin de notre époque et qui plie devant la créativité des GAFA. On veut une qualité de création qui se nourrit de la diversité de ses salariés." Le message ne passe pas tout de suite.

Le deuxième déclic s’enclenche avec l’affaire de la "ligue du LOL", ce groupe de journalistes, communicants et publicitaires qui cyberharcelaient des jeunes femmes sur les réseaux sociaux. "L’affaire a libéré la parole, plusieurs journalistes ont été mis à pied, mais j’ai eu peur qu’on n’en parle pas dans la pub…" Elle publie donc une tribune dans Le Monde "Mes sœurs et moi, filles de pub, survivons à vos torts sans pouvoir nous en détacher", puis réécrit à ses consœurs. Le quotidien du soir publie ensuite deux enquêtes, l’une met en cause l’agence Herezie, l’autre Marcel, une filiale de Publicis…les témoignages affluent.

Programme de lutte contre le sexisme

Si les femmes dirigeantes de la pub ne voulaient pas d’une telle initiative en 2017, la jeune génération répond à l’appel de 2019. Fin février, elle réunit 27 personnes dans une assemblée générale constituante qui prend rapidement la forme d’un groupe de parole de quatre heures où chacune raconte ses histoires les plus sombres. Les statuts associatifs des Lionnes rappellent son objectif: "protéger, défendre et promouvoir les femmes dans les entreprises de la pub et de la communication". L’association grossit très vite et s’organise donc en différents comités thématiques: les stéréotypes, l’éducation à la pub, l’égalité professionnelle et salariale, le problème des créatives et l’écoute des victimes. Ce dernier point est crucial, car 30% des femmes que Christelle Delarue a rencontrées dans l’année demandent du soutien sur leur situation personnelle, soit des cas de harcèlements ou d’agressions sexuelles. Les Lionnes les renvoient vers l’institut "Women safe" qui met des spécialistes en tous genres (médecins, psychologues, avocats) à disposition des victimes. Prochaine étape? Les Lionnes veulent installer un "hotline d’écoute".

Elles imaginent déjà la suite. Un programme de lutte contre le sexisme, en partenariat avec l’Association des Agences-Conseil en communication (AACC), le syndicat professionnel du secteur, va être annoncé à la mi-mai. Puis une enquête sur l’ampleur du harcèlement sexuel et sexiste dans les agences, sur le modèle de #entendualarédac, lancé par l’association des femmes journalistes Prenons la Une* et Nous Toutes. Les Lionnes réfléchissent aussi à une action coup de poing au festival Les Lions de Cannes. Elles n’en diront pas plus pour maintenir l’effet de surprise... La suite à voir sur leurs comptes Twitter et Instagram.

* L'auteur de cet article est membre de l'association Prenons la Une.

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