Contrairement à l’écrasante majorité des pays du globe, les États-Unis ont une fiscalité basée, non pas sur le lieu de vie, mais sur la nationalité. C’est le résultat du vote de la législation FATCA (Foreign account tax compliance) intervenu sous Barack Obama en 2010. Ce système - qui vise à ce qu’aucun ressortissant américain ne passe au travers des mailles du filet fiscal - met en demeure les banques du monde entier d’identifier les US person parmi leurs clientsSi elles ne coopèrent pas, les institutions bancaires s’exposent à des pénalités de 30% sur tous leurs flux financiers issus des États-Unis. Problème : la majorité des Américains accidentels qui sont sollicités ne peuvent fournir les informations demandées. Une situation inextricable qui pourrait déboucher, d'ici les prochains mois, sur la fermeture de milliers de comptes bancaires par des banques françaises redoutant de lourdes pénalités financières. Décryptage avec Fabien Lehagre, Président de l’Association des Américains accidentels (AAA) alors que le Conseil d’État vient tout juste de rejeter un recours formulé par l’AAA.

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Capital : Pourquoi aviez-vous déposé un recours devant le Conseil d’État ?

Fabien Lehagre : Le recours était motivé par deux arguments principaux : d’abord, le fait que les États-Unis n’appliquent pas de manière réciproque l’accord intergouvernemental (IGA) qui a permis la mise en place de FATCA. Ensuite, cet accord ne respecte pas la réglementation en matière de protection des données personnelles et du droit à la vie privée. On avait bon espoir d’être entendu par le Conseil d’État puisqu’on avait des éléments très factuels pour appuyer nos propos. Par exemple, nous avons produit un document de la Cour des Comptes qui indique noir sur blanc que jusqu’à présent il n’y a aucune réciprocité de l’accord. Par ailleurs, nous avions également demandé au Conseil d’État de poser une question préjudicielle à la Cour de Justice de l’Union Européenne pour interroger la légalité de l’accord FATCA. Là encore, le Conseil d’État ne nous a pas suivis.

Capital : Quel est votre sentiment à la suite de ce rejet ?

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Fabien Lehagre : Nous sommes abasourdis. Dans ce dossier, nous avons l’impression que l’aspect politique prime sur l’appréciation des faits. Rendez-vous compte que nous avons quand même apporté un courrier où l’ancien Secrétaire au Trésor américain Jacob Lew expliquait lui-même que les États-Unis n’appliquent pas la réciprocité…

Capital : Pourquoi y a-t-il urgence ?

Fabien Lehagre : Dans le cadre de l’accord FATCA, les banques françaises doivent récupérer le numéro d’identification fiscale (TIN) demandé par les autorités américaines. Face aux difficultés rencontrées pour y parvenir, la présidence maltaise de l’Union Européenne a envoyé un courrier pour alerter les Américains dès 2017. En réponse, le fisc américain a accepté la mise en place d’un moratoire. Mais celui-ci prend fin au 31 décembre 2019… Et tous les américains accidentels nés avant 1986 - la grande majorité - n’ont pas ce numéro d’identification fiscale...

Capital : Que demandez-vous au gouvernement français ?

Fabien Lehagre : J’espère que Bruno Le Maire, notre ministre de l’Économie, va accepter de cosigner un courrier avec son homologue néerlandais et l’envoyer à Steven Mnuchin, le Secrétaire au Trésor américain. Les Pays-Bas ont confirmé qu’ils étaient prêts à le faire. Par ailleurs, Bruno Le Maire a reçu, le 17 juillet, une lettre de Laurent Mignon, le président de la Fédération bancaire française qui précise que 40.000 comptes bancaires pourraient être clôturés avant la fin décembre faute d’une solution. Cela fait 5 ans que j’alerte les gouvernements successifs. Une mission diplomatique s’est rendue à Washington l’an dernier, mais il ne s’est rien passé ! À la rentrée, l’Association des américains accidentels (AAA) va déposer une plainte auprès de la Commission européenne pour manquement au droit de l’Union. Le Président Macron est au courant de l’affaire depuis son passage au ministère des Finances. C’était... il y a plus de quatre ans ! Il doit s’en emparer.

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