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Malte, havre européen pour les LGBT

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Pour la quatrième année consécutive, le classement de l’Ilga-Europe, dévoilé ce lundi, place l’archipel méditerranéen en tête des pays européens œuvrant à la protection des personnes LGBT. Eléments d’explication.
par Florian Bardou
publié le 13 mai 2019 à 18h43

Il faut imaginer un archipel au beau milieu de la Méditerranée où l'avortement est toujours interdit mais où les personnes transgenres peuvent changer la mention du genre sur leurs papiers d'identité sans condition ; un tout petit pays où le divorce n'a été légalisé qu'en 2011 mais où les gays et lesbiennes peuvent se marier, adopter ou avoir recours à la PMA depuis peu ; ou encore, un morceau de terre aride d'à peine 20 kilomètres de long, où les églises sont presque aussi nombreuses que les figuiers de barbarie au km2, mais où les «thérapies» de conversion – ces pseudo-traitements censés guérir les homos – ont été interdites dès 2016, une mesure inédite dans l'Union européenne. A plus de 95% catholique, Malte a vraiment de quoi surprendre quand on s'intéresse aux très nombreuses mesures prises pour protéger les gays, les lesbiennes, les bisexuels, les trans et les personnes intersexes ces dernières années.

Encouragée par l'arrivée de la gauche au pouvoir en 2013, cette boulimie législative vaut d'ailleurs à cette ancienne colonie britannique, 460 000 habitants environ, d'être considérée pour la quatrième année d'affilée comme le champion continental en matière de droits LGBT, loin devant la France, l'Espagne et le Royaume-Uni. Dispositions contre les discriminations en raison de l'orientation sexuelle ou de l'identité de genre à l'école ou au travail, pénalisation des discours de haine, droits conjugaux et parentaux pour les homos, interdiction des mutilations sur les enfants intersexes, etc. : si l'on en croit le classement annuel de l'Ilga-Europe, une fédération qui regroupe 600 ONG, dévoilé ce lundi, l'archipel méditerranéen remplit même la quasi-totalité des critères pour être un havre d'égalité pour les LGBT contrairement à l'Italie voisine, la Pologne ou la Macédoine du Nord, candidate à l'adhésion dans l'UE.

«Cela ne veut pas dire que la législation maltaise est parfaite, précise à Libération Niamh Cullen, de l'Ilga-Europe. Malte a encore à faire pour les droits LGBT et humains en général, par exemple en matière d'asile, de droits reproductifs ou de liberté d'expression dans les médias.» Pour parfaire ce tableau, la branche européenne de l'Association internationale lesbienne et gay recommande d'ailleurs l'adoption de mesures contre les discriminations dans l'accès aux biens et services ou la mise en place de «mesures concrètes» pour faciliter l'asile des réfugiés en raison de leur genre ou de leur orientation sexuelle. A une politique migratoire de plus en plus dure face à l'afflux de migrants sur le territoire maltais s'ajoute en effet, ces dernières années, un discours public xénophobe de plus en plus virulent selon les travaux de chercheurs maltais. Comme si la haine des étrangers avait pris le pas sur celle des homos.

A Malte, l'homophobie et les préjugés sont pourtant loin d'avoir disparu quoi qu'en disent les campagnes publicitaires incitant au tourisme gay dans l'archipel. A titre d'exemple, l'an passé, l'élargissement des techniques de procréation médicalement assistées aux lesbiennes et femmes seules, soutenue par le gouvernement, s'est heurté à l'opposition bruyante de l'Eglise catholique locale – dans les choux depuis la victoire du «oui» au référendum sur le divorce en 2011 – et d'une partie de la droite nationaliste au nom de l'«intérêt supérieur de l'enfant» et des «valeurs familiales». Un discours, comme le raconte Malta Today, qui a encore ses prises dans la société malgré les récentes avancées.

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