POLITIQUE - “Politicaillon à la noix” contre “fasciste.” Depuis le début de la législature, les relations entre le ministre d’État de la Transition écologique et la France insoumise sont plus qu’orageuses. Le désamour entre les députés du groupe présidé par Jean-Luc Mélenchon et François de Rugy a débuté lors de son accession à la présidence de l’Assemblée et ne cesse de se creuser depuis que l’ancien membre d’Europe Écologie les Verts a remplacé Nicolas Hulot au gouvernement.
Des querelles sur la forme, Rugy n’acceptant que très peu l’indiscipline -vestimentaires ou non- des parlementaires Insoumis. Mais également sur le fond entre les tenants d’une ”écologie pragmatique” et ceux qui veulent aller plus vite et plus fort.
Mais ces joutes verbales n’avaient jusque là jamais atteint le niveau de violence constaté ces derniers jours. Conséquence ou non de la canicule -dont on sait qu’elle épuise les organismes et peut provoquer des accès de colère- les deux hommes se sont durement affrontés par médias interposés.
Avec Rugy, “tu rends l’écologie impopulaire”
Dernier épisode en date: la vidéo hebdomadaire de François Ruffin. Et la réponse de François de Rugy. Il faut dire que les oreilles du ministre de la Transition écologique ont dû particulièrement siffler en ce samedi 29 juin. Le député insoumis a en effet pris plusieurs minutes de sa séquence pour étriller, en règle, le ministre, suggérant par exemple d’utiliser les retournements de veste de l’ancien écolo comme énergie propre et renouvelable.
“Une énergie alternative, tu sais ce que ça serait? C’est chaque fois que de Rugy retourne sa veste. Là, ça crée de l’énergie, c’est mieux que les éoliennes. Voilà ce qu’il est (...) politicaillon à la noix”, s’est agacé François Ruffin dans son style habituel avant d’enfoncer le clou: “Si l’incarnation de l’écologie dans ce pays c’est Rugy, c’est évident que tu rends l’écologie anti-populaire. Avec son côté aristocratique ‘le château descend pour vous expliquer comment on va faire de l’écologie dans ce pays.”
Mais le député de la Somme ne s’arrête pas à ce qu’il considère comme l’incompétence du ministre. Il tape large et répond aux critiques sur sa personne.
Il revient notamment sur les accusations de “politique-spectacle” qui lui sont faites à lui et aux membres de son groupe. “Cela fait deux ans que je suis dans l’hémicycle, ça fait deux ans que quand je prends la parole on me dit ‘vous faites du cinéma monsieur Ruffin, vous vous croyez dans un film monsieur Ruffin, moi aussi j’ai été intermittent’”, regrette-t-il. Car si le député a consacré une partie de cette vidéo au ministre de la Transition écologique, c’est en partie pour répondre à ce genre d’accusations qui ont fleuri tout au long de la semaine.
Mais ce dimanche, sur le plateau de BFMTV, François de Rugy a également voulu montrer les muscles et s’est livré à une attaque d’une rare violence. “Vous savez à qui il me fait penser? Un fasciste. Les fascistes se comportent comme ça. Ils discréditent les gens qui ne pensent pas comme eux au lieu de débattre”, a-t-il lancé en comparant les vidéos régulières du députés insoumis à celles de Jean-Marie Le Pen.
Et l'ancien adjoint à la mairie de Nantes de conclure: "il transpire la haine de l'autre. Moi je suis prêt à débattre."
“François Ruffin ment, comme très souvent”
“Comme d’habitude, Monsieur Ruffin vous préférez faire des films que des propositions”, persiflait notamment le ministre mercredi 26 juin en référence à une vidéo tournée par le député Insoumis dans la cour de l’Assemblée nationale. C’est cette séquence là qui a mis le feu au poudre entre les deux hommes.
On peut y voir François Ruffin épingler quatre ministres qui viennent et repartent en voiture à l’Assemblée nationale quand le ministre de la Transition écologique donne, en même temps, des “grands discours” sur la responsabilité environnementale. Et si ce sont Sibeth Ndiaye, Marc Fesneau, Jean-Michel Blanquer et Franck Riester qui se sont fait alpaguer par le député, c’était bien François de Rugy le principal responsable visé.
“Il y a toutes les bagnoles qui se garent et qui continuent de tourner. Le ministère de l’écologie il est à 600 mètres, soit huit minutes à pieds. (...) J’espère que monsieur Rugy aura un avis sur la question. Des grands discours sur l’environnement et le petit acte... c’est rien. À part enlever sa cravate”, s’agaçait le député-reporter en référence au “geste écolo” de François de Rugy qui s’était présenté la veille sans cravate sur les plateaux de télévision.
Ruffin répond à Rugy qui répondait à Ruffin
Problème? La voiture du ministre de la Transition écologique est électrique et n’était pas, qui plus est, dans la cour de l’Assemblée. Le principal intéressé n’a évidemment pas manqué l’occasion de le faire savoir à François Ruffin. “S’il était honnête, il dirait que je viens souvent à l’Assemblée à pied et que je me déplace dans Paris avec une voiture électrique”, a-t-il répondu.
De quoi alimenter une gue-guerre qui s’est poursuivie sur les réseaux sociaux et via médias interposés. Vexé d’être résumé à un député “qui fait des films”, François Ruffin a notamment rappelé au ministre de la Transition écologique qu’il avait proposé de supprimer les trajets hexagonaux en avion quand une alternative ferroviaire était possible. Une idée approuvée par 69% des Français, que le monsieur écologie du gouvernement jugeait “pas sérieuse.”
″Ça, c’est une proposition, O.K”, concédait alors François de Rugy sur le plateau de franceinfo avant d’expliquer pourquoi le gouvernement ne l’avait pas retenue. “Ce qu’il laisse entendre c’est qu’on pourrait régler le problème des émissions à effet de serre en France avec cette proposition. Les vols intérieurs que l’on pourrait faire en TGV concernent moins de 1% des gaz à effet de serre.”
François Ruffin est conscient que cette mesure, comme celle consistant à couper les moteurs des voitures dans la cour de l’Assemblée n’est pas la panacée. “C’est un symbole. Il faut bien reconnaître que ce n’est pas non plus un point d’arrivée”, concède-t-il dans sa vidéo du 29 juin. Mais pour François de Rugy, “la politique des symboles écrase la réalité.”
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