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FRANCE

Des détenus "à cran" face à une canicule "insupportable" en France

Tandis que la seconde canicule de l'été 2019 s'abat sur la France en cette fin du mois de juillet, les détenus doivent composer avec des températures étouffantes et une promiscuité pesante.

Un gardien de prison circulant dans un couloir de la prison de la Santé, à Paris, le 12 juillet 2019.
Un gardien de prison circulant dans un couloir de la prison de la Santé, à Paris, le 12 juillet 2019. Dominique Faget, AFP
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Alors que la France connaît depuis lundi 22 juillet, un nouvel épisode de canicule, les conditions de détention dans les prisons ne cessent de se dégrader. Répartis dans les 187 établissements français, plus de 71 000 détenus doivent composer avec des températures dépassant parfois les 45 °C et une promiscuité permanente. Déjà, lors du dernier épisode caniculaire en juin, le thermomètre avait atteint 46 °C dans certaines cellules. Des coursives jusqu'aux parloirs, la chaleur s'infiltre partout.

À mesure que les températures augmentent, l'exaspération monte. Adeline Hazan, contrôleure générale des lieux de privation de liberté, reçoit chaque semaine des appels de détenus "à cran" face à une chaleur toujours plus "insupportable". "Ils sont parfois trois dans une cellule de 9 m², avec aucune possibilité d'aération", déplore-t-elle. Contactée par France 24, la direction de l'administration pénitentiaire assure que des mesures sont prises en fonction des problèmes rencontrés dans chaque établissement.

Des prisons vétustes

Depuis 2003, un plan canicule est mis en place tous les ans dans les prisons françaises du 1er juin au 30 septembre. Plusieurs consignes sont données au personnel pénitentiaire : distribuer gratuitement de l'eau fraîche, redoubler de vigilance face aux détenus particulièrement vulnérables (personnes âgées, femmes enceintes…), rallonger la durée des promenades ou encore faciliter l'accès au service médical. Si l'intention est louable, l'application de ces mesures reste dans les faits très variable selon les établissements. "Les directeurs de prisons font ce qu'ils peuvent avec les moyens qu'ils ont", explique François Bès, coordinateur du pôle enquêtes à l'Observatoire international des prisons (OIP).

Le manque de moyens se révèle d'autant plus criant lors des fortes chaleurs. "Sur le papier, des brumisateurs devraient être installés à l'extérieur, mais certaines prisons ne disposent même pas de point d'eau ni de toilettes dans leur cour, alors on peut toujours attendre pour le reste", soupire-t-il. Autre problème, la vétusté des prisons. Construites à la fin du XIXe siècle, les prisons anciennes – soit la moitié des établissements en France, selon l'OIP – ne disposent pas de douche dans les cellules. Leur structure s'avère tout aussi contraignante : "Des verrières ont été installées à l'époque pour apporter de la lumière dans les coursives, la chaleur y est étouffante", rappelle le représentant de l'OIP.

Des promenades rallongées

Difficile de créer un courant d'air dans ces établissements, les portes des cellules restant par définition fermées et les fenêtres n'étant pas toujours fonctionnelles. "Dans le quartier des femmes de la prison de Fleury-Mérogis, les fenêtres ne s'ouvrent que d'une dizaine de centimètres", précise François Bès. Restent les promenades rallongées et l'eau régulièrement distribuée. Mais là encore, les systèmes électriques souvent mal adaptés ne permettent pas toujours de brancher des réfrigérateurs dans les cellules. Résultat : "À la prison de Fresnes, l'eau distribuée devient rapidement chaude et les aliments ne se conservent pas".

S'ajoute à cela la surpopulation carcérale qui exacerbe les tensions. Certains détenus dont la cellule reste ensoleillée tout l'après-midi sont censés pouvoir être transférés dans une autre orientée à l'ombre. "Cela reste impossible dans les maisons d'arrêt qui sont déjà surpeuplées", nuance le coordinateur. Face à la chaleur, des ventilateurs peuvent également être distribués dans le meilleur des cas. La plupart sont toutefois en vente, ce qui crée un curieux rapport de classe entre les détenus. "Il y a ceux qui ont l'argent pour se rafraîchir et ceux qui ne l'ont pas", résume amèrement François Bès.

Système D

Augmenter les douches reste également compliqué, au vu du manque de personnel. "Certains n'arrivent même pas à se laver une fois par jour", note Adeline Hazan. Très souvent, le système D finit alors par primer. Certains mouillent leurs draps et les suspendent par la fenêtre pour tenter de créer un courant d'air. D'autres ouvrent leur robinet jusqu'à inonder la cellule, s'exposant à des sanctions disciplinaires.

Si la chaleur s'abat chaque été sur les prisons, peu d'améliorations ont été observées avec les années, note l'OIP. "Permettre plus de circulation dans les espaces serait déjà une avancée", estime François Bès, citant le cas de la prison de Villepinte (Île-de-France) qui a opté en 2018 pour une détention assouplie. L'établissement a mis en place un module 'Respect' qui permet aux détenus se comportant bien d'avoir plus de liberté entre les murs (promenade à volonté, accès aux activités…).

Expérimenté dans 18 prisons en 2018, ce dispositif assoupli a entraîné une baisse remarquable du niveau de violence en détention. "Cela permettrait également une circulation d'air dans les prisons en surchauffe", ajoute-t-il. Mais reste un problème de taille : "Les détenus continueront à souffrir de la chaleur tant que les prisons demeureront surpeuplées".

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