Les intox qui ont permis le Débarquement

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Les intox qui ont permis le Débarquement

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Pour tromper les nazis et faciliter le Débarquement en Normandie, des tanks... gonflables ont été déployés en 1944 dans la région de Douvres, dans le Sud-Est de l'Angleterre.
Pour tromper les nazis et faciliter le Débarquement en Normandie, des tanks... gonflables ont été déployés en 1944 dans la région de Douvres, dans le Sud-Est de l'Angleterre.
© Getty - Galerie Bilderwelt

Fausses nouvelles et autres intox sont vieilles comme la guerre. Mais pour la réussite du Débarquement, elles ont été déterminantes. Grâce très tôt à un comité de désinformation, à des agents doubles de grand talent, une armée fantôme et des dispositifs aussi surprenants que des chars gonflables !

La préparation et la désinformation ont été les clés du succès de l’opération Overlord ("suzerain"), et l'une n'allait pas sans l'autre. Le contre-espionnage a permis de protéger les plans du Débarquement. Il fallait impérativement maintenir le secret sur la plus grande opération de ce genre jamais élaborée, avec l'arrivée de 156 000 soldats alliés, après les succès des débarquements en Afrique du Nord fin 1942, en Sicile et en Italie en 1943. 

Un comité de désinformation dès le début du conflit

"Dès le début de la Seconde Guerre mondiale ont été mises en place des opérations de duperies, d'intoxications, à la demande de Churchill lui-même dès 1941" raconte Yvonnick Denoël, l'auteur du livre Mémoires d'espions en guerre. Le dirigeant britannique lance en avril 41 la London Controlling Section (LCS), une organisation ultra secrète qui ne sera officiellement reconnue qu'en 1969. Cette LCS chapeaute notamment le XX Committee ou 'double cross committee'

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"Cet organe de direction est composé de hauts fonctionnaires, d'officiers des trois armées et des services secrets", raconte Jean-Baptiste Pattier dans D-Day : Histoires mémorables du Débarquement et de la bataille de Normandie. Lié aux services secrets du MI 5, il va permettre de retourner "la grande majorité des espions allemands au printemps 44" et "de transmettre de fausses informations à leurs supérieurs". "Cette tactique du retournement des espions fait partie intégrante du plan Fortitude (force d’âme) destiné à faire croire aux Allemands et aux puissances de l'Axe que le débarquement n'aurait surtout pas lieu en Normandie."  

Le plan Fortitude passe par deux axes. Fortitude North "vend" aux Allemands un débarquement sur les côtes norvégiennes, pour les empêcher d’envoyer des troupes de renfort en France. Des communications radio fictives et des bombardements britanniques accréditent cette piste. Mais Fortitude South marquera davantage l'Histoire. Un impressionnant déploiement de promotion d'un débarquement au Nord de la France. 

Faire croire à un débarquement dans le Pas-de-Calais

Pour réussir l'opération en Normandie, adoptée à l'automne 43, il faut faire croire aux nazis que les alliés allaient débarquer à Calais, là où la distance est la plus courte entre l'Angleterre et l’Hexagone.

Fausses manœuvres militaires, agents doubles, jusqu'aux fameux messages diffusés sur Radio Londres qui sont erronés, la désinformation a tellement bien fonctionné qu'elle a fini par faire douter les Allemands. A tel point que, même après le Débarquement, ils restaient persuadés qu'une autre attaque de plus grande envergure aurait lieu dans le Pas-de-Calais.

Agent double qui oeuvre pour les Britanniques, et considéré comme l'un des maîtres dans son domaine, le Catalan Joan Pujol Garcia a grandement participé à cette duperie. Sous le nom de code "Garbo" pour ses talents d'acteur côté alliés, et "Arabel" pour les puissances de l'Axe il déploie notamment un réseau fictif d'une vingtaine de sous-agents. 

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L'agent en qui Hitler faisait le plus confiance sera décoré de la croix de fer allemande en juillet 1944, sans jamais être démasqué. Il a confirmé le Débarquement en Normandie aux nazis mais en leur vendant comme une ruse qui dissimulerait le véritable déploiement de Calais.

Le maréchal allemand Erwin Rommel, chargé du commandement des forces du Mur de l’Atlantique, en fut lui aussi convaincu. "Le Renard du désert" va concentrer ses troupes sur Calais, laissant la Normandie affaiblie.

Chars gonflables, batteries d’artillerie en caoutchouc, faux terminal pétrolier

Le Fusag, pour First United States Army Group, sera un élément majeur et particulièrement ingénieux de ce dispositif. Situé dans le sud-est de l'Angleterre, ce groupe constitué de onze divisions fantômes - un millier de soldats- est censé être dirigé par Patton, considéré par les Allemands comme l'un des meilleurs généraux alliés.

Pour étayer leur légende, les alliés vont installer des milliers de tentes, d’où ils laisseront s’échapper de la fumée pour faire croire que des soldats y sont nourris. Des tanks sont positionnés alentour. Mais ce sont des véhicules gonflables. Et pour donner l’impression qu’ils se déplacent, des véhicules circuleront pour laisser des traces. Avec des bruits de bottes et de chenilles diffusés par de gros haut-parleurs. S'y ajoutent plus de 200 faux navires, un faux terminal pétrolier ou encore cinquante escadrilles de faux Spitfire et P-51 Mustang.

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Parallèlement, les émissions radio ne tarissent pas. Et pour cause : elles sont conduites par des comédiens de Broadway et de Londres. Rien que dans le mois précédant le débarquement, 18 000 messages radio seront écoutés par les Allemands. Qui ne doutent pas de leur réalité.

La crainte de fuites à quelques semaines du D-Day

Au-delà de conversations imprudentes, plusieurs événements créent la panique. Le premier lorsqu'un courant d’air fait s'envoler par la fenêtre d'un bureau du ministère de la Guerre, à Londres, douze exemplaires de documents confidentiels. Il faudra arrêter la circulation pour aller les chercher sans qu'il ne manque une page.

Puis, 33 jours avant le Débarquement, une grille de mots croisés va faire sérieusement tousser les services de renseignements britanniques. Parue dans le Daily Telegraph, elle contient plusieurs mots-clés de l'opération, dont Overlord et les noms de code des plages d’arrivée : Omaha et Utah. Le professeur qui a imaginé cette grille, arrêté, finira par convaincre le contre-espionnage qu'il ne s'agissait que d'une pure coïncidence. 

Les combattants, eux, n'ont reçu les informations qu'au dernier moment et les soldats ont été maintenus dans des camps entourés de barbelés sous haute surveillance quinze jours avant le jour J avec interdiction de sortir sous peine d'être fusillés.