À lire

REPORTAGE. Au Maroc, la libéralisation de l'avortement reste bloquée

L'assouplissement de la loi voulu par le gouvernement en 2016 est enlisé au Parlement, dominé par les islamistes. Plus inquiétant, la répression contre les avortements clandestins s'accentue. Des médecins marocains tentent de réagir.

Manifestation en juin devant le Parlement marocain, à Rabat, pour réclamer l'accélération de l'adoption de la loi sur l'IVG.
Manifestation en juin devant le Parlement marocain, à Rabat, pour réclamer l'accélération de l'adoption de la loi sur l'IVG. | ABDESLAM KADIRI / OUEST-FRANCE
  • Manifestation en juin devant le Parlement marocain, à Rabat, pour réclamer l'accélération de l'adoption de la loi sur l'IVG.
    Manifestation en juin devant le Parlement marocain, à Rabat, pour réclamer l'accélération de l'adoption de la loi sur l'IVG. | ABDESLAM KADIRI / OUEST-FRANCE

Devant la banderole choc, « 200 000 avortements par an », des poupons en plastique sont alignés sur le trottoir. En France, on penserait à une manifestation contre l'avortement. A Rabat, devant le Parlement du Maroc, en ce mois de juin, le rassemblement réclame au contraire l'accélération de l'adoption de la loi sur l'interruption volontaire de grossesse.

Les poupons sont barrés de l'inscription « Article 453 », en référence à celui du Code pénal qui interdit l'avortement, sauf si la vie de la mère est en danger... Hors de ce cadre, avorter est passible de six mois à cinq ans de prison.

Ne pas froisser les islamistes

« Un projet d'assouplissement de la loi a été adopté en 2016, mais il est toujours bloqué au Parlement », s'alarme Chafik Chraïbi, médecin et président de l'Association marocaine de lutte contre les avortements clandestins (Amlac), à l'initiative du sit-in qui s'est tenu en juin.

Appuyé par le roi et le gouvernement de l'époque, le texte s'est enlisé pour ne pas froisser la majorité islamiste au Parlement. « Nous avons peur qu'ils vident la nouvelle loi en imposant des garde-fous. »

« Faiseuses d’anges »

Pour le Dr Chraïbi, « il faut que le droit à l'avortement soit applicable aux femmes victimes de viols, d'incestes, en cas de malformation du foetus. Il y a aussi le cas des jeunes mineures, des couples aux enfants nombreux... » Bref, il y a urgence.

Selon l'Amlac, 600 à 800 Marocaines avortent chaque jour, clandestinement, dans des conditions dramatiques. « On revient au siècle dernier. Elles font appel à des herboristes ou des faiseuses d'anges, ingèrent des médicaments, utilisent des aiguilles... Avec, au final, des risques de complications graves. »

Un vrai durcissement

Selon les ONG, jusqu'à 150 bébés sont abandonnés chaque jour. « C'est insupportable de trouver des bébés dans des poubelles ou des forêts », s'indigne Salima, une comédienne venue manifester.

Plus inquiétant, la pression s'accentue sur les rares médecins qui acceptent par conviction (ou pour l'argent) de pratiquer l'avortement en catimini. « La situation devient dramatique. Avant, les autorités fermaient les yeux. Mais, aujourd'hui, on assiste à un vrai durcissement », explique Chafik Chraïbi. Il y a un mois, six personnes, dont deux médecins, ont été jugées à Marrakech.

logo illustration

Un morceau d'Histoire à conserver pour toujours

Les Unes historiques Ouest-France : trouvez la vôtre !

Ailleurs sur le Web Contenus Sponsorisés
Offres d'emploi
Les tops articles sur : Maroc

fermer

Toute l'actualité en continu sur l'application.
Installer

00:00 00:00