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Comment les employés d’Amazon s’organisent pour dénoncer leurs conditions de travail

Rassemblés à Berlin du lundi 29 au mardi 30 avril, une cinquantaine de délégués syndicaux d’Amazon exigent que le géant du Net établisse des conventions collectives. Une mobilisation inédite.

« Nous sommes des humaines, pas de robots ! ». C’est le slogan qui réunit les syndicats d’Amazon lundi 29 et mardi 30 avril, à Berlin. Pendant deux jours, 50 délégués syndicaux venus de 16 pays différents se rassemblent en huis clos pour dénoncer les conditions de travail dans les 800 entrepôts de la plate-forme partout dans le monde. 

L’objectif de ce sommet inédit est de coordonner les luttes pour obliger le numéro un mondial de vente en ligne à écouter les revendications de ses salariés. De l’Argentine au Pakistan, en passant par l’Italie ou l’Égypte, les syndicalistes lèvent le poing ensemble pour s’ériger contre Goliath. 

Réclamer des conventions collectives

Outre les cadences jugées trop rapides, la surveillance des employés à travers des méthodes contestées de « tracking » ou la suppression des pauses, les employés d’Amazon Logistics déplorent leurs salaires trop faibles et réclament des conventions collectives, ou un dialogue social plus apaisé.

« Les conditions sont mauvaises partout, elles sont horribles en Pologne », explique Alfred Bujara, un syndicaliste affilié à l’emblématique Solidarnosc à l’AFP. Ce travailleur polonais évoque des gestes définis à la « seconde » et des employés « virés » quand ils ne tiennent plus les rythmes imposés.

« Ce partage d’informations sur les différentes normes, les cadences imposées dans les autres pays, va nous permettre de mieux négocier en Pologne », se réjouit-il, interrogé par l’agence française.

Sortir des radars de leur employeur

C’est la première fois qu’autant d’employés Amazon se réunissent formellement. Même s’ils échangent habituellement de manière informelle via des groupes de conversations privés, a précisé à l’AFP le syndicaliste britannique (UNI) Matthew Painter. Ce sommet international organisé sous la bannière « Organize Amazon » permet de sortir des radars de leur employeur.

Dans un communiqué envoyé à l’AFP, la direction allemande du groupe a déclaré « être un employeur juste et responsable, même sans convention collective ». Une défense légère face à la somme des critiques de plus en plus virulentes contre le géant du retail.

« We are humans, not robots! »

Depuis 2013, les syndicats européens d’Amazon, qui ont peiné à se faire reconnaître par la direction, se mobilisent régulièrement, de préférence à l’occasion des journées cruciales en terme de ventes comme les Prime Days ou le Black Friday. En 2018, la colère s’est renforcée : une cinquantaine de grèves ont été organisées par différents syndicats en Europe.

« Quand il y a un mouvement coordonné entre nous, une grève simultanée en France, en Italie et en Espagne, Amazon réagit. Quand il y a confrontation, Amazon accepte d’entamer des négociations », assure Stefanie Nutzenberger, du syndicat allemand Verdi, à l’agence française.

En novembre, à travers une campagne sur les réseaux sociaux, les employés d’Amazon se sont trouvés un cri de ralliement : #Wearenotrobots. Ce qui a donné lieu à plusieurs rassemblements à travers la planète, notamment en Angleterre.

Une internationalisation encore balbutiante

Cependant, au-delà de l’Europe, l’internationalisation du mouvement est encore balbutiante. « En Amérique du Sud, nous sommes complètement en terre inconnue. Ils viennent d’ouvrir un centre d’opérations au Brésil, les employés ne sont pas du tout préparés là-bas », explique un représentant syndical venu d’Uruguay, Henry Oliveira, toujours à l’AFP.

Si les revendications sont partagées, la difficulté réside néanmoins dans les différences entre les pays en termes de législation. Mais s’organiser collectivement reste le premier pas pour se faire entendre, les syndicalistes en sont convaincus. « Nous nous préparerons à d’autres conflits et ils dépasseront nos frontières », promet Stefanie Nutzenberger à l’AFP.

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Marion SIMON-RAINAUD