LES PLUS LUS
Publicité
Publicité

Au Venezuela, les pénuries condamnent à mort les enfants atteints de cancer

Caracas
Une patiente dans un hôpital de Caracas, en novembre 2018. © Marco Bello / Reuters
La Rédaction, par AFP

Les pénuries dans les hôpitaux vénézuéliens font de nombreuses victimes, parmi lesquelles des enfants atteints de cancer, privés de chimiothérapie ou de greffe.

Gilberto a placé les jouets de son fils Erick sur son petit cercueil blanc. Il y a aussi déposé le masque qu'il portait en attendant une greffe de moelle osseuse qui n'est jamais arrivée. Ni pour lui, ni pour d'autres enfants, morts récemment du cancer dans un hôpital de Caracas.

Publicité

Erick, 11 ans, a cessé de se battre le 26 mai contre un lymphome non hodgkinien diagnostiqué en février. En mai, Giovanny Figuera, Robert Redondo et Yeiderberth Requena ont également perdu la bataille. 

La suite après cette publicité

"Il avait besoin d'une greffe de moelle osseuse, la maladie progressait tous les jours", explique à l'AFP Gilberto Altuve, 38 ans, le père d'Erick, qui souffrait d'immunodéficience depuis son plus jeune âge. 

La suite après cette publicité

A lire : Venezuela, le pays qui laisse mourir de faim ses enfants

Une rechute de sa maladie l'a conduit à l'Hôpital pour enfants J. M. de los Rios (public) de Caracas en janvier, où le cancer a été détecté. Il a été hospitalisé avec l'espoir de bénéficier d'une greffe en Italie, dans le cadre d'un accord signé en 2010 entre ce pays et la compagnie pétrolière publique PDVSA. 

La suite après cette publicité
La suite après cette publicité

Mais une dette de 10,7 millions d'euros du Venezuela envers le gouvernement italien paralyse le programme depuis 2018. Le président Nicolas Maduro assure que des transferts ont bien été effectués pour que le programme se poursuive, mais que les fonds ont été bloqués par une banque portugaise à la suite des sanctions financières imposées par Washington. 

"On ne peut pas faire comme si on ne savait pas qu'il y avait une possibilité d'obtenir de l'aide"

L'opposition soutient que l'initiative connaissait déjà des problèmes depuis 2016 en raison notamment de "blocages bureaucratiques".

Alors que le président socialiste et son rival Juan Guaido se rejettent la responsabilité des décès, le père d'Erick, le visage creusé par la peine, estime qu'il "ne faut pas chercher des coupables là où il n'y en a pas". 

"Mais on ne peut pas faire comme si on ne savait pas qu'il y avait une possibilité d'obtenir de l'aide", confie-t-il pendant la veillée funèbre organisée dans sa maison du quartier pauvre de Petare, dans l'est de la capitale.

A voir : Venezuela, le grand délabrement

A l'hôpital J. M. de los Rios, 26 autres enfants ont besoin d'une greffe et chaque nouveau décès angoisse encore davantage leur famille. 

Siolis Alvarez ne peut s'empêcher de penser que la prochaine victime sera Alejandro, son fils de neuf ans, atteint d'une leucémie lymphocytaire aiguë. "La même chose peut nous arriver à tous. Vous vivez avec la peur au ventre", raconte la mère de famille de 39 ans. 

En 2018, la famille, en quête de soins de meilleure qualité, avait quitté l'Etat de Falcon (ouest) pour s'installer à Caracas. Mais ils ont alors découvert que hôpital pour enfants de la capitale souffrait, lui aussi, d'un manque de matériel et de personnel. 

"Voir ce genre de chose vous brise"

Alors que les pénuries de médicaments se font cruellement sentir dans le pays et que la famille n'avait pas les moyen de payer le voyage jusqu'en Colombie, le fils de Siolis Alvarez bénéficie d'un traitement de chimiothérapie fourni par des ONG. 

Ces décès d'enfants dévastent bien évidemment les familles, mais aussi le personnel médical.

"Voir ce genre de chose vous brise", confesse Adriana Ladera, une infirmière de 30 ans. "Il y a des jours où l'on veut fuir et ne jamais revenir", dit-elle en larmes. Et les enfants morts en mai "ne sont pas les derniers", redoute sa collègue, Marta Vasquez.

Après son décès, le corps d'Erick est resté dans le salon de la maison familiale pendant deux jours. Après avoir acheté un terrain dans un cimetière à 27 kilomètres de Petare, le père de l'enfant s'est vu réclamer plus d'argent par la propriétaire de la parcelle, ce qui a retardé d'un jour l'enterrement. 

"Mettez de la glace dessus pour qu'il ne pourrisse pas", a-t-elle dit aux parents en deuil. "Ce sont des choses qui vous brisent", murmure Gilberto, qui a dû faire un appel à des dons pour payer la pierre tombale.

Contenus sponsorisés

Publicité