Il y’a 20 ans : le champion d’échec Kasparov défie le reste du monde sur la toile

Technologie : Deux ans après sa défaite historique face au super-ordinateur Deep Blue d’IBM, Garry Kasparov remet ça. Seule différence, le champion d’échecs se confronte cette fois au reste du monde sur le plus grand terrain de jeu jamais créé : la toile.

Par Pierre Benhamou

  • 3 min

Kasparov%20140

C’est la mine défaite et les épaules tombantes de celui qui n’espère plus rien que Garry Kasparov, le champion incontesté d’échecs, quitte la table de jeu ce 11 mai 1997 sur une défaite historique. N’espérez pas de poignées de mains, il n’y en aura pas.

Garry Kasparov lors d’un rassemblement politique à Moscou, en 2008 (à droite).

D’une parce que l’ogre de Bakou, pourtant victorieux lors de sa première opposition face à son adversaire du jour, a quitté précédemment l’arène pour soigner ses maux de têtes. D’autre part parce que son opposant n’a que processeur et cartes à puces à offrir en guise de main.

Vous l’aurez compris, le vainqueur de ce qui se trame ce jour de mai 1997 n’est pas un humain mais bien un ordinateur. Et pas n’importe lequel. Au terme de cette seconde confrontation d’anthologie, ce n’est pas que Garry Kasparov qui a perdu mais bien l’humanité toute entière, balayée par la puissance de calcul du super-ordinateur Deep Blue d’IBM, une machine classée parmi les 500 ordinateurs les plus puissants au monde.

Si le monde sort bouleversé de cette opposition qui place désormais la machine au-dessus de ses créateurs humains, ce n’est pas le cas du joueur d’échec. « Je pense qu’il est temps pour Deep Blue de jouer aux ‘vrais’ échecs et je peux vous promettre à vous tous que si Deep Blue joue à la régulière, je vous le garantit, je le réduit en pièces », expliquera ce dernier, après avoir laissé son fair-play au vestiaire.

La pique a beau être acérée, elle ne trouvera pas de réplique du côté de Deep Blue, qui, pour toute championne d’échec qu’elle peut désormais se targuer d’être, ne fait pas montre d’une débauche de sentiments, que ce soit pour Kasparov ou – d’ailleurs – pour n’importe lequel des congénères de ce dernier.

Kasparov vs. The World

Si la rencontre fera polémique – le champion d’échecs se demandant si certains coups joués par son adversaire à puces ne seraient pas d’origine humaine et réclamant vainement à IBM l’ensemble des logs de la partie – Kasparov fera de nouveau parler de lui deux ans plus tard.

Avec cette fois, une rencontre aux dimensions encore plus singulières. Car ce que propose cette fois l’ogre de Bakou dit tout de l’ego qui anime ce dernier. C’est bien simple : après avoir défié la technologie, Kasparov s’attaque cette fois à l’humanité toute entière.

Pour ce faire, Kasparov s’associe pour l’occasion à Microsoft via la Gaming Zone alors développée par le géant américain. Là, les internautes férus d’échecs sont invités à voter pour déterminer chaque coup. Des suggestions sont toutefois faites par cinq jeunes experts d’échecs, appelés à conduire de fait l’équipe mondiale opposée à L’Ogre de Bakou.

Un événement qui doit, selon ce dernier, participer à l’expansion de la pratique des échecs en ligne. « Je pense que cela va nous aider à établir de nouvelles solutions techniques qui inciteront plus de gens à venir jouer aux échecs en ligne », indique en effet le champion à la presse américaine.

Le match du siècle débute le lundi 21 juin. Il est alors entendu que Kasparov effectuera le premier déplacement de pièce, tandis que ses opposants, les internautes, auront pour leur part 24 heures pour déterminer leur coup via un système de vote en ligne, et ainsi de suite.

Si le dispositif s’avère solide et permet à chacun de participer à la rencontre via un forum dédié, les querelles y sont légion, de nombreux joueurs se demandant si Kasparov ne scrute pas leurs discussions pour déterminer ses propres coups, ce que ce dernier admettra quelques jours après la fin de la partie.

Au terme d’une joute de plusieurs mois, le dernier ballet de pièces s’achève après 62 coups le 22 octobre suivant sur une victoire de Garry Kasparov, qui reconnaitra par la suite avoir eu fort à faire pour se débarrasser de ses opposants.

Si la rencontre sera, là encore, entachée de scandales, des joueurs reprochant à Microsoft d’avoir modifié en cours de partie les accès au système de vote pour ne l’ouvrir qu’aux seuls utilisateurs Windows, elle est toutefois restée dans les annales, le magazine « The Observer » la classant à la troisième marche du podium des plus belles parties d’échecs des vingt dernières années… Derrière la défaite de l’ogre de Bakou contre Deep Blue.

Pour consulter les archives de ZDnet.fr, il y’a 20 ans, c’est ici

Connexion

Vous n’avez pas encore de compte ?

AUTOUR DE ZDNET
SERVICES
À PROPOS