En Iran, la science sous le feu des luttes (géo)politiques

A gauche, Fariba Adelkhan - à droite, des gardiens de la révolution devant le portrait de l'ayatollah Khomenei ©AFP
A gauche, Fariba Adelkhan - à droite, des gardiens de la révolution devant le portrait de l'ayatollah Khomenei ©AFP
A gauche, Fariba Adelkhan - à droite, des gardiens de la révolution devant le portrait de l'ayatollah Khomenei ©AFP
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Depuis près d'un mois, l'anthropologue franco-iranienne Fariba Adelkhah est retenue prisonnière en Iran par les gardiens de la révolution. Entre luttes intestines pour le pouvoir à Téhéran et tensions géopolitiques autour du programme nucléaire, la science est prise en étau en Iran.

Avec
  • Ahmad Salamatian Intellectuel et ancien parlementaire iranien. Ancien secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères (Iran)
  • Armin Arefi Journaliste au Point, ancien correspondant à Téhéran

Le nom de Fariba Adelkhah, anthropologue, spécialiste de l’islam chiite, et directrice de recherche à la Fondation nationale des sciences politique a surgi hier, brusquement dans l’actualité.

La chercheuse franco-iranienne a disparu alors qu’elle se trouvait à Téhéran. Elle est probablement emprisonnée, depuis environ trois semaines, dans un quartier de la prison d’Evin (au nord de Téhéran). Bien qu’aucune information officielle ne soit venue, pour l’instant, confirmer ce point.

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Cela montre bien que l' arrestation de Fariba Adelkhah n'est pas le fait des services de renseignements qui dépendent officiellement du Ministère des renseignements. Ca indique bien que ce serait le fait des Gardiens de la Révolution qui agissent pour leur propre compte et répondent directement au Guide Suprême.                
Armin Arefi 

La situation actuelle de Fariba Adelkhah est liée à sa qualité de chercheuse, son audace de chercheuse, son courage de se lancer dans les faits. Et ça dérange avant tout les responsables de la section de prison d’Evin où elle est détenue, c’est-à-dire les Gardiens de la Révolution. Et c’est un enjeu de politique intérieure pour l’Iran. […] Dans tous ses ouvrages, elle a un regard qui part de l’anthropologie sociale et s’appuie sur la société iranienne et ses transformations. Elle est arrivée à cette découverte énorme qu’aujourd’hui le fait géopolitique le plus important au Proche-Orient c’est cette classe moyenne iranienne qui évolue malgré tout. Et c’est danger pour quelqu’un qui touche au fait le plus sensible pour le pouvoir d’un côté ou de l’autre.              
Ahmad Salamatian

Dans ce climat actuel de pression orchestrée par Donald Trump qui est sorti unilatéralement de l’Accord sur le nucléaire iranien en mai 2018, on assiste à une répercussion sur la société iranienne et cela nourrit la paranoïa des franges les plus conservatrices qui considèrent comme espions ou suspectes toute personne qui voyage entre les deux pays [l’Iran et les pays occidentaux].              
Armin Arefi

Pour la population iranienne, les Gardiens de la Révolution c’est à la fois un danger et, dans un moment d’insécurité permanente, un refuge. Le vrai problème c’est que la classe moyenne iranienne, qui serait la première perdante, est aujourd’hui partagée entre les excès des Gardiens de la Révolution sur ses libertés et en même temps, quand la sécurité devient la valeur numéro un , les Gardiens de la Révolution en profitent : ils savent que dans ce contexte de tension ils vont mater la classe moyenne.              
Ahmad Salamatian

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