Armor Lux avait déjà eu les honneurs du MoMA à l’automne 2017. À l’époque, le musée new-yorkais accueillait une exposition temporaire intitulée « Is fashion modern ? » (« La mode est-elle moderne ? »). Cent onze pièces représentatives de l’histoire et de la société des XXe et XXIe siècles étaient mises en valeur. Parmi elles, la marinière blanc et bleu Armor Lux. Les visiteurs l’avaient découverte sous la mention « Breton shirt ».
« Célébrer la Gay Pride à travers le monde »
Le vêtement était, selon le musée, représentatif des marinières portées par les pêcheurs français puis par la Marine à partir de la fin des années 50. Pour l’entreprise textile quimpéroise, qui, incidemment, s’apprêtait à fêter son 80e anniversaire, ce fut un beau cadeau.
Et voilà qu’en mars dernier, le MoMA a repris attache auprès d’Armor Lux pour une commande. Le thème ? Toujours à la croisée des XXe et XXIe siècles, et là encore pour un anniversaire : « Le musée voulait célébrer la Gay Pride à travers le monde », relate Jean-Guy Le Floc’h, P-DG d’Armor Lux. La marche des fiertés LGBT naquit en effet à New York, au lendemain des émeutes de Stonewall.
En juin 1969, les homosexuels new yorkais, las des raids policiers dans leur bar, The Stonewall Inn, à Greenwich Village, se rebellèrent pendant plusieurs jours. L’année suivante était organisée la « Christopher Street Liberation Parade ». Les communautés LGBT de San Francisco et Los Angeles firent de même.
« Quand nous avons racheté Armor Lux, en 1993, nous étions à 15 M €. L’objectif est d’atteindre les 100 M € d’ici notre départ, à Michel et moi, dans trois ans. Nous partirions tranquilles »
Aujourd’hui célébrée partout dans le monde, la marche des fiertés LGBT est symbolisée par le « Rainbow Flag », le drapeau arc-en-ciel, imaginé en 1978 par l’artiste Gilbert Baker. Clin d’œil à cet emblème, le MoMa voulait une marinière arc-en-ciel.
« Ce n’est pas de l’impression »
« Nous l’avons conçue avec eux », poursuit Jean-Guy Le Floc’h, pas peu fier de rappeler qu’Armor Lux est l’une des rares sociétés au monde à posséder des métiers textile rayeurs, capables d’injecter dans un textile jusqu’à neuf tissus de couleurs différentes. « Ce n’est pas de l’impression, le fil est injecté dans le tissu », précise Jean-Guy Le Floc’h. Preuve de cette mécanique de haute précision, ce métier de tissage tourne très lentement et ne peut façonner que 35 pièces par jour.
Les 1 000 marinières commandées ont été livrées la semaine passée. Le MoMA de New York en a réceptionné 500. La deuxième moitié a été aiguillée vers le MoMA de Tokyo. Informée, une boutique d’Amsterdam, aux Pays-Bas, vient de passer commande de 300 pièces. Les métiers textile rayeurs tournent à plein régime… « Le fait de retourner au MoMA, qui plus est avec une marinière multicolore, symbole de respect pour la communauté Gay, c’est valorisant pour nous », explique Jean-Guy Le Floc’h.
95 M€ de chiffre d’affaires en 2019
Il savoure d’autant plus la séquence qu’à la tête d’Armor Lux depuis 1993 avec son associé Michel Guéguen, il prévoit d’atteindre 95 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2019. « Quand nous avons racheté Armor Lux, en 1993, nous étions à 15 M €. L’objectif est d’atteindre les 100 M € d’ici notre départ, à Michel et moi, dans trois ans. Nous partirions tranquilles ».