Les nouvelles concernant les procès de l’Iranienne Nasrine Soutoudeh et de la Saoudienne Loujain Al-Hathloul sont tombées au même moment. Nasrine vient d’être durement condamnée à trente-huit ans de prison et à cent quarante-huit coups de fouet, tandis que Loujaine, qui a déjà reçu en prison son lot de tortures et d’humiliations, accusée de “trahison” et d’“intelligence avec des pays étrangers”, a été transférée devant un tribunal qui risque de se montrer tout aussi sévère à son égard. Mais quels crimes ces deux femmes ont-elles donc commis ? À chacune son combat avec son régime, même si la motivation des deux femmes est la même : pousser les autorités de leurs pays à reconnaître quelques droits humains basiques.

Nasrine est avocate. Elle a défendu des femmes qui ont été arrêtées pour avoir protesté contre le port du voile obligatoire. Elle a également exprimé sa réprobation de la peine de mort appliquée aux mineurs. Car l’Iran est le pays qui exécute le plus grand nombre de mineurs. C’est pour cela qu’elle s’est vue accusée de déloyauté vis-à-vis du régime et d’insulte au guide suprême.

Réputation souillée

Loujain, de son côté, a essayé de faire en sorte que les Saoudiennes puissent jouir de leurs droits les plus fondamentaux, à commencer par celui de conduire et celui de pouvoir vivre sans dépendre du bon vouloir d’un tuteur mâle. Elle avait ainsi pris le volant de sa voiture bien avant que le prince héritier, Mohammed ben Salmane, ne décide d’accorder ce droit.

Quand le royaume wahhabite annonce finalement [en septembre 2017] que les femmes auront enfin de droit de conduire, elle et d’autres militantes ont reçu un coup de fil d’un responsable au palais royal leur intimant de ne pas s’exprimer pour commenter la décision. [Le régime voulait s’attribuer entièrement le mérite de cette décision, faisant abstraction des revendications de la société civile.] Puis [en mai 2018, un mois avant l’entrée en vigueur de la réforme], Loujain a été arrêté