Honduras : la pilule contraceptive d'urgence toujours interdite, une menace sur la santé des femmes

Quartiers où les équipes MSF interviennent à Tegucigalpa, la capitale hondurienne.
Une famille marche dans les rues d'un quartier de Tegucigalpa, Honduras. © MSF/Christina Simons

Au Honduras, les victimes de violences sexuelles ne bénéficient pas d’un accompagnement médical complet. En 2017, MSF a proposé aux autorités un projet de protocole, toujours en attente de validation car la pilule contraceptive d’urgence, indispensable, est interdite dans le pays, menaçant ainsi la santé et la vie de milliers de femmes victimes de violences sexuelles. 

Rosario* vient d’arriver au centre de santé de Nueva Capital, un quartier de la capitale hondurienne, Tegucigalpa. Quatre jours plus tôt, son mari a été assassiné. Elle a été ensuite violée devant ses enfants, âgés d’un à huit ans. La famille vivait à la périphérie de Tegucigalpa, dans une petite ville du département de Francisco Morazan. Elle s'était installée récemment à Nueva Capital, en raison du manque de services publics et de l'insécurité. 

Le Honduras ne dispose d’aucun protocole de santé complet pour traiter les personnes qui, comme Rosario, sont victimes de violences sexuelles. En 2017, MSF et d'autres organisations ont remis au ministre de la Santé hondurien un projet de protocole de santé, qui n'a toujours pas été validé car la pilule contraceptive d'urgence reste interdite dans le pays. 

Il s’agit pourtant d’une urgence médicale qui permet de prévenir les grossesses non désirées, dont celles résultant de violences sexuelles. Son interdiction dans la pays a un impact sur le nombre d’avortements à risque, de traumatismes et met la vie de milliers de femmes en danger. 

Discussion entre un staff MSF et une personne témoin de violences à Tegucigalpa.
 © MSF/Christina Simons
Discussion entre un staff MSF et une personne témoin de violences à Tegucigalpa. © MSF/Christina Simons

Le protocole de santé doit également permettre aux victimes de recevoir une attention médicale complète dans les 72 heures suivant l'agression. Cela permet de prévenir les infections sexuellement transmissibles, le VIH, les grossesses et de fournir un soutien psychologique rapide.

En raison du manque de services de santé au Honduras, MSF a ouvert en 2011 un projet axé sur les victimes de violences et de violences sexuelles à Tegucigalpa. En 2018, seul un patient sur trois ayant survécu à des violences sexuelles est venu se faire soigner dans les 72 heures suivant l'agression. 

« Souvent, les gens viennent chez nous pour chercher des soins, mais en même temps, ils se sentent tellement exposés, ils ont tellement peur de se mettre en danger qu'ils arrêtent de venir aux consultations » explique Brenda Villacorta, psychologue à MSF. « La première chose que nous faisons est de les informer des conséquences de leur agression sur leur santé physique et mentale. »

Une femme consulte pour son fils, malade, à la clinique MSF de Tegucigalpa, Honduras.
 © MSF/Christina Simons
Une femme consulte pour son fils, malade, à la clinique MSF de Tegucigalpa, Honduras. © MSF/Christina Simons

Comme Rosario, beaucoup de survivants ont peur de parler de leur situation. À Tegucigalpa, selon les données recueillies par MSF, 50% des agresseurs font partie du cercle proche des victimes de violences sexuelles, et 41% d’entre elles sont des enfants de moins de 18 ans.

La plupart des victimes soignées par MSF vivent dans des logements insalubres et surpeuplés, où elles sont obligées de partager leur couchage avec des membres de leur famille, parfois plus âgés. Elles vivent majoritairement dans des quartiers peu sûrs où des gangs opèrent. Souvent, les parents sont au travail toute la journée, laissant leurs enfants à des membres de leur famille ou à des voisins, augmentant ainsi leur vulnérabilité.

*Les noms ont été changés pour protéger l’identité des patients.

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