Paysan, paysanne, un métier d’avenir ?

  ©Getty - Monty Rakusen
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Parlons d’un métier en voie de disparition ou en plein développement selon que l’on voit le verre à moitié plein ou à moitié vide.

Alors commençons par quelques chiffres simples pour comprendre l’étendue du désastre. Voici trente ans, la France comptait un peu plus d’un million d’agriculteurs, elle en compte aujourd’hui moins de 500.000. Il faut dire qu’embrasser la profession agricole quand on sait que l’on va travailler 360 jours par an pour un salaire horaire ridicule, tout en dépendant des subventions européennes, avec un confrère qui se suicide tous les deux jours, ça ne fait pas forcément rêver la jeunesse sur parcoursup. Résultat : dans les dix ans à venir, un paysan sur deux va quitter le métier et se pose donc la question cruciale de qui va reprendre ces exploitations, le plus souvent transmises de parents à enfants depuis plusieurs générations. 

Sur les docks
53 min

Et ici, la notion d’héritage ne passe pas prioritairement par la case du droit successoral, mais essentiellement par des forces plus difficiles à dominer : celles de l’affectif lié à la possession ancestrale de la terre. Dit autrement : comment accepter qu’un inconnu développe un projet autre que le vôtre sur des terres qui sont le produit de plusieurs vies ?Fort heureusement, une partie de la réponse existe bel et bien dans les statistiques puisque l’on constate un regain d’installations de jeunes, mais surtout que le nombre de porteurs de ces nouveaux projets qui ne sont pas originairement du monde agricole représente désormais plus de 60% des effectifs.

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Qui sont donc ces jeunes qui malgré le manque d’attractivité et de perspectives dans ce métier ont quand même envie d’y venir ?

Si j’en crois un livre et deux films documentaires qui viennent de sortir, j’oserais dire que la femme est l’avenir des sols ! J’ai d’abord été assez convaincu par les dix parcours de dix femmes dont une éleveuse d'alpagas et productrice de laine, une maraîchère, une semencière, une vigneronne, une productrice de plantes médicinales et une fromagère qui sont au cœur du livre « Néo-paysannes » paru aux Éditions Rustica sous la houlette de l’une d’entre-elles : Linda Bedouet.

30% des chefs d’exploitations sont donc des cheffes.

Idem avec « Réparer la terre », le film de Laureline Amanieux, qui raconte comme un thriller, l’histoire d’une assistante metteuse en scène dans le cinéma à Paris qui tourne la page à 32 ans pour devenir agricultrice bio près du Mans. Mais le plus pertinent est « Jeune bergère » où la réalisatrice Delphine Détrie nous raconte sur cinq années, l’histoire de Stéphanie, une autre parisienne, qui réinvente le métier de bergère en mettant l’accent sur la somme de bâtons dans les roues qu’elle doit surmonter. Bien sûr d’abord parce que les anciennes générations essentiellement masculines comprennent mal la féminisation possible du métier, mais aussi parce que l’on n’accepte pas des méthodes d’élevage qui dévient des normes établies. Pourtant, Stéphanie constate qu’avec le départ des enfants d’agriculteurs vers les métiers de la ville, un changement de ton est très perceptible chez leurs parents qui avouent désormais, qu’au fond, mieux vaut laisser la terre à des femmes passionnées et enthousiastes qui la cultiveront avec l’amour nécessaire que de l’abandonner aux spéculateurs.

Marginal le phénomène ? Loin de là, aujourd’hui, déjà 30% des chefs d’exploitations sont donc des cheffes.

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