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Seuls 10% des travailleurs gagnent près de la moitié des rémunérations mondiales (OIT)

Ouvrières assemblant des composants électroniques dans un atelier en Indonésie.
Photo: OIT/Asrian Mirza
Ouvrières assemblant des composants électroniques dans un atelier en Indonésie.

Seuls 10% des travailleurs gagnent près de la moitié des rémunérations mondiales (OIT)

Développement économique

Une nouvelle analyse de données de l’Organisation internationale du travail (OIT) livre les premières estimations de la distribution du revenu du travail et montre qu’à peine 10 pour cent des travailleurs perçoivent près de la moitié des rémunérations mondiales.

« Les inégalités salariales demeurent un phénomène répandu dans le monde du travail », souligne le document qui ajoute qu’en termes relatifs, ces augmentations des plus hauts revenus du travail s’accompagnent de pertes pour tous les autres.

« Les travailleurs de la classe moyenne et ceux qui touchent les plus bas salaires voyant leur part de revenu reculer », a déclaré Steven Kapsos, chef de l’Unité de la production et de l’analyse des données de l’OIT cité dans ce communiqué de presse.

Globalement, seuls dix pour cent des travailleurs perçoivent 48,9 pour cent du total des rémunérations mondiales, tandis que les 50 pour cent de travailleurs les moins bien rémunérés n’en touchent que 6,4 pour cent. Qui plus est, les 20 pour cent de travailleurs qui ont les plus faibles revenus – environ 650 millions de travailleurs – gagnent moins d’un pour cent des revenus du travail à l’échelle mondiale, un chiffre quasiment inchangé en 13 ans.

Par ailleurs, cette nouvelle série de données de l’OIT a montré que les inégalités globales des revenus du travail à l’échelle mondiale ont reculé depuis 2004.

« Cependant, ce n’est pas dû à une réduction des inégalités au sein des pays –au niveau national, les inégalités salariales continuent même d’augmenter. Ce recul s’explique plutôt par la prospérité grandissante dans les vastes économies émergentes, à savoir la Chine et l’Inde », a précisé l’Agence onusienne basée à Genève. De manière générale, on constate que les inégalités de revenu demeurent généralisées dans le monde du travail.

Pour l’OIT ; quand la part des revenus du travail des travailleurs à revenu faible ou moyen augmente, les gains ont tendance à être largement répartis, au bénéfice de tous les travailleurs, à l’exception des hauts salaires. Pourtant le rapport constate qu’à l’échelle mondiale la part du revenu national allouée aux travailleurs a diminué, passant de 53,7 pour cent en 2004 à 51,4 pour cent en 2017.

Inégalité salariale beaucoup plus élevée dans les pays en développement

Si l’on s’intéresse à la distribution du salaire moyen dans les pays, on constate que la part allant à la classe moyenne (les 60 pour cent des travailleurs du milieu de la distribution) a reculé entre 2004 et 2017, passant de 44,8 pour cent à 43 pour cent. Dans le même temps, la part gagnée par les 20 pour cent des personnes les mieux rémunérées a augmenté, passant de 51,3 pour cent à 53,5 pour cent. Les pays dans lesquels ces hauts salaires ont vu leur part dans les salaires nationaux augmenter d’au moins un point de pourcentage sont l’Allemagne, l’Indonésie, l’Italie, la Pakistan, le Royaume-Uni et les Etats-Unis.

A l’échelle mondiale, le salaire moyen des travailleurs de la moitié inférieure de la distribution des revenus n’est que de 198 dollars par mois et les 10 pour cent les plus pauvres devraient travailler plus de trois siècles pour gagner la même chose que les 10 pour cent les plus riches en un an. De plus, les pays « pauvres » ont tendance à afficher des niveaux d’inégalité de rémunération beaucoup plus élevés, ce qui exacerbe les difficultés des populations vulnérables.

Par exemple, si dans l’Union européenne, la moitié des travailleurs du bas de l’échelle reçoit 22,9 pour cent du revenu total versé aux travailleurs, en Afrique subsaharienne, le même groupe ne gagne seulement que 3,3 pour cent des revenus du travail.

Selon ce document de l’OIT, les pays présentant les répartitions les plus inégales sont la République démocratique du Congo, la Côte d’Ivoire, le Libéria, le Niger et l’Ouganda.

De façon générale, la forte inégalité des revenus du travail dans les pays en développement tient à la fois à une tranche supérieure de la distribution avec des revenus très importants et à une part importante de la population active ayant un revenu du travail extrêmement bas.

« La majorité des travailleurs dans le monde souffre d’une rémunération étonnamment basse et pour beaucoup d’entre eux avoir un emploi ne veut pas dire gagner suffisamment pour vivre », a fait valoir Roger Gomis, économiste au Département de statistique de l’OIT.