C’est un vaste trafic qui vient d’être mis au jour par l’Agence d’investigation environnementale (EIA). Depuis 2016, des industriels européens font illégalement entrer sur le territoire des HFC, des gaz réfrigérants au pouvoir réchauffant 15 000 fois supérieur à celui du CO2 alors que ceux-ci sont progressivement en train d’être éliminés. De quoi saper les efforts de l’Union pour lutter contre le changement climatique.

Sortez-les par la porte, ils reviendront par la fenêtre, ou plus exactement dans les cales des bateaux ou sous les bâches des camions. L’Environmental Investigation Agency (EIA) révèle dans un rapport publié fin avril (1) que l’Union européenne est touchée par un vaste trafic de HFC, des gaz réfrigérants 15 000 fois plus nocifs pour la planète que le CO2, en provenance majoritairement de Chine. Une très mauvaise nouvelle pour la bataille climatique que tente de mener Bruxelles.
Utilisés dans les réfrigérateurs et les climatiseurs, les HFC ont remplacé les chlorofluorocarbures (CFC), interdits par le Protocole de Montréal en 1987 car ils détruisaient la couche d’ozone. Mais cette alternative s’est révélée extrêmement dangereuse pour le climat puisque le pouvoir de réchauffement des HFC est jusqu’à 15 000 fois supérieur à celui du CO2.
Fin 2016, un amendement au protocole de Montréal, signe à son tour la fin progressive des HFC. Il prévoit une diminution de leur usage de 85 % d’ici à 2047, avec un calendrier différencié entre pays. Les pays développés, comprenant la plupart des pays d’Europe dont la France, devront les réduire de 10 % d’ici 2019 et les supprimer progressivement à horizon 2050. La Chine quant à elle a décidé de geler leur production d’ici 2024.
16 % du quota autorisé importé
Face à cette fin programmée des HFC dans l’UE et la mise en place de quotas pour les industriels, les cours s’envolent (+ 800 % en quatre ans) et un marché noir se met rapidement en place. Selon l’enquête de l’EIA, 83 % des entreprises sondées sont ainsi au courant ou suspectent l’existence d’un trafic illégal de HFC. Un constat confirmé par les données épluchées par l’ONG.
Elle a comparé les registres des douanes européennes et chinoises entre 2016 et 2018 au registre HFC, dans lequel les industriels déclarent leurs importations et exportations de ces gaz. Résultat : un écart de 16,3 millions de tonnes équivalent CO2 de HFC pour la seule année 2018. Cela représente 16 % du quota autorisé.
"La disponibilité continue des HFC en dehors du calendrier de réduction des HFC entravera l’adoption de technologies respectueuses du climat, et menacera à terme la réalisation des objectifs climatiques de l’UE, conclut l’enquête. Il est urgent que les pays membres de l’UE et la Commission européenne améliore rapidement la mise en vigueur de la réglementation F-Gas qui promeut les alternatives aux HFC".
Concepcion Alvarez, @conce1 
(1) Voir le rapport ici.

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