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Ces mots démodés à réhabiliter au quotidien

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«Amphitryon», «misandre», «débagouler»... Dans les colonnes de nos dictionnaires, demeurent des mots au charme désuet. Des noms et verbes qui bien que centenaires ou millénaires, sont toujours d'actualité. Jean-Loup Chiflet déterre Ces mots perdus au fond de nos dictionnaires, dans son livre. Retour vers le futur !

S'il fallait les qualifier, on dirait qu'ils sont les James Bond de la langue française. Ils n'ont plus la fraîcheur de leurs premiers jours, mais ont à chaque fois le don de provoquer un sourire, une émulation et pourquoi pas, le désir de tous les redécouvrir. Après tout, «demain» ne meurt jamais dans le dictionnaire. Enfin... presque. Car soyons honnêtes, à la différence de l'espion anglais qui parvient toujours à se renouveler, les mots désuets ont pour leur part, du mal à retrouver leur public.

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La faute d'abord à l'Histoire. Les changements de système de gouvernement ont non seulement entraîné un aggiornamento des pensées mais également un bouleversement des modes d'expression. Il ne nous viendrait plus à l'esprit de parler de «queux» pour désigner l'«officier de la maison du roi chargé du service de la bouche» car nous ne vivons plus en monarchie. De la même façon, on ne parlera plus de «caillouteur», «ouvrier qui taillait la pierre à fusil», de «brouetteur», c'est-à-dire «celui qui transporte d'autres personnes dans une chaise munie de roues» ou encore «d'herbilleur», l'«arracheur de mauvaises herbes» car les technologies d'hier ne sont plus celles d'aujourd'hui.

L'instantanéité de l'information a accéléré nos modes d'expression

Le progrès technique ne s'est pas en effet contenté de bouleverser nos habitats, il a changé notre habitus. Et par là même, nos habitudes. L'instantanéité de l'information, qu'elle se fasse par la téléphonie ou l'internet, a accéléré nos modes d'expression. Cela se constate par exemple par la sur-utilisation de l'apocope (ciné au lieu de cinéma) et de l'aphérèse (bus au lieu d'omnibus, car pour autocar). Mais aussi par la sur-représentation des anglicismes.

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Dont acte. Face à la raréfaction d'un vocabulaire pas si lointain, l'auteur Jean-Loup Chiflet a décidé de «donner une seconde chance» à ces mots qui firent le charme et la précision des expressions de nos ancêtres dans son livre Ces mots perdus au fond de nos dictionnaires, (Le Figaro Littéraire). Un savant et savoureux ouvrage qui sait doser pédagogie et nostalgie. Car attention, pas question de combat d'arrière-garde ici! L'auteur a pour seul vœu de «réhabiliter les mots qui méritent vraiment qu'on les sauve de l'oubli». Alors lecteurs, préparez-vous à vous régaler de cette macédoine de verbes et adjectifs qu'a concoctée l'écrivain.

Molière, le capitaine Haddock et de Gaulle

Au chapitre 1, celui des noms, Jean-Loup Chiflet a préparé un menu qui ne manque pas de sel! Que penser par exemple du mot «misandre» qui signifie «éprouve une hostilité manifeste à l'égard des hommes», d'«aigrefin», issu de «esclevis» un poisson, et désignant aujourd'hui «une personne qui vit de procédés d'escroqueries» ou bien encore du surnom péjoratif «jocrisse» qu'employèrent Molière, le capitaine Haddock et le général de Gaulle?

En quelque cent pages, Jean-Loup Chiflet parvient à exhumer tel un Indiana Jones de la langue française les plus belles pépites de nos dictionnaires. Allant jusqu'à ressusciter des mots quelque peu abscons, tels «immarcescible*», «nycthéméral*» et des récits oubliés de notre histoire, à l'instar de «jarnicoton» juron burlesque qu'inventa le confesseur du roi Henri IV, afin que ce dernier arrête de blasphémer en lançant à tort et à travers des «Jarnidieu»... «Je renie Dieu».

Non content finalement d'être d'actualité, ces mots se lisent comme des mines d'or d'histoire. Jean-Loup Chiflet rappelle ainsi que le verbe «honnir» qui signifie «mépriser», naquit à la cour du roi Edouard III, que le mot «picrocholin» fut créé sous la plume de Rabelais et que l'adjectif «barbon*» fut popularisé, par un certain La Fontaine dans Le Petit Chien qui secoue de l'argent et des pierreries. De quoi nous donner envie de replonger dans ces œuvres et faire de ces mots démodés, des plaisirs très «in»!

*Amphitryon: personne chez laquelle ou aux frais de laquelle, on dîne

Débagouler: vomir

Immarcescible: qui ne peut se flétrir; impérissable

Nycthéméral: relatif à la succession du jour et de la nuit

Barbon: vieillard.

Ces mots démodés à réhabiliter au quotidien

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6 commentaires
  • Patrick Jammet 1

    le

    Dans nycthéméral on retrouve nyctalope (qui voit la nuit). Pour Rémy Fadieze...MISANDRIE W= DARWINISME ! Éloquent ?

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