Les nuisances du tourisme de masse ont fait les unes de la presse internationale cet été. Avec cette interrogation lancinante : comment endiguer le “surtourisme” qui abîme les plus beaux sites du monde et complique de plus en plus la vie des habitants des métropoles devenues des spots touristiques.

“Le Forum économique mondial préoccupé par le surtourisme”, rapporte le site de la Deutsche Welle. “Comme stopper le surtourisme ?” se demande CNN. “Bienvenue dans l’âge du surtourisme !” claironne Gulfnews. Et tandis que The Guardian titre sur “la chute de Prague”, “les touristes ivres se comportent comme s’ils avaient conquis la ville”, The Washington Post dispense ses conseils : “A l’ère du surtouriste, voici comment vous pouvez éviter d’en être un.”

Le tourisme, une bonne affaire ?

“Comment vit-on dans une ville envahie par les touristes ?” s’interroge de son côté BBC News. Plutôt mal, si l’on en juge par les témoignages recueillis par la journaliste Lindsey Galloway à Prague, Amsterdam, Toronto, San Francisco ou Barcelone. Incivilités de toutes sortes, embouteillages, augmentation du coût de la vie, hausse des loyers et de la criminalité sont au programme – au point que Barcelone, avec ses 30 millions de touristes à l’année, serait devenue, selon le magazine allemand Der Spiegel, “la ville du crime”.

“Les voyages et le tourisme international continuent de croître à une vitesse vertigineuse, avec une croissance supérieure à celle du PIB mondial et une contribution à l’économie mondiale de plus de 8 milliards de dollars chaque année. Mais dans les villes qui enregistrent un nombre record de visiteurs, responsables publics et résidents commencent à se demander si cette croissance du tourisme est une si bonne chose”, écrit Lindsey Galloway.

Les cinq métropoles citées par BBC News figurent au premier rang des villes dont les habitants pâtissent d’ores et déjà du développement mal maîtrisé du tourisme, selon un rapport du World Travel & Tourism Council (WTTC) intitulé Destination 2030 Index – avec plusieurs autres, dont Istanbul, Lisbonne, Madrid ou Sydney (sans parler de Venise, qui n’est pas prise en compte dans l’étude).

L’un des intérêts de cette enquête est qu’elle permet de repérer les métropoles dans lesquelles “la forte croissance du tourisme est de nature à peser sur les infrastructures existantes si des mesures ne sont pas prises” au cours des prochaines années. C’est notamment le cas de Munich, San Francisco, Séville, Pékin ou Dublin.

Touristes et résidents en concurrence

Dublin accueille déjà 6 millions de touristes par an, mais la capitale irlandaise en prévoit 3 millions supplémentaires dans les prochaines années. Or “beaucoup des symptômes du surtourisme sont déjà visibles”, écrit le quotidien Dublin Inquirer. Même si, à ce jour, “l’impact du tourisme a été plutôt positif : la création directe ou indirecte d’emplois et d’opportunités commerciales soutient une offre variée de restaurants, boutiques et galeries fréquentés à la fois par les résidents et par les touristes”.

Les facteurs à l’origine du surtourisme sont clairement identifiés : vision à court terme des industriels du secteur, multiplication des vols low-cost et des offres de location à court terme, etc. Du côté des autorités locales, les mesures mises en œuvre ne paraissent pas pour le moment à la mesure du défi. A Dublin comme ailleurs, on lutte contre les effets toxiques de la surconcentration en cherchant à orienter les flux de touristes vers des zones moins fréquentées que le centre-ville. Sans être sûr qu’elles ont la capacité d’absorber ces flux sans dommages pour les habitants.

“En gros, les touristes entrent en concurrence avec les résidents pour l’occupation de l’espace et l’utilisation des équipements et des services”, mais la voix des habitants et des communautés concernés “n’est pas prise en compte avant que les choses n’aient commencé à mal se passer”, regrette le Dublin Inquirer.