Franz Kafka (1883 - 1924) : l'étrange étranger

Portrait de l'écrivain tchèque Franz Kafka. A la lumière de ses textes, des témoignages et analyses de chercheurs et d'écrivains, ce parcours tente de dépasser les filtres idéologiques qui ont pu, jusqu'à présent influencer la lecture de l'auteur du Procès.
Redécouvrir Franz Kafka, c'est ce que propose de faire cette émission consacrée au grand écrivain tchèque disparu le 3 juin 1924 :
Une vie, une oeuvre : Franz Kafka (1883 - 1924)
59 min
La logique a beau être inébranlable, elle ne résiste pas à un homme qui veut vivre. Franz Kafka
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Kafkaïen. Se dit de ce qui évoque l'atmosphère absurde et oppressante des romans de Franz Kafka. On se souvient de l’intrigue du Procès, publié de façon posthume en 1925, l'histoire de Joseph K., un simple employé de banque, inculpé sans qu'il ne sache pourquoi, auquel on intente un procès sans qu'il puisse découvrir en vertu de quelles lois le jugement sera rendu, et qui est finalement exécuté. Mais jusqu’au bout, il cherche à comprendre la véritable raison de ce procès. Il découvre que derrière son arrestation se trouve une grande organisation. Sa faute n'est pas révélée, il ne peut s'en défendre que de manière indirecte en suivant le fonctionnement réglementaire de la bureaucratie. Forcément coupable puisqu'il est accusé.
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À sa mort, Kafka laissait une œuvre en grande partie inédite et inconnue. Il voulait qu'on brûle cette oeuvre. Depuis, de grands mouvements de pensée de ce siècle ont tenté tour à tour de s'approprier, parfois d'exclure, l'œuvre de Kafka.
En France, le surréalisme, l'existentialisme, le Nouveau Roman et le structuralisme ont marqué de leur empreinte la lecture que nous faisons du Procès ou du Château : certains intellectuels communistes se demandaient s'il fallait "brûler Kafka".
En Tchécoslovaquie, d'autres intellectuels communistes, au fameux congrès de Liblice de 1963, tentaient la réhabilitation d'un auteur jusque-là interdit, et donnaient le feu vert à ce qui devait s'appeler "le Printemps de Prague".
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Désormais, de nouvelles traductions du Château et du Procès ont été faites. La critique, sous un regard neuf, analyse l'oeuvre à l'aune de l'ironie, de l'humour noir de la plume de Kafka, et dépasse les exégèses métaphysiques du passé, comme l'explique dans ce document Marthe Robert, traductrice de Kafka.
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À travers ce parcours, cet épisode d’ « Une vie, une œuvre » consacré à Franz Kafka laisse entendre l'écriture de l'auteur, sous toutes ses formes d'expression : dans son journal, sa correspondance, et bien sûr dans ses romans, dans lesquels fiction et biographie se font parfois échos.
Je m’égare. Le vrai chemin passe par une corde qui n’est pas tendue en l’air mais presque au ras du sol. Elle parait plus être destinée à faire trébucher qu’à être parcourue. Franz Kafka
On y croise ceux qui ont rencontré sur leur route Kafka : Edouard Goldstricker, intellectuel tchèque et instigateur du Congrès de Liblice, Ivo Fleischmann, qui évoque le Prague de Kafka, Judith Stora-Sandor et Joël Askenazi, qui replacent l’œuvre de Kafka face à la complexité de sa judéité, Bernard Lortholary et Marthe Robert, tous deux traducteurs de Kafka et spécialistes de sa littérature.
Kafka sentait pendant sa vie qu’il n’appartenait à rien pleinement, qu’il était un étranger partout, dans sa famille, parmi les hommes, allemand parmi les tchèques, juif parmi les allemands, etc. Il sentait qu’il n’était pas capable d’appartenir à une communauté humaine quelconque. Seulement une fois dans sa vie il a eu le sentiment qu’il pourrait trouver une voix pour appartenir à une communauté. C’était une soirée en 1911, il avait 28 ans, devant une représentation d'un petit groupe d’acteurs de théâtre yiddish à Prague. Tout d’un coup, il était terriblement surpris par la vague de sentiments qui lui donnait cette illusion « je pourrais peut-être participer à la conscience collective ». Ce sentiment d’étrangeté, est le sentiment le plus constant chez Kafka. Edouard Goldstricker
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Kafka essentiellement est un auteur de Bohême, de Prague, à l’époque de l’empire austro-hongrois, où la situation était très différente de celle d’après 1918, et la formation de Kafka s’était faite au fin du siècle début du siècle. La République tchécoslovaque est créée en 1918, dans les dernières années de la vie de Kafka, il a vécu partiellement. Mais il est difficilement acceptable de penser que c’était un écrivain tchécoslovaque, non c’était un écrivain du royaume du Bohême. Il était écrivain de langue allemande, et ça s’expliquait surtout pour des raisons d’ordre social. A l’époque de Kafka et encore plus tard, la distinction entre les habitants de la Bohême était linguistique : ou bien on parle tchèque ou bien on parle allemand. (…) Kafka, lui a appris les deux langues. Ivo Fleischmann
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Dans mon tas de terre, naturellement, je peux tout rêver, je peux même rêver une entente, bien que je sache parfaitement que cela ne puisse pas exister et que dès l’instant où nous nous verrons, que dis-je ? Où nous nous sentirons à proximité l’un de l’autre, nous sortirons griffes et dents avec un nouvel appétit, même si nous sommes repus, tous les .deux au même moment, pas une seconde plus tôt, pas une seconde plus tard, avec une égale folie. Et, comme toujours, à bon droit : qui ne modifierait ses plans de voyages et d’avenir, même s’il est en pleine route, en présence de mon terrier ? Mais peut-être la bête creuse-t-elle le sien ; alors il ne saurait même pas être question d’aller rêver à une entente. Franz Kafka, Le Terrier (extrait), 1923

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Références