Alle foto's door Noortje Palmers
Le compte Instagram @Taboob_official a été créé en vitesse le 1er juillet 2019 à 20 heures. Deux jours et 22K abonnés plus tard, il a été soigneusement supprimé par Instagram. C’est ce qui vous attend si vous contestez l’algorithme d’Instagram avec des photos de seins, ou plus précisément de tétons féminins.Mais il faut savoir que les mamelons masculins ont également été considérés comme controversés et indécents. Quand un flash mob d'hommes torses nus apparut sur une plage du New Jersey en 1935, 42 d'entre eux furent arrêtés. Les hommes ont continué leurs actions, et, un an plus tard, l'interdiction du torse-nu chez les hommes a été levée.Pour les femmes, ça semble prendre un peu plus de temps… Instagram, qui est aujourd'hui l’endroit où se déroule toute notre vie en ligne, est malheureusement (avec Facebook) le réseau social le plus conservateur en matière de tétons nus. Tandis que les acteurs et actrices porno publient des photos explicites sur Twitter comme ils l’entendent, les nombreuses protestations contre la politique stricte d’Instagram ont abouti à trois exceptions : les seins nus dans le contexte de l’allaitement, après une amputation et dans des expressions artistiques telles que les peintures ou les sculptures.Nous avons discuté avec Jasper Decklercq et la photographe Noortje Palmers, créateurs de Taboob, à propos de… Bon, vous l’avez deviné.VICE : Hello Noortje et Jasper, pourquoi faites-vous ce projet ?
Noortje : C'est parti de rien. Certainement pas d’un point de vue féministe. Les seins sur Instagram sont très actuels, comme le montrent la marque de lingerie belge La Fille d’O qui est sortie l’ombre, ou encore le mouvement #freethenipple.
Jasper : Si d'autres personnes l’utilisent pour lancer le débat, c’est super bien sûr. On a aussi une opinion à ce sujet, mais ce n'est pas ça l’important. L’idée, ce n’est pas d’être des portes-paroles.Vous auriez pu faire quelque chose autour du pénis, ou des photos sanglantes ou encore des armes, mais vous avez choisi les seins, pourquoi ?
Noortje : On s’est rencontrés lors d'un projet autour de l'allaitement et c'est comme ça que l’idée nous est venue. Les mamelons n'étaient pas visibles sur les photos que nous avions prises à l'époque. Mais je trouve qu’on était pudiques. Si le fait que des femmes allaitent en public génère un scandale, ça devient n’importe quoi.
Jasper : Notre société devient de plus en plus à droite et on s'américanise. Tout le monde a un avis et veut le partager. Non pas que nous voulions rendre ce projet super sérieux. Il est important pour nous qu’il s’agisse d’un projet positif. C'est plus un projet artistique, un jeu contre la machine. En tant que nerd auto-proclamé, je me suis toujours demandé comment fonctionnait l'algorithme Instagram.Avez-vous beaucoup étudié les algorithmes avant de vous lancer ?
Jasper: Oui! Instagram a un ordinateur qui étudie de nombreuses photos afin de pouvoir identifier un sein - ce processus s'appelle l'apprentissage automatique. C'est donc un robot qui décide si une photo doit être retirée ou non. [Facebook, la société mère d’Instagram, déclare qu’à l’heure actuelle, 96% de toutes les images de nu qui sont finalement supprimées ont été découvertes par leur intelligence artificielle. Dans certains cas, les messages sont vus et évalués par les modérateurs, n.d.l.r.]
Noortje: Nous avons numéroté chaque photo pour pouvoir compter celles qu'Instagram bloquait. Entre-temps, notre compte a été complètement supprimé par Instagram.
Jasper: Ce qui est frappant, c'est que ce sont d'abord les seins blancs qui ont d'abord été retirés. Tous les seins bruns étaient encore en ligne. Comme si leur standard était une poitrine blanche … Bizarre.
Noortje : Oui, on veut provoquer, mais pas de manière vulgaire. C'est plus difficile. C'est aussi la raison pour laquelle on ne montre qu'un seul sein.Un seul sein, c’est moins sexuel ?
Noortje : Oui, car le contexte sexuel tombe, il s'agit du sein, pas « des seins ».
Jasper : Sur Instagram, il y des femmes qui sont presque entièrement dénudées et seul leur mamelon est flouté, mais on peut vraiment tout voir. Tout le monde joue avec ça, tout le monde cherche les limites de la plateforme.Quand trouvez-vous que quelque chose est pornographique ?
Jasper : C'est très personnel comme notion. Instagram prend, selon nous, une direction assez prude. Comme ce n'est pas encore accepté, vous ne verrez que des poitrines parfaites, l'industrie de la publicité et du porno en sont des exemples parfaits. Pourtant on sait que ce sein parfait n'existe pas. Il n'y a pas de sein standard. Je pense que c'est dommage, car en cachant tout, on ne fait que créer un sentiment de honte.
Noortje : On avait d’abord voulu commencé la série avec le même sein, mais lequel choisir ? Un gros, un petit, un noir, un blanc, un jeune, un plus vieux ? On en a maintenant un de 70 ans, un de 50 ans et un de 20 ans. Je pense que ça va du bonnet B à E.Vous parlez de seins, mais pas de personnes…
Noortje : Oui, c'est une protection, sinon on risque de lâcher un nom par accident. On a clairement convenu avec les propriétaires des seins qu'elles resteront anonymes.Quelle est votre définition d'un tabou ?
Noortje : Ça dépend… Certaines personnes sont plus prudes que l’autres. Les enfants s’en rendent d’ailleurs compte tout de suite, si vous montrez un sein dans la rue, ils savent que quelque chose ne va pas. C’est mis dans notre tête depuis le plus jeune âge. Bien sûr, ça varie également d'une région à l'autre. Ici, on peut allaiter dans un parc, et en Arabie-Saoudite, les femmes ne peuvent conduire une voiture que depuis peu. C’est fortement lié à la culture. C'est pour ça que ce qui est cool avec Instagram, c’est qu’on va dans le monde entier.
Jasper : Oui, mais c'est aussi le problème avec Instagram : une personne tente d'imposer sa vision sociale au reste du monde. C'est pourquoi ce projet ne devrait pas être trop sérieux. On veut juste jouer et défier les règles. Comme on l’a tous fait en classe, quand on devait se taire et qu’on chuchotait.Vous avez une attache particulière aux seins ?
Noortje : Dans ma famille, il y a des cas de cancer du sein. Je rêvais de faire de ce projet une expo et entre temps, c’est chose faite. Elle aura lieu l'automne prochain à la Ingrid Deuss Galery. Comme on pensait que le compte Instagram serait supprimé au bout de deux heures… Toutes les photos de seins pourront être achetées lors de l’expo et le bénéfice sera reversé à la recherche sur le cancer du sein.La photo la plus frappante c’est le sein qui a l'air de se prolonger en pénis.
Jasper : On l’appelle le Pinochiotet' haha, c'est purement pour la forme, ça donne envie d’allonger encore ce mamelon. Ce n'était pas intentionnel.Comment ça s'est passé pendant le shoot ?
Noortje : Je pense qu’un sein rend mieux quand le mamelon pointe. Je pensais que je connaissais déjà beaucoup de trucs sur les seins, mais sur le shoot, j'ai constaté que toutes les femmes ont une façon différente de faire pointer leur mamelon. Certaines femmes se les pinçaient, mais j'ai aussi vu une femme s’enfoncer les mamelons, pour après les laisser ressortir, ou encore certaines qui les frottaient pendant un moment. Autre chose m’a frappé : ces femmes préféraient se faire prendre les seins en photo plutôt que leurs visages, parce qu’elles avaient peur d'être laides dessus, et un sein reste un sein.
Jasper : Un sein sourit toujours !
Noortje : Je pense que tout le monde devrait en montrer un peu plus, car si on ne voit jamais autre chose que ces seins parfaits dans les pubs et dans le porno, on devient complexé.Vous comprenez qu’une plateforme comme Instagram a besoin des règles ?
Noortje : Bien sûr, il y a beaucoup de photos crados, mais si elles sont interdites sur Instagram, on pourra les trouver ailleurs. C’est ça qui est difficile, avec les règles.
Jasper : Les règles d'Instagram sont établies à partir d'un cadre de référence américain de droite.
Noortje : J'espère juste qu'une action comme Taboob rendra ces règles plus flexibles.
Jasper : Oui, en diagonale ! [après quoi il regarde rapidement les règles sur son téléphone]Entre temps, ils ont créé un nouveau profil Taboobofficial. Craignant que ce compte ne dure pas longtemps, ils lancent un appel à tous ceux qui veulent les soutenir : envoyez un mail à hello@taboob.be, ensuite une photo vous sera envoyée et vous pourrez la publier sur votre propre profil Instagram. De cette façon, ils pourront continuer à tester les photos autorisées et celles qui ne le sont pas via différents profils.
Concept & création : Jasper Declercq
Photographie : Noortje Palmers
Style : Harriet Wouters et Farah el BastaniVoir plus de la série de photos VICE de photographes belges . Êtes-vous ou connaissez-vous vous-même un photographe de talent? Envoyez-nous un email: beinfo@vice.comAbonnez-vous à notre newsletter et recevez tous les samedis nos meilleures histoires, vidéos et séries de photos. Et suivez VICE Belgium à la vitesse de l'éclair sur Instagram .
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Noortje : C'est parti de rien. Certainement pas d’un point de vue féministe. Les seins sur Instagram sont très actuels, comme le montrent la marque de lingerie belge La Fille d’O qui est sortie l’ombre, ou encore le mouvement #freethenipple.
Jasper : Si d'autres personnes l’utilisent pour lancer le débat, c’est super bien sûr. On a aussi une opinion à ce sujet, mais ce n'est pas ça l’important. L’idée, ce n’est pas d’être des portes-paroles.
« D'abord, tous les posts de seins blancs ont été retirés. Tous les seins bruns étaient encore en ligne. Comme si leur standard était une poitrine blanche … Bizarre. »
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Noortje : On s’est rencontrés lors d'un projet autour de l'allaitement et c'est comme ça que l’idée nous est venue. Les mamelons n'étaient pas visibles sur les photos que nous avions prises à l'époque. Mais je trouve qu’on était pudiques. Si le fait que des femmes allaitent en public génère un scandale, ça devient n’importe quoi.
Jasper : Notre société devient de plus en plus à droite et on s'américanise. Tout le monde a un avis et veut le partager. Non pas que nous voulions rendre ce projet super sérieux. Il est important pour nous qu’il s’agisse d’un projet positif. C'est plus un projet artistique, un jeu contre la machine. En tant que nerd auto-proclamé, je me suis toujours demandé comment fonctionnait l'algorithme Instagram.
Jasper: Oui! Instagram a un ordinateur qui étudie de nombreuses photos afin de pouvoir identifier un sein - ce processus s'appelle l'apprentissage automatique. C'est donc un robot qui décide si une photo doit être retirée ou non. [Facebook, la société mère d’Instagram, déclare qu’à l’heure actuelle, 96% de toutes les images de nu qui sont finalement supprimées ont été découvertes par leur intelligence artificielle. Dans certains cas, les messages sont vus et évalués par les modérateurs, n.d.l.r.]
Noortje: Nous avons numéroté chaque photo pour pouvoir compter celles qu'Instagram bloquait. Entre-temps, notre compte a été complètement supprimé par Instagram.
Jasper: Ce qui est frappant, c'est que ce sont d'abord les seins blancs qui ont d'abord été retirés. Tous les seins bruns étaient encore en ligne. Comme si leur standard était une poitrine blanche … Bizarre.
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Est-ce que vous cherchez à provoquer ?« Pendant le shoot, j'ai découvert que toutes les femmes ont des techniques différentes pour faire pointer leurs mamelons. »
Noortje : Oui, on veut provoquer, mais pas de manière vulgaire. C'est plus difficile. C'est aussi la raison pour laquelle on ne montre qu'un seul sein.Un seul sein, c’est moins sexuel ?
Noortje : Oui, car le contexte sexuel tombe, il s'agit du sein, pas « des seins ».
Jasper : Sur Instagram, il y des femmes qui sont presque entièrement dénudées et seul leur mamelon est flouté, mais on peut vraiment tout voir. Tout le monde joue avec ça, tout le monde cherche les limites de la plateforme.
Jasper : C'est très personnel comme notion. Instagram prend, selon nous, une direction assez prude. Comme ce n'est pas encore accepté, vous ne verrez que des poitrines parfaites, l'industrie de la publicité et du porno en sont des exemples parfaits. Pourtant on sait que ce sein parfait n'existe pas. Il n'y a pas de sein standard. Je pense que c'est dommage, car en cachant tout, on ne fait que créer un sentiment de honte.
Noortje : On avait d’abord voulu commencé la série avec le même sein, mais lequel choisir ? Un gros, un petit, un noir, un blanc, un jeune, un plus vieux ? On en a maintenant un de 70 ans, un de 50 ans et un de 20 ans. Je pense que ça va du bonnet B à E.
« En cachant tout, on ne fait que créer un sentiment de honte. »
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Noortje : Oui, c'est une protection, sinon on risque de lâcher un nom par accident. On a clairement convenu avec les propriétaires des seins qu'elles resteront anonymes.
Noortje : Ça dépend… Certaines personnes sont plus prudes que l’autres. Les enfants s’en rendent d’ailleurs compte tout de suite, si vous montrez un sein dans la rue, ils savent que quelque chose ne va pas. C’est mis dans notre tête depuis le plus jeune âge. Bien sûr, ça varie également d'une région à l'autre. Ici, on peut allaiter dans un parc, et en Arabie-Saoudite, les femmes ne peuvent conduire une voiture que depuis peu. C’est fortement lié à la culture. C'est pour ça que ce qui est cool avec Instagram, c’est qu’on va dans le monde entier.
Jasper : Oui, mais c'est aussi le problème avec Instagram : une personne tente d'imposer sa vision sociale au reste du monde. C'est pourquoi ce projet ne devrait pas être trop sérieux. On veut juste jouer et défier les règles. Comme on l’a tous fait en classe, quand on devait se taire et qu’on chuchotait.Vous avez une attache particulière aux seins ?
Noortje : Dans ma famille, il y a des cas de cancer du sein. Je rêvais de faire de ce projet une expo et entre temps, c’est chose faite. Elle aura lieu l'automne prochain à la Ingrid Deuss Galery. Comme on pensait que le compte Instagram serait supprimé au bout de deux heures… Toutes les photos de seins pourront être achetées lors de l’expo et le bénéfice sera reversé à la recherche sur le cancer du sein.
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Jasper : On l’appelle le Pinochiotet' haha, c'est purement pour la forme, ça donne envie d’allonger encore ce mamelon. Ce n'était pas intentionnel.Comment ça s'est passé pendant le shoot ?
Noortje : Je pense qu’un sein rend mieux quand le mamelon pointe. Je pensais que je connaissais déjà beaucoup de trucs sur les seins, mais sur le shoot, j'ai constaté que toutes les femmes ont une façon différente de faire pointer leur mamelon. Certaines femmes se les pinçaient, mais j'ai aussi vu une femme s’enfoncer les mamelons, pour après les laisser ressortir, ou encore certaines qui les frottaient pendant un moment. Autre chose m’a frappé : ces femmes préféraient se faire prendre les seins en photo plutôt que leurs visages, parce qu’elles avaient peur d'être laides dessus, et un sein reste un sein.
Jasper : Un sein sourit toujours !
Noortje : Je pense que tout le monde devrait en montrer un peu plus, car si on ne voit jamais autre chose que ces seins parfaits dans les pubs et dans le porno, on devient complexé.
Noortje : Bien sûr, il y a beaucoup de photos crados, mais si elles sont interdites sur Instagram, on pourra les trouver ailleurs. C’est ça qui est difficile, avec les règles.
Jasper : Les règles d'Instagram sont établies à partir d'un cadre de référence américain de droite.
Noortje : J'espère juste qu'une action comme Taboob rendra ces règles plus flexibles.
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Avez-vous lu les directives Instagram sur les photos de nu et la pornographie avant le lancement de Taboob ?« J'espère juste qu'une action comme Taboob rendra ces règles plus flexibles. »
Jasper : Oui, en diagonale ! [après quoi il regarde rapidement les règles sur son téléphone]Entre temps, ils ont créé un nouveau profil Taboobofficial. Craignant que ce compte ne dure pas longtemps, ils lancent un appel à tous ceux qui veulent les soutenir : envoyez un mail à hello@taboob.be, ensuite une photo vous sera envoyée et vous pourrez la publier sur votre propre profil Instagram. De cette façon, ils pourront continuer à tester les photos autorisées et celles qui ne le sont pas via différents profils.
Credits
Photographie : Noortje Palmers
Style : Harriet Wouters et Farah el BastaniVoir plus de la série de photos VICE de photographes belges . Êtes-vous ou connaissez-vous vous-même un photographe de talent? Envoyez-nous un email: beinfo@vice.comAbonnez-vous à notre newsletter et recevez tous les samedis nos meilleures histoires, vidéos et séries de photos. Et suivez VICE Belgium à la vitesse de l'éclair sur Instagram .