AVORTEMENT - La dernière fois qu’elle a lancé un mot-clé sur les réseaux sociaux, celui-ci a eu une résonance planétaire jusqu’ici inégalée. Parviendra-t-elle a mobiliser de la même manière cette fois-ci ? L’actrice Alyssa Milano, qui avait proposé en octobre 2017 aux internautes de témoigner sous le hashtag “MeToo”, dans la foulée des révélations de l’affaire Weinstein, a appelé ce samedi 11 mai à une grève du sexe, pour défendre le droit à l’avortement.
“Nos droits liés à la procréation sont supprimés. Tant que nous les femmes n’aurons pas un contrôle légal sur notre corps, nous ne pouvons pas risquer de tomber enceintes”, écrit-elle sur Instagram, en postant un photo d’un grand “X” rose. “Rejoignez-moi en boycottant le sexe jusqu’à ce que nous retrouvions notre indépendance physique. J’appelle à une grève du sexe. Faites passer le message”, ajoute-t-elle, utilisant le mot-clé ”#SexStrike” (“grève du sexe”).
Alyssa Milano menace de ne plus tourner en Géorgie
L’origine de l’initiative de l’actrice, révélée dans les séries “Madame est servie” puis “Charmed”, se trouve en Géorgie. Cet État américain, prisé des studios et producteurs hollywoodiens pour ses dispositifs fiscaux favorables, vient de ratifier une loi interdisant l’avortement dès que les battements du cœur du fœtus sont perceptibles. Cela correspond environ à la sixième semaine de grossesse, un stade où bien des femmes ignorent encore qu’elles sont enceintes.
“Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour que le plus grand nombre de productions possibles quitte cet État qui continue à promouvoir une politique oppressive et néfaste, contraire à tout ce que l’industrie du divertissement défend”, avait déclaré l’actrice au site BuzzFeed News il y a quelques jours.
Ironie du sort, elle est contractuellement tenue d’achever en Géorgie le tournage de la série Netflix “Insatiable”, prévu pour encore un mois. Elle a toutefois prévenu qu’elle ne retournerait pas sur le plateau du tournage de cette série après cette période si l’enregistrement est maintenu en Géorgie.
Des dizaines d’acteurs signent une pétition
Plusieurs autres stars d’Hollywood ont fait entendre leur voix et contesté la décision du gouverneur de l’État de Géorgie, Brian Kemp. Alec Baldwin, Don Cheadle, Ben Stiller, Mia Farrow, Amy Schumer et plusieurs dizaines d’acteurs américains, déjà emmenés par Alyssa Milano, avaient menacé fin mars -alors que la perspective d’une restriction du droit à l’avortement était déjà avancée- de boycotter les tournages en Géorgie.
″À l’attention de Brian Kemp et du président de la chambre des représentants de Géorgie, David Ralston : ci-joint, une lettre ouverte signée par 50 acteurs contre le projet de loi HB481. Au nom de tous les signataires -des personnes souvent appelées à travailler en Géorgie ou contractuellement tenues d’y travailler-, nous espérons que vous pourrez revoir votre position sur ce projet de loi”
La Géorgie a adopté en 2008 des mesures fiscales très avantageuses pour les productions qui s’y tournent, pouvant obtenir jusqu’à 30% de crédit d’impôt. Des films Marvel comme “Black Panther” ou “Avengers: Infinity War” y ont été réalisés, ainsi que de nombreuses séries comme “Stranger Things” ou “The Walking Dead”.
Pour l’heure, si quelques producteurs indépendants ont pris position contre la loi géorgienne, les grands studios restent prudents, sinon muets.
Un moyen de pression vieux comme le monde
Comme le rappelle RFI, la grève du sexe est un moyen de pression politique vieux comme le monde. En 411 avant J.-C., le dramaturge Aristophane racontait dans Lysistrata l’histoire d’une Athénienne ayant convaincu les femmes de toutes les cités grecques de se refuser à leurs maris pour mettre fin à la guerre du Péloponnèse.
Cette œuvre de fiction a depuis connu des adaptations modernes bien réelles. En 2003, l’activiste Leymah Gbowee, militant pour la fin de la guerre civile au Libéria, avait incité les Libériennes à faire la grève du sexe. L’opération est un succès, puisque le président Charles Taylor finit par les associer aux négociations de paix avant de quitter le pouvoir. Leymah Gbowee avait reçu en 2011 le prix Nobel de la paix.
En 2011, la sénatrice belge Marleen Temmerman avait appelé les femmes à se refuser à leurs maris jusqu’à la formation d’un nouveau gouvernement, huit mois après des élections législatives qui n’avaient toujours pas permis de voir la formation d’un nouveau gouvernement. Mais son initiative n’avait pas été suivie.
Plus récemment, en 2016, un couple d’Américains avait appelé à une grève du sexe pour faire barrage à Donald Trump et ses positions ouvertement sexistes. Leur opération n’a visiblement pas eu le succès attendu.
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