Seine-Saint-Denis : une chaîne humaine devant l’école pour déloger les dealers

Depuis un mois, des parents d’élèves forment chaque jour une chaîne humaine pour protéger symboliquement l’école Hugo-Balzac du trafic de drogue. Ce mouvement veut s’installer dans la durée et cherche des relais.

 Saint-Denis. Les parents d’élèves expriment leur ras-le-bol face aux trafics de drogue dans le quartier.
Saint-Denis. Les parents d’élèves expriment leur ras-le-bol face aux trafics de drogue dans le quartier. LP/N.R.

    Tous les matins, depuis un mois, par tous les temps, une quarantaine de parents d'élèves se donnent la main pour former une chaîne humaine autour de l'école Hugo-Balzac-L'Ermitage. « On veut protéger symboliquement l'école en créant un cordon de sécurité », explique Nadine, l'une des mères de famille à prendre part tous les jours à ce drôle de happening.

    La mobilisation n'a pas failli depuis le 13 mai dernier. Elle a été complétée par un sit-in une fois par semaine devant le collège Fabien. Ces rassemblements répondent à un incident survenu il y a un mois tout juste dans le groupe scolaire Hugo-Balzac. Une intrusion avait semé le trouble, et 600 élèves s'étaient retrouvés confinés par mesure de précaution dans leur classe pendant plus d'une heure.

    Du cannabis avait été retrouvé à l'intérieur de l'école

    Cet épisode est loin d'être un fait isolé. Il avait révélé un malaise plus profond, celui des habitants des quartiers Nord de Saint-Denis, Péri-Dourdin-Delaunay-Belleville, en prise avec un trafic de drogue endémique. Lors de la fouille de l'établissement, quelques grammes de cannabis avaient été découverts dans une cachette, signe que l'école n'échappe plus à la sphère d'influence des trafiquants.

    Ce jeudi, une vingtaine de parents, des enseignants se sont encore rassemblés sous le nez des guetteurs impassibles. Soudain un cri strident retentit à l'approche d'un fourgon de police : « A l'affût, à l'affût derrière », préviennent les « choufs ».

    Saint-Denis, jeudi 13 juin. Un guetteur accoudé à la barrière et indifférent aux parents vient de donner l’alerte au passage de la police. LP/N.R.
    Saint-Denis, jeudi 13 juin. Un guetteur accoudé à la barrière et indifférent aux parents vient de donner l’alerte au passage de la police. LP/N.R. LP/N.R.

    «On se sent envahis »

    « Ça hurle en permanence. Il y a des points de deal devant et derrière le collège. On se sent envahis et ça perturbe les élèves », dénonce une enseignante en sciences physiques.

    La présence persistante des parents dans la zone de trafic ne plaît pas forcément. « On occupe l'espace et on gêne leur business. On veut leur dire que la rue appartient aux habitants », lâche Andrée, une riveraine.

    Des renforts policiers attendus dans les jours qui viennent

    Des mesures ont été prises par la ville, dont le rehaussement des barrières sur l'avant de l'école. Cela n'empêche pas de nouvelles intrusions : un jeune poursuivi par la police a été interpellé alors qu'il venait de traverser l'établissement.

    Si les vigiles payés par la mairie pour surveiller l'école jour et nuit sont repartis, les parents ont remarqué que les patrouilles de police étaient plus fréquentes que de coutume. Ils attendent avec impatience l'arrivée des 21 policiers supplémentaires. Affectés au commissariat de Saint-Denis, ils seront dédiés aux quartiers Nord et doivent arriver dans les jours qui viennent.

    Mais les parents sont conscients que la police ne peut pas tout. Alors ils se décarcassent pour trouver d'autres modes d'actions. Ils veulent interpeller les candidats aux municipales. Ce jeudi soir, Mathieu Hanotin, ancien député PS, est venu prendre la température. « Vous ne tarirez pas le trafic si vous ne vous attaquez pas aux consommateurs, estime-t-il. Il faudra aussi se poser la question de la légalisation du cannabis. »