Les attaques contre les musulmans attisent les tensions et les peurs parmi les Sri-Lankais en deuil

Des musulmans prient au Sri Lanka. Photo : IHH Humanitarian Relief Foundation. CC BY-NC-ND 2.0

Le 12 mai, des violences anti-musulmans auraient été allumées par un billet Facebook d'un commerçant musulman de la ville côtière de Chilaw à 80 km de Colombo, la capitale du Sri Lanka. En quelques heures, la populace s'est mise à attaquer de nombreux immeubles et maisons appartenant à des musulmans dans d'autres villes de la province du Nord-ouest. Le lendemain 13 mai, quelque 500 maisons, boutiques, mosquées et autres centres religieux étaient endommagés, une personne a été tuée, et dix autres gravement blessées. Les autorités ont imposé un couvre-feu dans tout le pays jusqu'au matin du 14 mai, alors que s'étendait la peur des attaques.

Les autorités ont également coupé temporairement un certain nombre de réseaux de médias sociaux et d'applications de messagerie, dont Facebook et WhatsApp, en vue de contrôler la situation.

L'ampleur des violences anti-musulmans au Sri Lanka ces derniers jours est juste incroyable. De même que les précédents épisodes dans le pays, rien de ceci n'est une émeute simplement “spontanée”.

Ceci se produit dans le sillage des attentats à la bombe du 21 avril 2019 contre des églises et des hôtels pendant les fêtes de Pâques, qui ont tué 258 personnes et secoué le pays. Alors qu’émergeaient les détails des événements de Pâques, des groupes islamistes radicaux locaux étaient identifiés comme les perpétrateurs des attentats, et beaucoup des auteurs sont morts dans les attentats-suicide. Beaucoup craignaient que la communauté musulmane sri-lankaise soit ciblée comme bouc émissaire pour les attentats sur fond d'un siècle de violences entre la majorité cinghalaise et les minorités tamoule, musulmane et chrétienne.

Les heurts auraient été déclenchés par un billet Facebook

Tisaranee Gunasekara relate le déclenchement récent des violences dans un billet de blog pour Groundviews :

The outburst of anti-Muslim violence began on 12th Sunday in Chilaw (the inciting incident seemingly was a Facebook post by a Muslim trader with deficient English and a cavalier attitude towards punctuation; it was translated into Sinhala by a Sinhalese whose knowledge of English was even poorer). Within hours, the violence spread to other parts of the North Western Province and to Gampaha district. Undeterred by the curfew or the presence of the security forces, the mobs attacked and burnt, as they did in Digana in 2018, Aluthgama in 2014 and nationally during Black July.

As of now, the worse of the violence seems over. Even so, this is only a reprieve. If the perpetrators of this week’s riots are not brought before the law, fast, a new outburst is bound to follow.

La flambée de violence anti-musulmans a commencé dimanche le 12 à Chilaw (l'incident déclencheur étant apparemment le billet Facebook d'un commerçant musulman à l'anglais déficient et à la ponctuation cavalière ; traduit en cinghalais par un Cinghalais aux connaissances en anglais encore plus médiocres). En quelques heures, la violence s'est propagée dans d'autres parties de la province du Nord-ouest et au district de Gampaha. Ne se laissant pas dissuader par le couvre-feu ni par la présence des forces de l'ordre, la populace a attaqué et incendié, comme elle l'avait fait à Digana en 2018, à Aluthgama en 2014, et dans tout le pays pendant le Juillet Noir.

Pour le moment, le pire de la violence semble passé. Néanmoins, ce n'est qu'un répit. Si les auteurs des émeutes de cette semaine ne sont pas rappelés à la loi, et vite, une nouvelle flambée ne pourra que suivre.

Le billet Facebook citait le commerçant musulman disant “Fini de rire, un jour vous pleurerez”, ce qui aurait fait croire aux gens qu'il s'agissait de l'avertissement d'un attentat imminent.

Images et vidéos des destructions causées par la contre-attaque des émeutiers ont été postées sur les réseaux sociaux :

Petit aperçu de ce que les musulmans du Sri Lanka découvrent en ce moment même. Plusieurs maisons, mosquées et commerces détruits.

Une populace bouddhiste extrémiste a attaqué un supermarché à propriétaire musulman hier soir au Sri Lanka

Il faut une vie de dur labeur pour construire et quelques instants pour tout réduire en cendres.

La plus grande fabrique de pâtes alimentaires du Sri Lanka incendiée par des émeutiers. L'usine était opérationnelle depuis quelques mois seulement. Plus de 70 % du personnel est cinghalais. Les témoins disent qu'une bande d'au moins 500 émeutiers a détruit l'usine.

Appels à la solidarité

Il existe des indices de l'implication de groupes bouddhistes extrémistes dans ces attaques anti-musulmans. La police a arrêté 78 suspects dans les violences et les troubles, notamment à Kurunegala, Kuliyapitiya, Nikaweratiya et Chilaw. Selon les autorités, la situation est maintenant sous contrôle.

La police examine les images des caméras de surveillance pour identifier plus de suspects dans les situations de tension des derniers jours. Déjà 78 arrestations et libérations sous caution – Porte-parole de la police

Chez Groundviews, Gitendra E Chitty appelle les Sri-Lankais à la paix et à la solidarité en ces temps difficiles :

Sri Lanka must bring its communities together, no matter what race or creed. Because these attacks were not against Christians or tourists. These mobs were not against Muslims. They were against each and every one of us, and their damage to our mindsets and our morals and our sense of belonging is real – for Sinhalese, and Tamil, and Muslim, and Burgher, and every other ethnic and religious group.

Le Sri Lanka doit rapprocher ses communautés, quelle que soient la race ou la croyance. Parce que ces attentats n'étaient pas contre les chrétiens ou les touristes. Ces émeutiers n'étaient pas contre les musulmans. Ils étaient contre tous et chacun de nous, et leurs ravages sur nos états d'esprits, notre moral et notre sens de l'appartenance sont réels, pour les Cinghalais, les Tamils, les Musulmans, les Burghers, et tous les autres groupes ethniques et religieux sans exception.

La journaliste Chathuri Dissanayake a twitté :

Les flammes de la haine ne sont d'aucune religion, elles détruisent tout sur leur passage. Minuwangoda, Sri Lanka, 14 mai 2019

Le spécialiste de technologies de l'information Afzal écrit :

Notre drapeau national et notre hymne national nous rassemblent sous un seul nom Sri Lanka, pendant que nos communautés s'entre-déchirent en oubliant qu'elles détruisent chacun comme un tout. Réveillez-vous et voyez ce que c'est que d’être un !

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