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Un apéro avec Ginette Kolinka : « Pour me voir avec la larme aux yeux, il faut beaucoup »

Chaque semaine, « L’Epoque » paie son coup. « Passeuse de mémoire », la rescapée de Birkenau se raconte dans les lycées et collèges, et aujourd’hui dans un livre.

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Publié le 31 mai 2019 à 14h18, modifié le 01 juin 2019 à 06h05

Temps de Lecture 34 min.

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Ginette Kolinka  au Yono, rue Vieille-du-Temple, dans le quartier du Marais, à Paris, le 20 mai.

Elle est probablement la personne la plus âgée que cette rubrique ait jamais invitée à prendre un verre. A 94 ans (elle en paraît quinze de moins), Ginette Kolinka n’a pas consommé une vodka, boisson pour laquelle elle avoue un petit penchant, mais un jus de mangue agrémenté d’un peu de grenadine servi par son neveu, qui tient le Yono, un bar de nuit de la rue Vieille-du-Temple, dans le quartier du Marais, à Paris. Elle est née Ginette Cherkasky à deux pas d’ici, le 4 février 1925.

Pas de vodka pour Ginette. Elle travaille. Ce matin, elle était l’invitée de la matinale de France Inter, elle revient de l’enregistrement de « C à vous ». Elle fait « La Grande ­Librairie ». Ginette est en pleine promo de son livre Retour à Birkenau (Grasset, 112 pages, 13 euros) dans lequel elle a ­confié à la journaliste Marion Ruggieri ses souvenirs de ­déportation.

Le résultat est bref, cru et bouleversant. Sur le bandeau de couverture, on peut lire : « Arrêtée par la Gestapo en mars 1944 avec son père, son petit frère et son neveu, Ginette Kolinka est déportée à Birkenau. Elle sera seule à ­revenir. Aujourd’hui elle raconte dans toutes les classes de France pour qu’on n’oublie jamais… » Sur la photo, Ginette sourit de toutes ses dents.

« Je parle toujours les yeux fermés »

Oui, elle sourit. « Tu es tellement jolie quand tu souris », lui a dit sa belle-fille, qui gère son plan média et redoute qu’elle se casse la figure du tabouret de bar où elle s’est juchée. Alors elle s’est exécutée pour le photographe. Mais quand elle parle, Ginette ferme les yeux. « Je parle toujours les yeux fermés, dit-elle. Comme ça, je revois les choses. Si je savais dessiner, je pourrais représenter toutes les scènes qui sont restées dans ma tête. »

Les choses… Drôle de mot pour dire la fuite en zone libre, l’arrestation à Avignon, la prison des Baumettes, à Marseille, Drancy, puis le convoi 71 jusqu’à Birkenau, où sont également déportées Simone Veil et Marceline Loridan-Ivens. Drôle de mot pour dire la promiscuité dans les wagons à bestiaux, les coups à l’arrivée sur la Judenrampe, le dernier regard sur son père, son petit frère et son neveu qu’elle ne ­reverra plus, le corps qui s’amaigrit, la gale, la solidarité ou au contraire l’indifférence entre les déportées.

« Tout ce qu’il pouvait y avoir en moi de sentimental est resté à Birkenau. Ce manque de compassion est une conséquence de la déportation. »

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