Vue aérienne d'Asmara, la capitale de l’Érythrée. Crédit : Reuters
Vue aérienne d'Asmara, la capitale de l’Érythrée. Crédit : Reuters

Jeudi 6 juin, la France a procédé à l’expulsion d’une ressortissante érythréenne vers son pays d’origine. Une première pour Paris, qui ne pratiquait pas les renvois vers Asmara, considéré comme une dictature. Les associations s’inquiètent d’un changement de politique.

La France changerait-elle sa politique vis-à-vis des ressortissants érythréens ? C’est en tout cas ce que redoute la Cimade avec le renvoi jeudi 6 juin d’une Érythréenne vers Asmara.

"À notre connaissance, c’est la première fois que Paris renvoie un Érythréen dans son pays d’origine", signale à InfoMigrants David Rohi, responsable de la rétention à la Cimade. "C’est très grave quand on connait la situation dans ce pays où règne l'une des dictatures les plus violentes du monde".

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La ressortissante érythréenne a été contrôlée à la frontière franco-espagnole dans un bus provenant d’Espagne. Suite à son interpellation, elle a été conduite dans le centre de rétention administrative (CRA) de Toulouse, dans le sud de la France, où elle a déposé une demande d’asile. "L’entretien avec l’Ofpra a été réalisé dans de très mauvaises conditions car il s’est fait par visio-conférence et dans le cadre d’une procédure d’urgence", précise encore David Rohi.

"Cette affaire nous alarme fortement"

Sa demande d’asile ayant été rejetée, elle a déposé un recours à la CNDA. Mais le recours n’étant pas suspensif en CRA, l’Érythréenne a été renvoyée, avant le résultat de la procédure, "sous escorte policière" vers son pays d’origine via Istanbul.

"Cette affaire nous alarme fortement. Comment la France peut-elle expulser une ressortissante érythréenne qui a exprimé ses craintes en cas de retour à Asmara ?", se demande David Rohi.

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Sur le site du Quai d’Orsay, les autorités rappellent que "le régime érythréen a supprimé la plupart des libertés et la situation des droits de l’homme y est très préoccupante : (…) absence d’indépendance de la justice des prisonniers politiques toujours plus nombreux (…) arrestations et détentions arbitraires".

Dans un communiqué, la préfecture des Pyrénées-orientales, à l'origine de l'expulsion, considère que "l'intéressée a pu faire valoir ses droits à plusieurs reprises" et que le préfet a ainsi "exécuté la décision d'éloignement" décidée par le tribunal administratif de Toulouse.

Contactés par InfoMigrants, le ministère de l’Intérieur et la préfecture des Pyrénées-orientales se renvoient la balle : aucun des deux n'a pu fournir d'explication plus précise à ce renvoi forcé vers Asmara.

La Cimade s’inquiète que cette expulsion marque "une volonté d’éloigner de plus en plus d’Érythréens, en dépit de la situation dans le pays" et demande au gouvernement de "renoncer à toute expulsion".

 

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