BFM Business
Conso

À Saint-Malo, ce patron de café se met à nu pour dénoncer le "système pervers" de TripAdvisor

Jean-Jacques Samoy, patron du café "La Java"

Jean-Jacques Samoy, patron du café "La Java" - Michel Dahyot

Patron du café "La Java" à Saint-Malo, Jean-Jacques Samoy a décidé de pousser un coup de gueule contre TripAdvisor et son système de notation qui nuit aux restaurateurs et autres propriétaires de cafés, selon lui. Il appelle les commerçants de la ville à se mobiliser jeudi soir pour une photo "strip advisor" afin de dénoncer la "dictature des réseaux sociaux".

"Il faut être surhumain pour supporter la méchanceté, la médisance, la rumeur au quotidien et tous les jours de sa vie, jusqu’à la fin de sa mort". Jean-Jacques Samoy en a assez. Dans un post virulent posté sur Facebook et repéré par Ouest-France, ce patron du café "La Java" à Saint-Malo- aussi sobrement baptisé "Le Café du coin d’en bas de la rue du bout de la ville d’en face le port"- dénonce le "système pervers" des plateformes de notation type TripAvisor.

À l’évidence, l’exaspération de ce commerçant à la tête de son établissement depuis 19 ans n’entache pas son sens de l’humour. En témoignent ces photos de lui, posant de dos, nu dans son établissement pour faire entendre son coup de gueule. "C’est le but de manœuvre: dire qu’on garde le sourire, mais un sourire vertical…", explique-t-il à BFM Éco.

Car malgré sa note de 4/5 sur TripAdvisor, Jean-Jacques Samoy est fatigué de lire les quelques commentaires désobligeants voire blessants sur son café et plus largement sur ceux de ses confrères.

D’autant qu’il ne sert pas à manger. Or, son établissement est classé sur la plateforme 114e sur 336 des "endroits où manger à Saint-Malo". Un signe "inquiétant" pour ses collègues restaurateurs, ironise-t-il d’un rire jaune à peine perceptible. Et de dénoncer "ces plateformes qui se font du pognon sur (leur) boulot" en publiant des "observations de clients et de non clients" grâce à un système "facile à contourner avec de faux avis".

"Dictature des réseaux sociaux"

N’hésitant pas à parler de "site de délation", Jean-Jacques Samoy reconnaît que son café reste "peu" concerné par TripAdvisor (411 avis en 19 ans). Mais "quand tu commences à regarder, ça touche. On est humain, c’est normal", ajoute-t-il. Surtout, il s’inquiète de voir tous ses collègues "qui n’en peuvent plus de cette dictature des réseaux sociaux", expliquant que même "les salariés en ont ras-le-bol".

Selon lui, cette situation est due à une minorité de clients qui arrivent au café ou aux restaurants "avec leur frustration, leur colère" et les plateformes de notation leur permettent "d’aller se défouler la nuit" et de "déverser leur haine" plutôt que de se tourner directement vers les équipes de l’établissement lorsqu’ils ne sont pas satisfaits.

Photo de groupe jeudi soir 

Le patron de "La Java" regrette ces critiques postées anonymement alors "qu’il y a des gens professionnels qui essaient de faire leur boulot". "Il n’y a plus de communication entre êtres humains" déplore-t-il, rappelant que "les réseaux sociaux -qu'il qualifie désormais d''asociaux'- sont faits pour que les gens se rapprochent", et non l’inverse. Il refuse toutefois de répondre aux commentaires car "à partir du moment où tu commences à répondre, c’est que tu acceptes que le système existe".

Jean-Jacques Samoy a déjà fait les démarchés auprès du siège parisien et américain de TripAdvisor pour faire supprimer son établissement du site. En réponse, il a reçu un "certificat d’excellence" qui récompense les meilleurs bars, cafés et restaurants de la plateforme. Malgré de multiples relances, il n'a toujours pas obtenu gain de cause. "Ils s’en fichent. Ils disent qu’ils ne sont pas responsables de ce que les gens écrivent", poursuit-il.

Pas de quoi le faire reculer pour autant. Au contraire, son intervention très remarquée a fait souffler comme un vent de fronde dans les rues de Saint-Malo. "Il se passe un truc, c’est la révolution malouine!", ironise-t-il. Pour faire entendre la voix des dizaines de commerçants de la ville qui dénoncent à leur tour la "dictature des réseaux sociaux", le patron de "La Java" les appelle à se mobiliser sur l’île du Grand Bé jeudi soir pour une photo de groupe. Nus, bien sûr.

Paul Louis