“Sur ce continent qui a depuis longtemps méprisé l’air conditionné et où les médecins débattent encore de ses potentiels effets négatifs sur la santé, la quête de cette semaine pour trouver de l’air frais annonce un changement drastique dans les relations entre les Européens et les climatiseurs”, souligne le Washington Post ce 28 juin. Le record de température battu en France vendredi (45,9 °C) a marqué les esprits et “les Européens sont en train de reconsidérer leur opposition historique à l’air conditionné”, pointe le journal américain.
Le Washington Post avance que moins de 5 % des logements en Europe sont équipés de l’air conditionné, contre 90 % aux États-Unis. “Mais d’après l’Agence internationale de l’énergie [IEA], le nombre de climatiseurs va doubler en Europe lors des deux prochaines décennies, alors que les vagues de chaleur vont devenir plus fréquentes et plus longues en raison du changement climatique”, rapporte le quotidien américain.
Allons-nous comprendre les Américains ?
Le correspondant du journal à Berlin décrit des entreprises qui vendent des climatiseurs dépassées par la demande, qui ne prennent même plus la peine de répondre au téléphone. “Les locaux qui dégoulinent de sueur ont longtemps montré leur perplexité devant l’amour qu’ont les Américains pour l’usage excessif d’air conditionné”, aime rappeler le Washington Post, qui parle d’Européens “à l’esprit têtu” :
Pour les Européens, accepter l’air conditionné chez eux est la preuve d’une réalité préoccupante : le changement climatique est là pour longtemps.”
Mais ce changement de mentalité est paradoxal, reconnaît le journal américain, l’air conditionné étant accusé par ses détracteurs d’amplifier le changement climatique en raison de sa consommation d’énergie. “Au niveau mondial, les ventilateurs et l’air conditionné sont déjà responsables de 10 % de la consommation électrique, mais selon l’IEA ce chiffre pourrait tripler lors des trente prochaines années”, rapporte le Washington Post. D’après le journal, les demandes européennes en air conditionné “seront minimes comparées à celles venant d’autres endroits dans le monde, notamment d’Inde, d’Indonésie et de Chine”.
Le grand quotidien de la capitale américaine et l’un des titres les plus influents de la presse mondiale. Traditionnellement au centre droit, The Washington Post doit sa réputation à son légendaire travail d’enquête dans l’affaire du Watergate, qui entraîna la chute du président Nixon au début des années 1970. Il se distingue aussi par sa couverture très pointue de la vie politique américaine, ses analyses, ses reportages, ainsi que par ses nombreux chroniqueurs de tous bords politiques.
Premier quotidien à paraître sept jours sur sept (en 1880) et à charger un médiateur de veiller sur l’indépendance du journal (dès 1970), The WP a souvent su évoluer avant les autres. C’est à partir des années 1930 qu’il prend vraiment son essor, suite à son acquisition par Eugene Meyer, avant de connaître son heure de gloire sous la houlette de sa fille, Katharine Graham.
En 2013, le journal contrôlé durant quatre-vingts ans par la famille Meyer-Graham a été racheté par le patron d’Amazon, Jeff Bezos. Depuis, le Post a mis l’accent sur les nouvelles technologies. Les développeurs et datascientifiques cohabitent dans ses nouveaux bureaux avec les journalistes ; les titres sont souvent plus accrocheurs et adaptés au web. Jeff Bezos a investi des sommes importantes qui ont permis l’embauche de 140 journalistes, après des années de licenciements. Mais les recettes restent insuffisantes et l’avenir suscite toujours des inquiétudes.
Le site du Washington Post est très complet et attire de nombreux internautes de l’étranger. Il a expérimenté ces dernières années des formats très ambitieux, notamment en matière de journalisme immersif.