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6 scènes de films qui rejouent des toiles célèbres

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Publié le , mis à jour le
Martin Scorsese, Lars von Trier, Quentin Tarantino… Nombreux sont les cinéastes contemporains inspirés par des tableaux de maître, au point de les animer sur grand écran. À l’occasion du festival de Cannes qui s’ouvre aujourd’hui, redécouvrez les chefs-d’œuvre du cinéma au prisme de l’histoire de l’art, avec notre sélection de ces scènes éprises de peinture.

1. L’Ophélie aux muguets de Lars von Trier

Caspar David Friedrich, Edward Hopper, René Magritte… Le cinéaste danois Lars von Trier étoffe sa galerie de références artistiques au fil de ses réalisations. Mais l’hommage de quelques secondes rendu au peintre préraphaélite John Everett Millais dans son film Melancholia (2011) est résolument le plus abouti. Sur le son tragique de Richard Wagner (le film se déroule juste avant la fin du monde), une mariée interprétée par Kirsten Dunst se laisse porter par un lit de rivière, comme dans le célèbre tableau Ophelia (1851–1852), tiré de la pièce de théâtre Hamlet. Mise en scène formelle, certes, mais pas que : le bouquet de fleurs tenu par le personnage féminin est une gerbe de muguets, sans doute un subtil clin d’œil à la « rose du mois de mai », expression shakespearienne employée par Laërte pour désigner sa sœur Ophélie.

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Melancholia, 2011

de Lars von Trier

Film danois, français, suédois et allemand, 2 h 10

“Ophelia” de John Everett Millais (1851–1852), et Kirsten Dunst dans “Melancholia” de Lars von Trier, 2011
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“Ophelia” de John Everett Millais (1851–1852), et Kirsten Dunst dans “Melancholia” de Lars von Trier, 2011

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© Bridgeman Images - © Photo Christian Geisnæs

2. Quand Paul Thomas Anderson réinvente La Cène en pizza-party

Une table recouverte de pizzas, une bande de hippies en tuniques et colliers de fleurs : voilà la recette pour une version seventies de La Cène (1495–1498) peinte par Léonard de Vinci. Filmée par l’ambitieux réalisateur Paul Thomas Anderson dans Inherent Vice (2014), le spectateur doit garder l’œil ouvert et n’être sous aucun stupéfiant (contrairement aux personnages de ce long métrage loufoque) pour la repérer. Judas (sous les traits d’Owen Wilson) s’accaparant une part de pizza pourrait même résumer la morale principale de ce long métrage, adapté de Thomas Pynchon : le « vice inhérent » est en réalité la cupidité de la société capitaliste américaine.

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Inherent Vice, 2014

de Paul Thomas Anderson

Film américain, 2 h 29

“La Cène” de Léonard de Vinci, 1495-1497, et une scène d’ “Inherent Vice”, de Paul Thomas Anderson, 2014
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“La Cène” de Léonard de Vinci, 1495-1497, et une scène d’ “Inherent Vice”, de Paul Thomas Anderson, 2014

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© Bridgeman Images - © The Kobal Collection / Aurimages

3. Du Bacon chez le Joker de Christopher Nolan

Impossible d’oublier l’extraordinaire prestation de Heath Ledger dans le rôle du Joker pour le volet de la saga Batman, The Dark Knight (2008). Imprévisible et sanguinaire, frénétique et enragé, le personnage doit aussi sa démence à son apparence soigneusement pensée par le réalisateur Christopher Nolan, qui s’inspire alors de son artiste préféré : Francis Bacon. En feuilletant un livre d’art sur le peintre expressionniste anglais, Christopher Nolan a retenu les portraits aux couleurs dégoulinantes qui se mélangent à même la toile, et a décidé de traduire ces visions à travers un maquillage transpirant et chaotique. Terrifiant !

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The Dark Knight, 2008

de Christopher Nolan

Film britannico-américain, 2 h 27

“Tête VI” de Francis Bacon, 1949 et Heath Ledger dans le rôle du Joker pour “The Dark Knight”, 2008
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“Tête VI” de Francis Bacon, 1949 et Heath Ledger dans le rôle du Joker pour “The Dark Knight”, 2008

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© AKG images - © The Kobal Collection/Aurimages

4. Django dans le costume de L’Enfant bleu

Veste et pantalon de satin bleu, bas blancs, effusion de dentelles… Voilà un Django à la tenue bien rétro ! En effet, suivant les conseils de la costumière Sharen Davis, le réalisateur Quentin Tarantino aurait décidé des goûts excentriques de son personnage principal – esclave libéré à la fin du XIXe siècle – en hommage à L’Enfant bleu de Thomas Gainsborough, célèbre peinture de 1779. L’œuvre avait déjà inspiré le réalisateur allemand Friedrich Wilhelm Murnau pour son premier film du même nom (The Boy in Blue – 1919), admiré par Quentin Tarantino.

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Django Unchained, 2012

de Quentin Tarantino

Film américain, 2 h 44

« Garçon bleu » de Thomas Gainsborough, 1779, et Jamie Foxx dans « Django unchained » de Quentin Tarantino, 2012
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« Garçon bleu » de Thomas Gainsborough, 1779, et Jamie Foxx dans « Django unchained » de Quentin Tarantino, 2012

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© Bridgeman Images – © The Kobal Collection/Aurimages

5. Le monstre de Goya revisité par Guillermo del Toro

Il n’a ni tête, ni bras droit : son père Saturne les a déjà dévorés à l’aide de sa mâchoire béante. Pour le réalisateur mexicain Guillermo del Toro, l’œuvre Saturne dévorant un de ses fils (1821–1823) peinte par Francisco de Goya est une source d’inspiration inépuisable qui fit naître « l’homme pâle » dans Le Labyrinthe de Pan (2006), cette effrayante créature amaigrie aux yeux positionnés sur la paume des mains, qui croque la tête des fées volant autour de lui. Le parallèle est à la fois artistique et historique : en 1823, au temps de Francisco de Goya, l’Espagne « ingurgite » ses propres enfants lors de la guerre civile ; en 1944, dans le film de Guillermo del Toro, une jeune fille tente de fuir la tyrannie d’un capitaine de l’armée franquiste…

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Le Labyrinthe de Pan, 2006

de Guillermo del Toro

Film hispano-mexicain, 1 h 59

“Saturne dévorant un de ses fils” de Goya, 1821-1823, et le monstre du “Labyrinthe de Pan” de Guillermo del Toro, 2006
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“Saturne dévorant un de ses fils” de Goya, 1821-1823, et le monstre du “Labyrinthe de Pan” de Guillermo del Toro, 2006

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© Bridgeman Images - © The Kobal Collection/Aurimages

6. Le Baiser fait encore des étincelles dans Shutter Island

D’Arnold Böcklin à Gustave Moreau, c’est l’ensemble du mouvement symboliste qui guide l’esthétique du sombre Shutter Island (2010) de Martin Scorsese. Mais, à la sortie du film, le public retient en priorité l’allusion à la célèbre peinture de Gustav Klimt, Le Baiser (1908–1909), incarné avec poésie par l’étreinte du personnage principal avec sa femme. Décédée dans un incendie criminel, cette dernière se consume peu à peu jusqu’à partir en fumée dans les bras de son bien-aimé, pendant qu’une pluie de cendres s’abat dans un intérieur japonisant. La mélancolie du héros s’épanouit alors dans cet univers symboliste hermétique à la société moderne, qui se complaît dans une esthétique précieuse nimbée de mystère.

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Shutter Island, 2010

de Martin Scorsese

Film américain, 2 h 17

“Le Baiser” de Gustave Klimt, 1908-1909, et Leonardo di Caprio enlaçant Michelle Williams dans “Shutter Island” de Martin Scorsese
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“Le Baiser” de Gustave Klimt, 1908-1909, et Leonardo di Caprio enlaçant Michelle Williams dans “Shutter Island” de Martin Scorsese, 2010

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© Osterreichische Galerie Belvedere, Viena (Austria) / Bridgeman Images - © Paramount Pictures

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