Génération no sex : ces jeunes nous expliquent pourquoi ils font moins l’amour

Malgré une apparente libération, des études montrent que les jeunes adultes ont moins de rapports sexuels que les générations précédentes.

 Capucine, 23 ans, a décidé de renoncer définitivement aux rapports sexuels.
Capucine, 23 ans, a décidé de renoncer définitivement aux rapports sexuels. LP/Quentin de Groeve

    Alors qu'une tendance montre que les jeunes font moins l'amour qu'avant, nous avons rencontré les principaux concernés grâce à Tinder, sur un banc public, au bord de la Seine ou via des amis d'amis. Âgés de 17 à 28 ans, ils sont célibataires ou en couple et nous confient pourquoi ils n'ont pas, ou peu, de relations sexuelles.

    Rosie, 25 ans : «Je préfère vivre de potes et d'alcool»

    Ni rejet, ni dégoût, juste un choix. Rosie le dit sans ciller : le sexe, c'est bien, mais si l'on n'en a pas envie, ça ne sert à rien. Célibataire depuis trois ans, cette étudiante de 25 ans a mis du temps à dédramatiser sa situation : « En trois ans, je n'ai eu que quatre rapports. Aujourd'hui je le vis très bien, mais les deux premières années, je me demandais si j'avais un problème. »

    Viennent ensuite les amis qui s'improvisent entremetteurs, les remarques désobligeantes lâchées sur le ton de la blague, l'indélicatesse des aficionados de sexe qui ne comprennent pas « comment elle peut tenir ».

    « J'avais l'impression de passer pour la mal baisée du groupe, j'en ai eu marre, soupire Rosie. Avec le temps, je me suis aperçue que si je n'avais pas beaucoup de rapports, c'était simplement que je n'en avais pas envie. Tout va bien dans ma vie, je suis occupée par mes études et finalement je préfère vivre de potes et d'alcool que d'amour et d'eau fraîche », conclut-elle, en riant.

    Mathéo, 17 ans : «Sans relation sentimentale, ça ne mène à rien»

    La libération sexuelle dont jouissent les jeunes générations célèbre une sexualité sans attache. Pourtant, batifoler ne fait pas l'unanimité parmi les lycéens. « Les coups d'un soir, c'est nul ! » regrette Mathéo, 17 ans, les sourcils froncés. « Je trouve que le sexe sans relation sentimentale, ça ne mène à rien, ça ne comble pas les moments de solitude », soupire le jeune Parisien, sous le regard interloqué d'un ami qui lui, dit « le faire souvent, un peu à droite à gauche ».

    « Moi ce que je recherche, c'est une copine, rebondit Mathéo avec pudeur. Ça fait plusieurs mois que je n'ai pas eu de rapport, parce que le sexe pour le sexe, ça ne m'intéresse pas. »

    Capucine, 23 ans : «Le sexe n'est pas obligatoire»

    Mais dire sans gêne que l'on peut s'épanouir sans rapport semble encore difficile. Capucine, elle, veut briser le tabou. « Le sexe n'est pas obligatoire, mais alors vraiment pas ! C'est seulement un conditionnement de la société », revendique la jeune femme de 23 ans sur les réseaux sociaux, posant tout sourire sur Instagram pour le « no sex challenge » dont elle fait l'apologie.

    « Après une relation qui m'a traumatisée, j'ai décidé de ne plus avoir de rapport pendant un an et demi, nous explique-t-elle. Ça m'a apporté beaucoup sur les plans physique et mental et ça m'a aidée à reprendre confiance en moi ! »

    Claire, 23 ans : «On partage autre chose ensemble»

    Même au sein des couples, le sexe n'est pas systématique. « Je suis avec mon copain depuis quatre ans et demi et on couche ensemble assez rarement. La dernière fois, je crois que c'était il y a deux mois, raconte Claire, 23 ans, étudiante en finance. Pourtant ce n'est pas un mauvais amant ! »

    La jeune femme vit une relation heureuse, stable et épanouie. Le sexe n'y est simplement pas un ingrédient sine qua non : « on partage autre chose ensemble ». « Souvent, je préfère mon confort à un rapport, mon sommeil à ses avances, ajoute-t-elle. En fait, je crois que j'ai un peu la flemme, que je ne suis pas toujours à l'aise avec mon corps et que ma vie sexuelle n'est pas assez trépidante pour faire plus l'amour. »

    Marie, 28 ans : «Netflix c'est traître»

    Si le sexe s'efface de la vie quotidienne des jeunes, c'est aussi parce que la société laisse de moins en moins de place à l'intime. En happant toute notre attention, les écrans happeraient-ils aussi notre libido ?

    Après quatre ans de vie de couple, Marie, 28 ans, le reconnaît d'emblée : « Netflix, c'est traître ! On se dit qu'on ne regarde qu'un épisode et finalement on ne s'arrête plus. » Pour elle, c'est évident, les écrans sont un « piège ». « Les soirées télé sont confortables, faciles, elles occupent l'esprit et on finit par s'endormir plutôt que de faire l'amour. »

    Sébastien, 25 ans : «Je n'ai plus d'énergie»

    La génération des millennials souffre d'un paradoxe : « C'est vrai qu'on est plus libérés, il y a moins de tabous pour parler de sexe et le porno a démocratisé nos fantasmes. Mais on ne les concrétise pas forcément », admet Sébastien. À 25 ans, le jeune homme se décrit comme un « fou de sexe ». Mais le travail a fini par s'immiscer entre ses désirs et leur réalisation : depuis l'année dernière, il bosse au McDo en parallèle de ses études.

    « En plus des cours, je trime comme un dingue, je n'ai plus d'énergie. Résultat, je suis vidé. J'adorais le sexe, c'était presque un sport pour moi et maintenant je dois annuler mes rendez-vous à la dernière minute parce que je suis trop fatigué pour faire l'amour », lâche-t-il, contrarié. Jusqu'à parfois succomber, littéralement. « Il m'est carrément arrivé de m'endormir en plein milieu des préliminaires avec une fille… soupire Sébastien. C'est l'enfer ! »