“Il s’agit du plus grand vol du siècle, les chiffres sont effrayants.” Pour présenter les résultats de Grand Theft Europe, l’enquête transnationale à laquelle il a participé, le quotidien italien Il Sole-24 Ore n’hésite pas à utiliser les grands mots. Et en effet, les chiffres dévoilés par le journal économique font peur.

“Chaque année, ce sont 50 milliards d’euros qui sont soustraits aux contribuables européens”, explique le quotidien, qui explique le mécanisme de la “fraude carrousel”.

“Les lois européennes prévoient que les achats et les ventes entre les sociétés de deux pays communautaires ne soient pas assujettis à la TVA, contrairement aux opérations qui concernent deux sociétés d’un même pays”, détaille Il Sole-24 Ore, qui fournit ensuite un exemple concret de la façon dont s’organise la fraude :

– Une société allemande (A) vend un bien à une société italienne (B). Étant donné qu’il s’agit d’une opération commerciale entre deux pays européens, la société italienne ne paye pas la TVA.

– Cette société italienne (B) revend ensuite le produit à une autre société italienne (C). Lors de cette transaction, la TVA devrait s’appliquer. Mais la société B est une société écran, elle va disparaître avant d’avoir encaissé la TVA, qui n’est donc pas réellement payée par la société C.

– La société C demande à l’État le remboursement de la TVA qu’elle aurait payée à B. Elle récupère ainsi une somme qu’elle n’a jamais réellement payé.

– Pour finir, une fois la TVA récupérée en Italie, la société C revend le produit à la société A en Allemagne (sans payer de TVA). Une boucle fictive “qui peut se multiplier à l’infini”, précise Il Sole-24 Ore. “En réalité, le bien ne bouge jamais, tout se fait grâce à des fausses factures qui donnent l’impression que le bien a tourné comme dans un manège, d’où le nom de ‘fraude carrousel’.”

292 euros par an soustraits à chaque citoyen

“Bien que ce type de fraude soit connu par les autorités fiscales depuis l’introduction de la TVA communautaire en 1993, presque aucune mesure au niveau global n’a été prise, à cause de l’incapacité des États membres à s’accorder unanimement sur les questions fiscales”, pointe Il Sole-24 Ore, qui considère que “cet argent est utilisé pour financer le crime organisé, ainsi que des filières terroristes”.

Selon les calculs de l’enquête Grand Theft Europe, “292 euros sont soustraits à chaque citoyen européen” chaque année à cause de ces pratiques.