Les constructeurs automobile américains vont-ils subir une pénurie de cuivre, cobalt ou encore nickel ? Le premier vendeur du pays, Tesla, a alerté le gouvernement américain du manque d'approvisionnement en matière première pour les batteries. Un sujet stratégique pour les Américains qui tentent de diminuer leur dépendance aux minéraux étrangers. 

Début mai à Washington, une conférence, le Benchmark Minerals Intelligence, réunissait des entreprises minières, des autorités de régulation et des législateurs, pour échanger sur le sujet critique des matières premières. À cette occasion, le premier vendeur de véhicules électriques du pays, Tesla, a alerté sur le risque de pénurie imminente pour les batteries, rapporte Reuters.
Ces véhicules consomment deux fois plus de métaux qu’un véhicule thermique. Ainsi pour déployer les 140 millions de véhicules électriques d’ici 2030, il faudra trois millions de tonnes de cuivre, 1,3 million de tonnes de nickel et 263 000 tonnes de cobalt, calcule le géant mondial de la mine BHP Billiton. Le problème est que l’industrie du cuivre par exemple souffre d’un sous-investissement hérité de ces dernières décennies. C’est ce que rapporte Sarah Maryssael, responsable de l’approvisionnement chez Tesla.
Concurrence du numérique
Les mastodontes du secteur sont en action pour ouvrir de nouvelles mines et moderniser les anciennes. Ils mettent en service également de nouvelles usines de raffinage. Mais, cela risque de ne pas suffire en raison de la concurrence venue de l’industrie numérique. Le cabinet d’étude BSRIA évoque en particulier le cas des assistants à domicile de Google et autre Amazon, très gourmands. Ces terminaux consommeraient jusqu’à 1,5 million de tonnes de cuivre en 2030 contre 38 000 tonnes aujourd’hui.
La même pression apparaît sur le cobalt, dont plus de la moitié de la production mondiale provient d’un seul pays : la République démocratique du Congo. Outre la pression sur l’approvisionnement, les accusations de travail forcé et de travail des enfants dans les mines du pays interrogent sur la responsabilité des entreprises consommatrices. C’est pourquoi Tesla travaille à diminuer sa dépendance au cobalt à la faveur du nickel dans ses batteries, rapporte Sarah Maryssael. L’entreprise d’Elon Musk assure être à la recherche de nouvelles sources d’approvisionnement pour ces métaux en Australie et sur le territoire américain.
Un besoin bien entendu par Washington puisqu’à la conférence la sénatrice républicaine Lisa Murkowski a présenté son Mineral Security Act. Son objectif est de sécuriser les approvisionnements des États-Unis en matériaux critiques, en particulier lithium, graphique, cobalt et nickel, a-t-elle expliqué pendant le sommet. Il s’agit de travailler au développement de ressources domestiques, au déploiement de toute la chaîne industrielle, mais également de rechercher des matériaux de substitutions et de développer le recyclage.



L’Europe réagit aussi
"L’importance de la dépendance pétrolière étrangère est largement comprise, mais notre dépendance aux minéraux étrangers est tout aussi grave, sinon plus grave", explique la sénatrice qui rappelle que le pays a importé au minimum 50 % des 48 minéraux critiques, et même 100 % pour 18 d’entre eux. "Nous sommes au cœur d’une course mondiale des batteries qui s’intensifie", alerte-t-elle.
L’Europe, qui est autant, si ce n’est plus, dépendante aux importations étrangères, veut également réagir. Elle vise à développer une filière propre des batteries. La France et l’Allemagne vont investir cinq milliards d’euros pour construire des lignes de production. Une usine pilote comptant 200 emplois va être mise en route au cours des prochains mois dans l’Hexagone. Deux usines de production suivront, en France et en Allemagne.
En parallèle, le continent explore son potentiel minier avec la découverte de grandes ressources de lithium au Portugal ou de Tungstène en France dans l’Ariège. Mais l’ouverture de mines en Europe est compliquée en raison des exigences environnementales. En France, à l’issue du premier conseil de défense écologique le 23 mai dernier, le ministre de la Transition écologique et solidaire François de Rugy a annoncé la présentation d’ici la fin de l’année de la réforme du code minier, qui régit les règles d’exploitation du code minier, un dossier en souffrance depuis 2013.
Ludovic Dupin @LudovicDupin

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