C'était une nuit de fête pour Laurence (son prénom a été changé), Irlandaise de 35 ans, venue passer des vacances avec sa sœur, Lise, dans l'appartement familial de Menton.
Les deux femmes avaient trop bu. Lise a préféré rentrer se coucher. Laurence, sous antidépresseur, est ressortie pour un dernier verre. Elle a rencontré dans un bar mentonnais Pedro Goncalves et Rafael Rodrigues. Des garçons de 28 ans, sans le moindre antécédent judiciaire, maçons professionnels, amis d'enfance qui avaient décidé, ce soir-là, de laisser leur compagne à la maison pour sortir en célibataire.
Les garçons et la jeune femme font connaissance et décident de poursuivre la soirée au Casino, où Pedro Goncalves a ses habitudes.
Laurence continue de boire. Trop.
Sur les vidéos, on la voit sortir d'un pas mal assuré en compagnie de Pedro Goncalves. Ensuite, sa mémoire s'est arrêtée. Elle avait 2,43 g d’alcool dans le sang au moment de son hospitalisation.
Découverte hagarde et ensanglantée près du commissariat de Menton vers 5 heures du matin, elle doit être opérée d'urgence. Le médecin a aussitôt alerté le commissariat.
Il n’avait aucun doute : la patiente avait été violée avec une sauvagerie rarement vue.
Ils se rejettent mutuellement la responsabilité
Les enquêteurs du commissariat de Menton ont rapidement remonté le fil de cette histoire sordide.
Ils ont réuni des preuves sur deux suspects qui ont embarqué Laurence dans leur 4 x 4 pour la violer sur la banquette arrière dans la zone industrielle du Careï.
Trois jours plus tard, ils appréhendaient Pedro Goncalves et Rafael Rodrigues.
Les deux accusés comparaissent cette semaine devant la cour d'assises des Alpes-Maritimes, à Nice. Ils se rejettent mutuellement la responsabilité du crime.
« Pas de maladie mentale chez ces accusés », observe le Dr Saget, expert psychiatre.
Le président, Didier Guissart, s'étonne de la disproportion entre la gravité de l’agression et ces deux personnalités si lisses, si banales qui écoutent sans broncher dans le box.
« L'alcool, les circonstances, l'effet de groupe », suggère le psychiatre à un magistrat en quête d'explications. Pour éclairer les jurés, Didier Guissart relit l’ordonnance de mise en accusation.
Torture et barbarie
Le juge d’instruction justifie avec limpidité pourquoi il a retenu les actes de torture et de barbarie, circonstances aggravantes qui portent la peine maximale encourue à la perpétuité : « Il s’agit d’un ou plusieurs actes d’une gravité exceptionnelle qui nient la dignité de la personne. Les séquelles sont tant physiques que psychologiques pour la victime qui n’est plus considérée comme une personne mais comme une chose, un défouloir. »
Laurence, dans son élégant ensemble en lin, a les traits d’une survivante malgré le soutien attentif de ses proches et de ses avocats, Mes Laurent Poumarède et Gerd Ziegenfeuter.
Le vide de sa mémoire, au fil de l’enquête policière, s’est comblé peu à peu des pires horreurs.
Elle tente, au côté de l’interprète, d’assister au procès de ses bourreaux mais elle est contrainte, régulièrement, d’aller se reposer à son hôtel. Lise, sa sœur en pleurs, témoigne à la barre : « Elle n’est plus du tout la même personne aujourd’hui... Je pense qu’une partie d’elle est morte. »
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