Récit

Même les colos sont trop chères pour les enfants des familles modestes

L'association La Jeunesse au plein air a dévoilé les résultats d'une enquête Ifop sur les colonies de vacances. Coût du séjour et manque d'information sont les premières raisons d'une baisse majeure des fréquentations.
par Charles Delouche-Bertolasi
publié le 16 mai 2019 à 18h30

Les colonies de vacances ne sont plus une pratique de masse. C’est ce que montrent les résultats d’une enquête Ifop révélée ce jeudi par l’association La Jeunesse au plein air, qui a pour mission de faciliter l’accès des enfants aux vacances et aux loisirs. L’étude, réalisée sur un échantillon de 400 enfants âgés de 7 à 12 ans et sur 1 003 parents, montre que seul un quart des personnes de cette tranche d’âge sont déjà allés en colonie de vacances. En 2018-2019, plus d’1,4 million d’enfants sont partis en séjour collectif. Et les joies de la colo sont surtout connues des enfants issus des catégories socioprofessionnelles supérieures (32% contre seulement 20% pour les milieux populaires).

Le prix reste le principal frein pour les familles modestes. Pour Anne Carayon, directrice générale de la confédération La Jeunesse en plein air, créée en 1938, «je ne voudrais pas qu'on laisse entendre que les colos sont trop chères. Il y a la question des transports qui augmentent pour tout le monde, l'entretien et la rénovation des structures, l'alimentation, les activités et l'encadrement. Derrière le coût se cache une qualité. Il faut au travers des aides, réussir à baisser le prix affiché pour les parents». Tout cela a un coût : en moyenne, un séjour d'une semaine en colonie revient à environ 550 euros.

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Les colos toujours plébiscitées

En France, les colonies de vacances s’intègrent dans le système éducatif dès la fin de la Première Guerre mondiale. Dans le prolongement des patronages paroissiaux ou laïcs, elles connaissent leur âge d’or à la fin des années 60 où environ 4 millions d’enfants les fréquentent. Un succès populaire, porté notamment par les comités des grandes entreprises telles que Renault, la SNCF, EDF, La Poste… et aussi les municipalités – notamment de gauche – qui avaient fait des colos un instrument d’accès aux vacances des enfants issus des familles pauvres.

Aujourd'hui, l'expérience de la colo est toujours plébiscitée par ceux qui la vivent : 93% des jeunes participants la jugent positive et 53% souhaitent repartir. Pour Jacques Durand, président de l'association, «pouvoir partir en vacances est une demande forte, qui s'est notamment exprimée lors de la crise sociale que traverse notre pays. Une demande qui a été reprise lors du "grand débat national" et par les gilets jaunes, les samedis et sur les ronds-points». Pour remédier au frein financier du départ, l'association propose la création d'un «compte épargne colos» pour les familles de classes moyennes qui ne bénéficient pas des aides mais peuvent épargner, ainsi que la mise en place d'un fonds national de solidarité pour les enfants des familles modestes.

«Beaucoup d'emplois»

«Il devient urgent de rendre leur rôle d'inclusion sociale à ces lieux d'éducation hors les murs et d'en faire bénéficier le plus grand nombre», défend Jacques Durand, qui rappelle l'enjeu d'inclusion sociale mais aussi de développement économique liés à ces séjours : «Nous avons beaucoup d'emplois dans le secteur associatif et nous avons, sur un territoire, une vie économique liée à la présence des colonies, avec un tissu local forgé au fil des années. Je discutais il y a peu avec un maire d'une commune du Sud-Est de moins de 10 000 habitants. Après la disparition de la gendarmerie en raison du regroupement, il craint maintenant que le centre ne disparaisse et que sa commune ne s'effondre.»

Afin de donner une meilleure visibilité aux colonies et aux innovations mises en œuvre tels que les séjours spécifiques ou les mini-camps, l’association entend déclencher le «réflexe colo» en multipliant les présentations au sein des écoles. En partenariat avec le ministère de l’Education nationale et de la Jeunesse, l’association a lancé le concours «Ta classe en colo» qui permet aux élèves des huit classes lauréates de partir gratuitement pour une semaine de vacances dans l’organisme de leur choix. Au début du mois de mai, Gabriel Attal, secrétaire d’Etat à la jeunesse, a lancé une campagne de communication baptisée «A nous les colos». Le Premier ministre a également confié une mission sur le tourisme à la députée Pascale Fontenel-Personne et un plan sera annoncé après l’été.

En France, chaque année, environ 3 millions d’enfants ne partent pas en vacances.

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