Rentrée scolaire : la pédagogie à l’heure des neurosciences

Élèves dans une salle de classe. ©Getty - skynesher
Élèves dans une salle de classe. ©Getty - skynesher
Élèves dans une salle de classe. ©Getty - skynesher
Publicité

Dans "Les Matins" de France Culture, le neuropsychiatre Boris Cyrulnik et l'éditeur scolaire Philippe Champy interrogent la place des neurosciences dans l'élaboration des politiques éducatives et réfléchissent à comment créer les meilleures conditions d'apprentissage pour les élèves.

Avec
  • Boris Cyrulnik Neuropsychiatre et ethnologue
  • Philippe Champy Ancien ingénieur à l’Institut national de recherche pédagogique et ancien directeur des éditions Retz.

Alors que plus de 12 millions d’élèves s’apprêtent à faire leur rentrée, le neuropsychiatre Boris Cyrulnik propose de mobiliser les résultats des sciences cognitives pour faire de l'école un lieu d’épanouissement propice à l’apprentissage. Il a dirigé l’ouvrage Préparer les petits à l’école maternelle (Odile Jacob) et il insiste sur l’importance de l’école maternelle dans la trajectoire scolaire des élèves.

Boris Cyrulnik sera rejoint en seconde partie par Philippe Champy, auteur de Vers une nouvelle guerre scolaire : Quand les technocrates et les neurosciences mettent la main sur l’Éducation Nationale (La Découverte). Dans cet ouvrage, il dénonce la remise en question de la liberté pédagogique à l'école et critique la montée en puissance des neurosciences au sein du ministère de l'Éducation Nationale.

Publicité

L'apport des neurosciences dans les démarches d'apprentissage à l'école : émotions et relations font l'intelligence

Quelles contributions les neurosciences peuvent-elles apporter aux politiques éducatives ? Comment donner aux enfants l’envie et les moyens d’apprendre ? Tels sont les nouveaux enjeux au sein de l'Education Nationale. "L'enjeu de l'école en deux générations a complètement changé, aujourd'hui c'est l'école qui fait les nouvelles classes sociales", énonce Boris Cyrulnik.

La sécurisation des élèves à l'école avec mise en place de stratégies pour augmenter le plaisir est essentielle pour les apprentissages. L'ennui à l'école est une particularité française. "Il n’y a pas d’intelligence froide. Il n’y a d’intelligence qui si elle est éveillée. Pour cela, il faut qu’il y ait des émotions et une relation. Si le fait de parler avec vous m’amuse, je vais faire un effort et éprouver du plaisir. Si, au contraire, votre présence m’inhibe, je vais me contraindre et mes performances intellectuelles vont être diminuées."

L'Invité(e) des Matins
47 min

Et de conclure que le dans  le développement du cerveau, les déterminismes génétiques ne sont pas fondamentaux, "inné, acquis ça n'a plus aucun sens", affirme le neuropsychiatre. L'imagerie cérébrale montre que le cerveau est captivé par les relations et les émotions, "le cerveau est la conséquence des relations".

Boris Cyrulnik tient aussi à distinguer le stress de l'anxiété. Le stress peut être "un éveil cérébral", "un éveil relationnel" mais trop de stress "sidère le cerveau". "On sait maintenant que l’intelligence démarre dans l’affectivité. L'intelligence n’est pas une qualité cérébrale mais une qualité relationnelle. (…) C’est tout à fait intéressant de voir que l’affectivité est un tranquillisant naturel. Quand un enfant est sécurisé par l’affection qui l’entoure, il va éprouver le premier jour d’école comme un stress, mais un stress amusant."

Le Cours de l'histoire
51 min

Enseigner à l'heure des neurosciences : enjeux et risques

Assiste-t-on à un accroissement de la place donnée aux sciences cognitives dans l'éducation nationale ? C'est la question du moment en cette rentrée scolaire devant le risque d'instrumentalisation des neurosciences par des technocrates qui ont tendance à nier le savoir expérimental du terrain. Enseigner n'est pas une science de laboratoire.

A propos de la modification des programmes scolaires, Philippe Champy s'inquiète : "Depuis une vingtaine d’années, on assiste à un effet de balancier qui suit les alternances gouvernementales. (…) Les professeurs, dans tous les niveaux d’enseignements, et les parents, sont un peu perdus car ce qui était valable un jour ne l’est plus le lendemain. Les expérimentations souvent tournent court et il n’y a pas de bilan. Cela crée un climat anxiogène."

"Il y a des débats entre spécialistes, que ce soit au niveau des sciences cognitives où les neurosciences ont leur rôle, ou au niveau des didactiques, des chercheurs qui s’intéressent à la manière d’enseigner à partir de plusieurs points de sciences humaines. (…) Ces débats ont plus ou moins d’impact en termes d’expertise sur les politiques. Je remarque surtout un poids très fort des technocrates, c’est-à-dire des décideurs de très haut niveau, liés au milieu dirigeant mais qui n’ont pas une approche pédagogique des choses et qui ont une faible connaissance des réalités", déplore Philippe Champy.

L'équipe