Nice-Matin : l’offre de rachat de Xavier Niel rejetée par les salariés

    L’offre de patron de Free, largement soutenue par les journalistes de Nice-Matin, a été rejetée par la majorité de salariés-actionnaires du journal. Une décision qui pourrait entraîner une longue bataille judiciaire.

     Xavier Niel proposait de « renforcer l’activité papier, de mieux valoriser l’outil industriel, d’investir dans le développement numérique et d’intensifier la stratégie de diversification ».
    Xavier Niel proposait de « renforcer l’activité papier, de mieux valoriser l’outil industriel, d’investir dans le développement numérique et d’intensifier la stratégie de diversification ». LP/Jean Nicholas Guillo

      Il rêvait de Nice-Matin mais les salariés-actionnaires du journal en ont décidé autrement. Après avoir officialisé son rachat de 34 % de Nice-Matin, Xavier Niel, copropriétaire du Monde, a vu son offre de reprise rejetée vendredi. C'est celle du propriétaire de Valeurs actuelles, Iskandar Safa, déjà candidat à la reprise de Nice-Matin en 2014, qui lui a été préférée. Une décision qui pourrait entraîner une longue bataille judiciaire.

      Cette acquisition ouvrait théoriquement au fondateur de Free une voie royale vers 100 % du capital du quotidien régional. En effet, l'industriel avait trouvé un accord avec le groupe belge Nethys pour lui racheter ses 34 % d'actions dans le journal azuréen. Ce qui lui donnait le droit d'acquérir les 66 % de la coopérative d'ici à février 2020, comme s'y était engagé Nethys.

      En annonçant ce rachat en début d'après-midi, alors même que l'assemblée générale commençait, le communiqué de Xavier Niel n'a pas eu l'effet escompté. Les 456 salariés-actionnaires ont largement rejeté le projet Niel, optant à 60 % pour celui d'Iskandar Safa. Un vote qui entraîne de fait une dénonciation du pacte d'actionnaires.

      Des journalistes en grève

      Ce résultat marque la scission des employés de Nice-Matin. En effet, le collège des journalistes, qui compte 143 personnes, s'est prononcé à une très large majorité (98,33 %) pour l'offre de Niel.

      En signe de protestation, les journalistes ont annoncé vendredi soir, dans un communiqué, leur décision de cesser le travail. « Non à Safa ! C'est le message fort et clair qui a été délivré par les journalistes », ont insisté les rédactions. Une décision qui devrait entraîner l'absence dans les kiosques samedi des titres Nice-Matin, Var-Matin et Monaco-Matin.

      Avec ce vote pour Iskandar Safa et la dénonciation du pacte d'actionnaires qu'il entraîne de fait, les journalistes craignent désormais que le groupe soit « plongé dans une bataille judiciaire longue, coûteuse et incertaine ».

      Des élus au CHSCT du groupe ont d'ailleurs dénoncé vendredi soir dans un communiqué « les menaces physiques et psychologiques » dont auraient été victimes plusieurs salariés de la part d'élus CGT de l'entreprise.

      Un feuilleton judiciaire

      « Nous sommes face à deux vérités », a jugé Denis Carreaux, le directeur des rédactions du groupe, auprès de l'Agence France Presse : « La vérité juridique et économique, qui fait que le pacte d'actionnaires donne un droit de préemption à M. Niel sur les 66 % du capital détenus par la SCIC, au 1er février 2020. Et la vérité de l'assemblée générale. »

      En présentant son projet devant les salariés vendredi, Iskandar Safa s'est engagé à prendre en charge tous les frais judiciaires d'éventuelles procédures à venir, a précisé Denis Carreaux. Xavier Niel n'a pas encore réagi au rejet de son offre par les salariés.

      Le feuilleton va donc continuer autour de Nice-Matin. Il avait démarré début mars avec l'ouverture d'une procédure de sauvegarde visant le journal, et ce à la demande de ses dirigeants, lassés des actionnaires belges de Nethys, qualifiés d'« absents ».