Dorothea Lange, la photo comme précieux outil de lutte politique

Mardi-expo

Cela faisait vingt ans qu’une exposition n’avait pas été consacrée à l’auteure de l’iconique Migrant Mother.

Le Musée du Jeu de Paume (Paris) rend hommage à Dorothea Lange, la photographe emblématique de la Grande Dépression aux Etats-Unis, avec un focus inédit ; son travail sur les Américains d’origine japonaise internés après l’attaque de Pearl Harbor. Eclairage avec Pia Viewing :, commissaire de l'exposition

Dorothea Lange commence sa pratique en 1918 - elle est née en 1895 - de par elle-même, sans commande, juste comme témoin de son époque. Elle descend dans les rues de San Francisco et entreprend de saisir les visages des gens de pauvres moyens. On est en 1932, juste après le crash boursier, elle va photographier dans plus de vingt-deux états de l'Amérique, et va faire ce travail pendant plus de cinq ans.

Le but de cette exposition est de montrer, non pas une rétrospective de la photographe mais de chercher à identifier le rapport entre le travail photographique de Dorothea Lange et l'époque pour essayer de décortiquer l'histoire des Etats-Unis des années 40 et se défaire des idées reçues. Dorothea Lange est une libérale, impliquée politiquement, socialement. 

Elle a un grand respect pour les gens qu'elle photographie. Elle les photographie de très près, elle dit qu'elle n'est jamais assez près, montre  des visages, des bouts de corps, des mains... 

Un homme vu de dos avec un baluchon, on est en 1935. On devine une longue route qui trace sur l'horizon, une photographie qui montre le chemin, le départ, et laisse envisager que la route est longue.  On voit que les personnes ne sont pas démunies. On est dans la première vague de migrations. Par la suite, en 1936, 1937, 1939, on verra d'autres cas de migrants qui eux, ont tout perdu - avec les inondations, la sécheresse, la destruction de leurs fermes - et partent, sans rien.

Ce qui était original dans son travail, c'est qu'elle était la seule à couvrir toutes les étapes du déplacement des Américains d'origine japonaise contraints de partir pour les camps d'internement, dès 1942, à la suite de l'attaque de l'armée japonaise, le 7 décembre 1941, de la base navale américaine de Pearl Harbor. C'était une commande ; on ne voit ni les barbelés, ni les policiers, ni les conditions qui accompagnent ces gens. Elle conserve la même empathie qu'elle avait pour les migrants dans les années 30.

Portrait filmé de l'exposition au Musée du Jeu de Paume :

Programmation musicale : 

Bob Dylan, Song to Woody, 1962

Lien. Site du Musée du Jeu de Paume [qui, suite aux événements du week-end, ré-ouvre ses portes mardi 4 décembre à 11 heures ]