« Pas de tomate bio en hiver ! » Des agriculteurs s’élèvent contre « l’industrialisation » du bio

Des projets de grande ampleur de légumes bio produits sous serre chauffée » se font jour, alors que les agriculteurs bio n’avaient jusqu’à maintenant pas recours à cette pratique.

Des tomates bio en Bretagne.

Des tomates bio en Bretagne. FRED TANNEAU / AFP

Les agriculteurs bio, appuyés par des ONG et des chefs cuisiniers, dénoncent un risque d’« industrialisation » de l’agriculture bio, notamment pour les fruits et légumes, et ont lancé une pétition publiée mercredi 29 mai sur le site de « Libération ».

« Non à l’industrialisation de la bio ! Pas de tomate bio en hiver », s’exclame la Fédération nationale des agriculteurs biologiques (FNAB), avec la Fondation Nicolas Hulot (FNH), Greenpeace et Réseau action climat.

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L’objet de leur colère, le développement « de projets de grande ampleur de légumes bio produits sous serre chauffée », qui se font jour, en particulier en Bretagne et dans les Pays de la Loire, qui entraînerait la production de fruits et légumes bio hors saison, a expliqué la FNAB à l’AFP.

Les agriculteurs bio n’avaient jusque-là pas recours à cette pratique, ou de manière très marginale, selon la FNAB, qui craint, selon cette pétition, « de retrouver sur les étals de la tomate bio française en plein mois de mars. Une aberration gustative, agronomique et environnementale ! ».

La FNAB entend désormais convaincre le ministre de l’Agriculture Didier Guillaume de « lutter contre l’industrialisation de la bio en limitant le recours au chauffage des serres à la production de plants et au maintien hors gel », d’ici au prochain comité national de l’agriculture bio, prévu le 11 juillet.

« Chauffer des serres au fioul, c’est une totale aberration »

Arnaud Daligault qui préside le Groupement départemental des agriculteurs bio d’Ille-et-Vilaine, estime que c’est un contresens total, comme il le confie à France-Inter :

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« Face à l’urgence climatique, chauffer des serres mal isolées au fioul ou au gaz naturel, c’est-à-dire avec des énergies fossiles, et donc produire des tomates, des concombres et des fraises en hiver c’est une totale aberration.

Pour Jean-Paul Gabillard, secrétaire national de la FNAB, interviewé par France-Info, l’essor du marché du bio « attire des convoitises […] il y a des grosses coopératives, plutôt spécialisées en tomates hors-sol sous serres chauffées, qui veulent faire de la bio. Ce n’est pas, en soi, un problème, sauf qu’il faut en effet qu’elles modifient leurs pratiques, notamment qu’il y ait une culture qui soit en lien avec le sol et sans chauffage, de façon à respecter les cycles naturels tels que définis dans le règlement européen ».

« Une agriculture biologique industrialisée »

Avant le lancement de cette pétition, la FNAB et la Confédération paysanne avaient claqué la porte du comité bio de l’interprofession des fruits et légumes (Interfel) la semaine dernière, protestant contre l’élection comme corapporteur d’un « défenseur affiché d’une agriculture biologique industrialisée ».

Interfel a regretté « qu’une organisation rompe le dialogue interprofessionnel à l’issue d’une élection ».

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« Interfel n’est absolument pas favorable à un système de serres chauffées en agriculture biologique toute l’année. Elle rappelle simplement que le règlement européen autorise le chauffage des serres » en agriculture biologique.

« Pour autant, elle ne s’oppose pas à une évolution possible de ce guide de lecture, dans le respect du cadre communautaire », ajoute-t-elle.

« On est pour des règles qui soient équivalentes dans tous les pays. Il ne faut pas qu’on arrive à une disparition de facto de la production nationale par des contraintes qui feraient qu’effectivement, on ne soit plus compétitifs », a déclaré à l’AFP le président d’Interfel, Laurent Grandin.

« On a les historiques, dans le développement de la bio, qui ont fait un travail remarquable et ont créé les conditions d’un marché », poursuit Laurent Grandin, pour qui il y a de leur part « une crainte que de nouveaux acteurs, qui utiliseraient des moyens différents, viennent peut-être perturber ce marché ».

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