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Savoie : le flop de la première école pour autistes de France

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L'école pour enfants autistes de Montmélian (Savoie) était un beau projet né du combat de deux mères d'enfants autistes sauf qu'en réalité, l'école n'en a jamais été une. Huit mois après son inauguration en grandes pompes, il ne reste plus rien de l'école Bleue.

Il n'y a plus d'école Bleue à Montmélian Il n'y a plus d'école Bleue à Montmélian
Il n'y a plus d'école Bleue à Montmélian © Radio France - Sarah Gilmant

Avoir une véritable école pour les enfants autistes en Savoie, la première en France. Julie Blanc en avait fait son combat. Cette mère de famille avait de grandes ambitions à Montmélian pour l'école Bleue et des soutiens de poids. En septembre 2018, son école avait été inaugurée en présence de Martine Berthet, sénatrice de Savoie ou encore de Marie-France Mailhos, présidente de l’association européenne de l'éducation.

Julie Blanc, présidente de l'association "Charly et son voyage imprévu avec l'autisme", porteuse du projet se vantait même d'avoir reçu un courrier de soutien de la Première Dame de France, Brigitte Macron.

"Les enfantillages des adultes ont occulté l’intérêt premier de ce projet, celui des enfants autistes" - Audrey Chojnacki, mère du petit Eden accueilli à l’école Bleue

Huit mois après l'inauguration, le rêve s'est transformé en cauchemar. "Je suis humiliée, brisée, je reçois des appels et des messages de haine, on me dit que je ne suis qu'un escroc" raconte Julie Blanc. 

"Moi, j'ai cru en leur projet. J'ai été gentil mais voilà, trop bon, trop con !" - Jacky Bagra, le propriétaire des locaux

La présidente de l'association est accusée d'escroquerie par le propriétaire des locaux (lésé de 18.000 euros de loyers impayés), elle est aussi accusée par des parents d'avoir harcelé leur fils de 5 ans placé à l'école bleue, la mère de famille est même soupçonnée par d'anciens bénévoles d'avoir maltraité un chien. "Les gendarmes ont enquêté et tout a été classé sans suite, c'est bien parce que je n'ai rien fait !" se défend Julie Blanc avant d'ajouter "Ils font ça pour me nuire, pour me détruire !"

Selon l’inspection académique de Savoie, l’ouverture de cette école était illégale 

L'établissement n'a jamais eu l'autorisation de l'Education nationale d’ouvrir en tant qu’école. Les dossiers déposés pour ce projet pédagogique n’étaient pas complets, "il manquait toujours un papier et les noms donnés pour devenir directeur d'école ne convenaient pas. Personne n’avait les compétences pour assumer ce rôle", confie un des inspecteurs, "mais l’école a quand même ouvert. Pour nous, elle n’existait pas."

En novembre 2018, l'école Bleue accueille quelques enfants encadrés par des bénévoles mais sans professionnel de la petite enfance
En novembre 2018, l'école Bleue accueille quelques enfants encadrés par des bénévoles mais sans professionnel de la petite enfance © Radio France - Sarah Gilmant

L’inspection académique de Savoie prévient alors deux familles qui ont décidé d’inscrire leurs enfants à l’école Bleue. "Ces enfants autistes sont normalement scolarisés à domicile, nous les suivons tous. Nous avons bien dit aux familles que ce n’était pas une école" poursuit l’inspecteur. L'académie assure suivre le dossier, "plusieurs de nos inspecteurs sont venus à l’école Bleue mais à chaque fois, ils ont trouvé portes closes."

Après un courrier envoyé pour signaler l'illégalité de l'ouverture, la présidente de l’association change le statut de l’école Bleue qui devient alors un établissement d’accueil récréatif en janvier, soit plus de quatre mois après son inauguration. 

Du bonheur du petit Eden dans la cour en novembre dernier aux enfers d'aujourd'hui
Du bonheur du petit Eden dans la cour en novembre dernier aux enfers d'aujourd'hui © Radio France - Sarah Gilmant

"L’école Bleue nous a sauvés ! Elle nous a soulagés pendant un temps lorsque notre fils Eden était accueilli et Julie Blanc a tout fait pour nous aider", explique Audrey Chojnacki, la mère d’un enfant qui n’est pas encore diagnostiqué autiste, "c’est dommage que ce projet tombe à l’eau. Je le prends mieux aujourd'hui parce qu'Eden est désormais bien pris en charge."

Sans autorisation de l'Education nationale, sans fonds nécessaires non plus à la création d'une école, les membres de l’association "Charly et son voyage imprévu avec l'autisme", porteuse du projet se sont rapidement retrouvés dépassés. 

"Personne n'a fait son boulot" - Frédéric Dupuy, ancien bénévole de l’association "Charly et son voyage imprévu avec l’autisme" 

"La première désillusion, c’était la séparation des deux fondatrices à l’origine du projet à l'été. Julie Blanc, elle, est restée mais les quelques éducateurs spécialisés prêts à travailler bénévolement ont quitté le projet avant même l’ouverture de l’école. Les bénévoles sont partis les uns après les autres et les factures ont commencé à s’accumuler", raconte Frédéric Dupuy, un ancien bénévole. "Ce que je reproche à la présidente de l’association, c’est qu’elle nous a présenté un joli paquet mais il était complètement vide." 

Les locaux de l'école Bleue sont vidés, dépouillés

"Ils m'ont laissé un vrai taudis" constate Jacky Bagra, le propriétaire des murs de l'école. L'homme avait convenu d'offrir les quatre premiers loyers aux membres de l'association s'ils remettaient les locaux en conformité avec les règles de sécurité. "Sauf qu'au moment où il a fallu payer, il n'y avait plus personne pour me répondre au téléphone" confie-t-il.

"Je vais devoir payer des milliers d'euros de travaux pour réparer les dégâts" - Jacky Braga, le propriétaire des locaux
"Je vais devoir payer des milliers d'euros de travaux pour réparer les dégâts" - Jacky Braga, le propriétaire des locaux © Radio France - Sarah Gilmant

Plus de peinture au mur, plus de balançoire, les plafonds et le parquet sont en partie arrachés, l’association a été obligée de quitter les lieux par décision de justice en mars.

Les bonnes intentions ont laissé place à une bataille judiciaire  

Frédéric Dupuy a porté plainte contre Julie Blanc pour abus de confiance. En retour, Julie Blanc a porté plainte pour harcèlement et diffamation contre l'ancien bénévole. Le propriétaire des locaux, Jacky Braga, pourrait lui aussi se retourner contre l’ancienne présidente de l’association pour obtenir réparation des loyers impayés.

Mais tout le monde est au moins d'accord sur un point... dommage d'en être arriver là.

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