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L'Etat place sa dette à 10 ans à un taux inférieur à 0 % sur les marchés

Le taux à 10 ans français était déjà passé sous la barre de 0 % récemment. Ce jeudi, l'Agence France Trésor a pour la première fois de son histoire effectué une levée de dette à 10 ans à taux négatif. Le coût d'emprunt de moyen et long termes s'élève à 0,29 % cette année.

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(Shutterstock)

Par Isabelle Couet

Publié le 4 juil. 2019 à 15:44Mis à jour le 5 juil. 2019 à 07:01

Le coût de financement de la France sur les marchés vient de toucher un nouveau plus bas historique. Ce jeudi, l'Agence France Trésor (AFT), en charge de placer les emprunts d'Etat auprès des investisseurs a émis des titres à 10 ans au taux de -0,13 %. C'est la première fois que l'Etat effectue une levée de dette (marché primaire) à taux négatif sur cette longue maturité.

Effet « Lagarde »

Suite au discours choc de Mario Draghi , le président de la Banque centrale européenne (BCE), à Sintra au mois de juin, la France avait déjà vu son coût de financement à 10 ans passer sous la barre symbolique de 0 % sur le marché secondaire. Autrement dit certains investisseurs sont prêts à ne pas être remboursés en totalité pour prêter à l'Etat sur une décennie ! Un phénomène anormal qui touche pourtant de plus en plus de pays et de dette dans le monde : on estime le stock d'obligations à taux négatif à plus de 10.000 milliards de dollars. « Aujourd'hui, plus de 60 % du volume d'obligations souveraines en euro traite à des taux inférieurs à 0 % », souligne un analyste d'Unicredit.

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Le choix de Christine Lagarde , l'actuelle patronne du FMI, pour remplacer Mario Draghi à la fin de l'année, est aussi un facteur qui contribue à la détente des coûts d'emprunt. La Française est perçue comme une « colombe », prompte à soutenir l'économie à travers les outils de politique monétaire. Aux yeux des spécialistes, elle s'inscrit dans la continuité de Mario Draghi, même si elle n'a pas le background académique et l'expérience de l'Italien.

Les marchés sont convaincus que la BCE va relancer ses stimulus, comme Mario Draghi l'a d'ailleurs fait comprendre. Les incertitudes qui pèsent sur la croissance mondiale, dans un contexte de tensions commerciales, rendent ce scénario très probable. La Réserve fédérale américaine devrait donner le ton prochainement.

Taux allemand inférieur au taux de dépôt

Ces perspectives économiques renchérissent le prix des actifs les plus sûrs de manière spectaculaire. Notamment la dette allemande : ce jeudi, le taux à 10 ans allemand est passé sous -0,4 %, soit le niveau du taux de dépôt de la BCE. Cela signifie que détenir des emprunts allemands de longue maturité rapporte moins que de déposer son argent au guichet de la banque centrale.

Dans ces conditions, la France n'a aucune difficulté à placer sa dette sur les marchés. Cette année, l' Etat doit pourtant émettre plus de 200 milliards d'euros , un record. Depuis le 1er janvier, le coût moyen de financement à moyen et long termes s'élève à seulement 0,29 %. Il était de 0,53 % sur l'ensemble de l'année 2018. Avant l'adjudication de ce jeudi, l'AFT avait réalisé un peu plus de la moitié de son programme annuel.

Ces milliards de primes à l'émission

Le stock de primes à l'émission de l'Etat français a atteint un niveau record de 73 milliards d'euros l'an dernier, en hausse de 3,6 milliards d'euros. Ces primes sont constatées lorsque les OAT émises ont un taux facial supérieur au taux d'émission. Par exemple, pour l'émission à 10 ans réalisée ce jeudi, le taux de l'OAT de référence est de 0,50 %, et le taux à l'émission est de -0,13 %. Pour arriver à ce rendement, les investisseurs ont payé 6,23 % de plus que la valeur faciale de l'OAT, c'est-à-dire le montant qui leur sera remboursé à maturité.

L'Etat a donc empoché un gain sur cette émission. A l'inverse, s'il émet des obligations à un rendement supérieur au taux facial, il devra rembourser plus qu'il n'a emprunté, et enregistrera de ce fait une décote à l'émission.

Si la prime à l'émission constitue un avantage immédiat en termes de liquidités, il implique de payer par la suite des coupons plus élevés que le taux à l'émission. Ce qui entraîne un traitement comptable particulier. « En comptabilité dite 'maastrichtienne', nous devons amortir, chaque année, une partie de la prime à l'émission générée à l'occasion de nos opérations d'adjudication, et ce sur toute la vie résiduelle du titre émis. En 2018, nous avons ainsi amorti un peu plus de 8,5 milliards d'euros correspondant à des primes antérieures, ainsi que plus de 1,2 milliard d'euros de décotes antérieures. L'amortissement total de 7,3 milliards d'euros, qui s'impute sur les intérêts de la dette, explique l'essentiel de la différence existant entre la charge des intérêts de la dette exprimée en comptabilité budgétaire et celle exprimée en comptabilité maastrichienne », explique Anthony Requin, directeur général de l'Agence France Trésor.

Isabelle Couet avec Guillaume Benoît

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