Edward Hopper, peindre le temps qui s’étire : épisode • 8/4 du podcast L'attente

Peinture d’Eward Hopper “Sunday” au musée Barberini à Potsdam en Allemagne en 2017 à l’occasion de l’exposition "From Hopper to Rothko: America's Road to Modern Art" ©Getty - Ralf Hirschberger/dpa/picture-alliance
Peinture d’Eward Hopper “Sunday” au musée Barberini à Potsdam en Allemagne en 2017 à l’occasion de l’exposition "From Hopper to Rothko: America's Road to Modern Art" ©Getty - Ralf Hirschberger/dpa/picture-alliance
Peinture d’Eward Hopper “Sunday” au musée Barberini à Potsdam en Allemagne en 2017 à l’occasion de l’exposition "From Hopper to Rothko: America's Road to Modern Art" ©Getty - Ralf Hirschberger/dpa/picture-alliance
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Témoin direct de l’évolution consumériste de l’Amérique, le peintre Edward Hopper s'y oppose. Les personnages de ses tableaux, passifs, seraient-ils des figures d'une protestation silencieuse ? Dans les oeuvres, le temps est suspendu, mais beaucoup se dit...

Avec
  • Didier Ottinger Spécialiste de la peinture moderne et contemporaine, directeur adjoint du Centre Pompidou à Paris
  • Première diffusion de cette émission le 20/12/2018, et première diffusion du Journal de la philo de Géraldine Mosna-Savoye, en fin d'émission, le 13/05/2019, à réécouter ici :
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Edward Hopper, 1882-1967, est un peintre à part dans l'histoire de la peinture américaine.
Imprégné de culture picturale française et européenne, il désirait créer un art typiquement américain mais avait exclu de son iconographie les grandes villes et leurs gratte-ciel ainsi que les espaces monumentaux de l'Ouest américain sauvage.
Depuis les débuts de son oeuvre et jusqu'à sa disparition, Edward Hopper s'intéresse aux « empty moments », les moments vides, les zones de passages, les seuils et les espaces de frontières... Que racontent-ils ?

L'invité du jour :

Didier Ottinger, spécialiste de la peinture moderne et contemporaine, directeur adjoint du Centre Pompidou à Paris.

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Une dimension métaphysique dans la peinture figurative

Hopper s’est nourri de ses visites des musées du monde. On sait que quand il est en Europe, il est quasi quotidiennement au Louvre, il fait des voyages en Espagne, il va voir Rembrandt à Amsterdam… Et tous ces tableaux-là reviennent, d’une façon cryptée dans les images qu’il produit. Un des tableaux qui a eu le plus d’impact sur sa mémoire c’est "Le philosophe en médiation" du Louvre. On le retrouve dans certains tableaux de Hopper, très décalé, comme selon un principe qui pourrait être celui décrit par Courbet lorsqu’il parle d’ « allégorie réelle ». Il y a quelque chose de cet ordre-là chez Hopper : garder la dimension métaphysique, mais l’appliquer à des images qui sont d’apparence simples, voir insignifiantes. Les fameuses figures féminines qui sont associées à l’image de Hopper, j’avais osé les rapprocher du mythe de Danaé. La lumière qu’elles viennent rechercher est évidemment comparable à cette pluie d’or qui tombe sur Danaé dans certains tableaux de la Renaissance par exemple.  

Narration ou suspension de l’action ?

A propos des liens de Hopper avec le cinéma, il y a une littérature abondante sur le sujet, certains grands réalisateurs comme Wim Wenders n’ont pas manqué de dire qu’ils avaient puisé abondamment dans l’œuvre de Hopper. Mais c’est une lecture qui suppose une narrativité dans les tableaux de Hopper. Mais je ne crois pas du tout, pour moi c’est précisément la suspension de l’action qui est objet même de la peinture de Hopper. Si la narration est dans l’esprit du spectateur, il est étrange qu’à propos d’une peinture figurative il y ait nécessairement cette volonté de l’interpréter en termes de narration alors que devant un tableau abstrait.

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