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Santé

Revue de presse Allemagne : deux Allemandes ont donné naissance grâce à une greffe d’utérus

La revue de l’actualité scientifique dans la presse germanophone accueille les deux premiers enfants nés suite à une greffe d’utérus, envisage avec inquiétude le dépeuplement de l’Est du pays, puis évoque l’arrêt d’un réacteur nucléaire à Munich, avant d'assister à une détonnante symphonie pour voitures électriques

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Le Dr Sarah Brucker de l'hôpital universitaire de Tübingen, le 23 mai 2019, après la naissance d'un enfant dont la mère a reçu une greffe d'utérus.

Le Dr Sarah Brucker de l'hôpital universitaire de Tübingen, le 23 mai 2019, après la naissance d'un enfant dont la mère a reçu une greffe d'utérus.

© Fabian Sommer / DPA / dpa Picture-Alliance / AFP

La clinique de l’université de Tübingen vient d’annoncer une première : la naissance aux mois de mars et mai 2019 de deux enfants suite à une transplantation d’utérus. Deux jeunes femmes âgées de 25 et 26 ans, nées sans utérus car atteintes du syndrome de Mayer-Rokitansky-Küster-Hauser (MRKH), malformation de l’appareil génital qui touche environ  8.000 Allemandes, ont accouché par césarienne à la 36ème semaine de grossesse. Dans les deux cas, la donneuse est la mère de la patiente. Même prélevé sur une femme ménopausée, l’utérus greffé reprend sa fonction chez la réceptrice, dont le fonctionnement des ovaires n’est pas affecté par le syndrome ; la grossesse procède cependant d’une insémination artificielle. Lors de l’opération, les gynécologues allemands ont pu bénéficier de l’expertise de l’équipe du professeur Mats Brännström de Göteborg, pionnier en la matière. Si une première transplantation d’utérus avait déjà eu lieu en Allemagne en octobre 2016, il s’agit des deux premières grossesses menées à bien dans les huit pays coopérant dans le cadre d’Eurotransplant*. Tandis que les médecins et les psychologues y voient une solution possible à l’infertilité ou l’ablation de l’utérus suite à une maladie, les bioéthiciens interrogés par la Süddeutsche Zeitung envisagent avec scepticisme une telle intervention. À leurs yeux, elle ne correspond pas au principe fondamental de l’éthique médicale : l’absence de risque pour le patient, puisqu’une femme saine subit une opération invasive, dangereuse et coûteuse, sans bénéfice médical la concernant. Le procédé est pour l’instant restreint au seul cadre expérimental de la recherche.

* À savoir l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, la Croatie, la Hongrie, le Luxembourg, les Pays-Bas et la Slovénie.

 

Chronique d’un exode

Une étude de l’Institut de recherche économique (ifo) de Dresde* analyse la disparité démographique qui affecte les deux parties géopolitiques de l’Allemagne depuis près de 150 ans. Le quotidien Die Welt titre sur un chiffre clé : les Länder de l’Est comptent actuellement le même nombre d’habitants qu’en 1905 – alors que la partie Ouest n’a jamais été aussi peuplée, illustrant le concept de trajectoire induite qui se caractérise par l’inexorable poursuite d’un mouvement entamé. L’auteur de l’étude, l’économiste Felix Rösel, s’attache à définir les différentes vagues d’exode et montre que le point de rupture correspond à l’année de la création des deux entités RFA et RDA, en 1949. Dès la division du pays, les habitants de l’Est fuient vers les Länder de l’Ouest riches en bassins industriels. La construction du mur de Berlin en 1961 vise en partie à endiguer ce flot. La population de l’Ouest profite de cet apport dans les années 50, puis du baby-boom des années 60 ainsi que de l’immigration en provenance du Sud de l’Europe. La chute du mur en 1989 implique une réitération du même phénomène : la migration de plus de 2 millions de jeunes travailleurs qualifiés, et ce deuxième exode redouble alors la brèche de disparité (« Teilungslücke ») entre les deux parties du pays.

Le nombre d'habitants en Allemagne de l'Ouest (en noir) et en Allemagne de l'Est (en vert) entre 1870 et 2019 (normé sur l'année 1936 = 100) © ifo Institut

Ces chiffres frappants suscitent l’inquiétude, mais la valeur de l’étude repose plus encore sur la mise en avant des causes et des conséquences de cette fuite répétée, car « le nombre d’habitants est un indicateur important de l’attractivité à long terme et de la force économique d’une région ». Pour Felix Rösel, le dépeuplement des Länder de l’Est, et des campagnes en particulier, est un signe que les politiques ne doivent pas négliger, car il indique à la fois une absence de perspective due à la dislocation des infrastructures économiques et sociales, et une insatisfaction, voire une frustration, qui fait le lit de l’extrême droite. Les élections européennes l’ont parfaitement illustré, puisque l’AfD est majoritaire à l’Est – sauf dans les villes de Berlin et de Dresde, dont le dynamisme et la population plus jeune et plus éduquée les assimile à l’Ouest. Le message est clair : le danger réside dans une négligence qui confinerait à l’abandon.

*Felix Rösel, « Die Wucht der deutschen Teilung wird völlig unterschätzt », ifo Dresden berichtet, 2019, 26, Nr. 03, 23-25.

 

Panne de neutrons

Le réacteur de recherche de Garching, situé sur le campus de l’Université Technique de Munich, est à l’arrêt depuis le mois de mars faute de combustible, s’alarme la Süddeutsche Zeitung. En cause : la France, qui a cessé d’autoriser les transports spéciaux vers le site sensible. Le réacteur FRM II fonctionne en effet à l’uranium 235 enrichi à 93%, et cet uranium de qualité militaire est fabriqué à Romans-sur-Isère, dans la Drôme, très certainement à partir d’armes atomiques désactivées de provenance russe. Côté allemand, on laisse entendre qu’il s’agit d’une décision politique de la part de la France, dans la mesure où le réacteur est une source de neutrons unique, indispensable à la haute technologie qui assure la renommée de l’économie du pays. Ces neutrons sont ainsi utilisés aussi bien en médecine nucléaire que pour la recherche fondamentale, la fabrication d’accumulateurs, d’éléments de construction ou de médicaments. Le réacteur suscite l’indignation des écologistes depuis sa conception dans les années 90, car il a été construit bien après la décision internationale de n’utiliser qu’un uranium faiblement enrichi pour la recherche. Mis en service en 2004, la reconversion était prévue à partir de 2010, mais l’échéance n’a cessé d’être repoussée. C’est pourquoi les antinucléaires souhaiteraient que cet arrêt soit mis à profit pour effectuer cette transition nécessaire, tandis que les scientifiques attendent impatiemment la reprise d’activité, car ils ne voient pas d’autre alternative pour garantir la continuité de la recherche et de ses applications en médecine.

 

Concert de couacs en perspective ?

Dès le mois de juillet, une directive européenne impose aux constructeurs automobiles de doter toutes les nouvelles voitures électriques et hybrides d’un dispositif sonore afin de renforcer la sécurité des usagers de la route. Selon une étude menée par l’agence américaine chargée de la sécurité routière (National Highway Traffic Safety Administration, NHTSA), les véhicules électriques sont en effet plus souvent impliqués dans les accidents avec piétons et cyclistes que les voitures à essence. Le dispositif dénommé Approaching Vehicle Audible System (AVAS) doit ainsi rendre perceptible l’arrivée d’une voiture à vitesse réduite (moins de 20 km/h), mais aussi sa présence à l’arrêt, de même que l’accélération et la marche arrière. Autant de difficultés que doivent surmonter les compositeurs engagés par les firmes automobiles pour forger l’identité sonore de leur flotte électrique. L’hebdomadaire économique Wirtschaftswoche s’accorde une visite dans le studio d’enregistrement installé au sein de l’usine BMW de Munich, pour interroger le musicien et acousticien italien Renzo Vitale chargé d’en définir le design sonore. Conscient de l’influence décisive de toute forme de son sur la vie de chacun, il fonde son travail sur le principe de l’harmonie, espérant que les sonorités qu’il est en train de créer seront source d’inspiration et non de gêne. Cette mission est-elle cependant réalisable ? Selon les psychologues spécialisés dans l’impact du bruit et des signaux acoustiques, il n’existe ni norme d’agrément ni seuil de tolérance, car la perception relève à la fois du goût et de l’état psychique de l’individu. Autre écueil : les sound designers ayant travaillé chacun dans leur coin, c’est peut-être une véritable cacophonie qui nous attend bientôt au coin de la rue.

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