Ces sites touristiques que les touristes menacent

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Ces sites touristiques que les touristes menacent

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L'accès à la baie Maya, sur l'île de Koh Phi Phi, en Thaïlande, est interdit cet été.
L'accès à la baie Maya, sur l'île de Koh Phi Phi, en Thaïlande, est interdit cet été.
© AFP - Lillian Suwanrumpha

À partir de juin, débarquer dans la baie Maya, sur l'île de Koh Phi Phi, en Thaïlande, sera interdit. Trop de touristes, trop de dégâts. Une décision salutaire, que d'autres sites touristiques ont prise ou sont en voie de prendre dans le monde, au nom de la sécurité, de l'environnement ou du patrimoine.

C’est l’un des effets de bord de la notoriété, un des inconvénients de la beauté. La curiosité et l’envie finissent par user. En Thaïlande, ce ne sont pas des pop-stars que l’on protège cet été. Les autorités sont aux petits soins d’un espace naturel d’exception, menacé par l’activité humaine. Débarqués en masse par hors-bord sur la baie Maya, immortalisée dans le film La Plage avec Leonardo DiCaprio, les quelque 4 000 touristes quotidiens ont fini par en compromettre l’équilibre écologique. Mais à partir de juin et jusqu’à septembre, ils seront accueillis par les rangers du parc national de l'île de Koh Phi Phi : interdiction de débarquer, « pour permettre à l'écosystème de se régénérer », expliquent les autorités.

Et ce n’est pas une première. Que ce soit de façon partielle, temporaire ou définitive, sur les cinq continents, d’autres initiatives ont déjà été prises en ce sens. Tour d’horizon. 

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ACCÈS LIMITÉ

Machu Picchu (Pérou)

En 2014, 1,2 million de touristes ont visité le Machu Picchu.
En 2014, 1,2 million de touristes ont visité le Machu Picchu.
© AFP - Cris Bouroncle

Entre 1987 et 2014, le nombre de visiteurs de l’emblématique site inca péruvien, inscrit au patrimoine mondial de l’humanité depuis 1983, est passé de 200 000 à 1,2 million. Une inflation qui a fait planer la menace de se voir intégrer par l’Unesco à l’inventaire du Patrimoine mondial en péril. Mais les autorités ont réagi. Depuis 1er juillet 2017, le Pérou a encadré l’accès au site. Horaires et temps de visite limités (quatre heures maxi), affluence contrôlée (guides obligatoires), usages encadrés (pas de perches à selfies, pas de nourriture, d’alcool…). Et du 15 au 28 mai (dans un premier temps), les seuls 6 000 touristes autorisés ne peuvent visiter que deux temples et une pyramide. Pour les autorités, il s’agit de préserver un site archéologique d’exception érigé au XVe siècle des pillages et de la pollution humaine.

Taj Mahal (Inde)

Le nombre de visiteurs du Taj Mahal doit être limité à 40 000 par jour.
Le nombre de visiteurs du Taj Mahal doit être limité à 40 000 par jour.
© AFP - Pawan Sharma

Ils sont entre 10 000 et 15 000 à visiter chaque jour, avec des pointes à 70 000 le week-end, le "Monument de l’amour". Autant dire que le Taj Mahal, construit au XVIIe siècle par l’empereur moghol Shah Jahan en mémoire de sa femme préférée, Mumtaz Mahal, est très fréquenté, et notamment par les Indiens. Pour préserver ce fragile édifice de marbre blanc serti de pierres précieuses, depuis janvier 2018, les autorités ont limité à 40 000 le nombre maximum de visiteurs quotidiens. Une restriction qui, pour autant, ne concerne pas les visiteurs étrangers, qui consentent un droit d’entrée 25 fois plus élevé que celui des touristes indiens.

Mont Blanc (France)

20 000 alpinistes s’attaquent chaque année au Mont Blanc.
20 000 alpinistes s’attaquent chaque année au Mont Blanc.
© AFP - Philippe Roy / Aurimages

Nul besoin d’être une autoroute pour accumuler les déchets. Les accès au toit de l’Europe, quoique fréquentés par l’élite de l’alpinisme (à tout le moins des sportifs avisés et bien accompagnés), sont bien maculés par leurs passages, et les accidents restent fréquents. Ce que dénoncent les autorités locales depuis des années. Mais à partir de l’été prochain, c’en sera fini de l’accès ouvert au Mont Blanc. Du moins l’ascension par la Voie Royale, au départ de Saint-Gervais, qui sera limitée à 214 alpinistes par jour. Soit l’équivalent de la capacité d’accueil des trois refuges de l’itinéraire. Pour grimper, un permis – pour l’instant gratuit - sera exigé ; et pour s’assurer que la règle est bien respectée, des contrôles seront effectués. 

ACCÈS INTERDIT

Grotte de Lascaux (France)

Près de 300 000 personnes ont visité la copie intégrale de Lascaux en 2018.
Près de 300 000 personnes ont visité la copie intégrale de Lascaux en 2018.
© AFP - Sabine Glaubitz / DPA /

En 1940, la grotte de Lascaux était découverte par quatre adolescents de Montignac en Dordogne. Une trouvaille archéologique exceptionnelle, classée Monument historique la même année… mais fermée 23 ans après. Objectif : protéger cet ensemble unique d’art pariétal des agressions extérieures pour le préserver. Pour autant, le site n’avait pas vocation à être sanctuarisé. Et une série de "fac-similés" de la grotte originelle seront créés et ouverts au public à partir de 1983. Il faudra néanmoins attendre 2016 pour qu’ouvre la réplique intégrale, Lascaux IV. Une expérience unique, 43 ans après la fermeture au public de ce monument classé au Patrimoine mondial de l’humanité.

Atoll d'Aldabra (Seychelles)

L'atoll d'Aldabra est la principale terre d’accueil pour les tortues géantes des Seychelles.
L'atoll d'Aldabra est la principale terre d’accueil pour les tortues géantes des Seychelles.
© AFP - Roberto Rinaldi / AGF / Photononstop

Il a tout pour attirer les amateurs d’eau clair et de places de sable fin. Pourtant, Aldabra, aux Seychelles, reste très éloigné de l’activité humaine. Du moins depuis 1982, date à laquelle l'atoll a été inscrit sur la liste du Patrimoine mondial de l'Unesco. Cette réserve naturelle stricte, le principal lieu de nidification pour la tortue verte dans l'océan Indien, la principale terre d’accueil pour les tortues géantes des Seychelles, la plus grande colonie de phaétons à brins rouges... Si l’atoll a jusqu’ici été préservé, c’est qu’il n’était pas riche en eau douce. Mais désormais, rares sont ceux qui peuvent débarquer sur l’île, qui ne compte que douze habitants : principalement des pêcheurs, du personnel de la réserve naturelle et des scientifiques.

Canyon de Fjadrargljufur (Islande)

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Rien n’exposait ce recoin très nordique au tourisme de masse. Jusqu’à-ce que de Justin Bieber y trouve le décor d’un de ses clips, fin 2015. Depuis, c’est l’affluence dans le canyon de Fjadrargljufur, une gorge de 2 kilomètres de long, créée par 9 000 ans de fonte des glaciers. "La fréquentation du lieu a augmenté de 50 à 80 % par an depuis 2016", estiment les autorités. Et en 2018, 300 000 personnes auraient foulé et abîmé la végétation de ce passage. Trop, c’est trop. Depuis le mois de mars et jusqu’en juin, le lieu est tout simplement interdit d’accès. Le temps, pour le tapis herbeux, de se reconstituer. 

ILS SONT MENACÉS DE FERMETURE

Mont Uluru (Australie)

Le Mont Uluru, en Australie, attire 400 000 touristes chaque année.
Le Mont Uluru, en Australie, attire 400 000 touristes chaque année.
© AFP - Reinhard Kaufhold / DPA

La préservation de l’environnement ou du patrimoine historique ne sont pas les seuls motifs de limitation d’accès à des sites rares. Uluru, Ayers Rock en anglais, au beau milieu de l’Australie, est un rocher exceptionnel. Il s’élève à 348 mètres au-dessus du parc national d'Uluru-Kata Tjuta, qui protège des espèces fragiles. Une attraction touristique, aussi, qui attire 400 000 touristes chaque année. Une affluence qui perturbe l’écosystème d’un site classé au Patrimoine mondial de l'Unesco, mais qui irrite surtout les aborigènes locaux, pour qui le mont Uluru est sacré, et son ascension proscrite. Promise par les autorités australiennes en 1983, l’interdiction totale de l'ascension pourrait intervenir le 26 octobre 2019. 

Petra (Jordanie)

Le site nabatéen de Petra, en Jordanie, accueille 3 000 visiteurs chaque jour.
Le site nabatéen de Petra, en Jordanie, accueille 3 000 visiteurs chaque jour.
© AFP - Manuel Cohen

Avec Qusair Amra et Um er-Rasas, Petra est l’un des trois sites jordaniens inscrits au Patrimoine mondial de l'Unesco. La cité nabatéenne, créée vers la fin du XVIIIe siècle avant J.-C., redécouverte en 1812, héberge de nombreux bâtiments directement taillés dans la roche. Des édifices exceptionnels, menacés par l’érosion depuis toujours (faute de végétation) et par le tourisme depuis peu. Si sa fréquentation est limitée à 2 000 personnes par jours, Petra en accueille plus de 3 000, dans un pays qui ne saurait se priver de la manne touristique. Le gouvernement jordanien cherche néanmoins des solutions pour encadrer les flux touristiques et sensibiliser les populations locales à la préservation du site. Au risque de le voir retourner à la poussière. 

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