Le Gouvernement s’apprête à renouveler pour trois ans l’existence des tarifs réglementés applicables à l’électricité fournie aux particuliers, cela malgré l’interdiction de principe posée par la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) il y a quelques années. Au profit de qui ? On veut nous faire croire que c’est au profit de l’intérêt général, une protection des ménages contre une électricité trop chère. C’est en réalité uniquement pour le bien des opérateurs historiques, essentiellement EDF, mais pas pour celui des particuliers. Qu’on en juge : hors abonnement annuel, le consommateur paye en moyenne son électricité réglementée (tarif bleu EDF) environ 150 euros le MW/h. Si l’on enlève les nombreuses taxes qui pèsent sur ce prix (TVA ; CSPE ; CTA ; TCFE départementale et communale) ainsi que les tarifs d’acheminement, et qui représentent tous ensembles 64 % du total, le prix hors taxe facturé par le monopole est de l’ordre de 55 euros le MW/h.
Absence de transparence
Quelle est la marge bénéficiaire pour EDF ? Mystère ! Certes la Commission de régulation de l’énergie nous explique les raisons techniques qui justifient l’évolution des tarifs. Mais il n’existe aucune transparence dans la fixation de leurs niveaux. Pourquoi le MW/h produit par EDF avec, pour l’essentiel de son parc, des centrales hydrauliques et des réacteurs nucléaires amortis, coûte-t-il autant ? Comment ne pas s’étonner lorsque l’on compare ces 55 euros le MW /h avec les prix de l’électricité échangés sur le marché libre en Europe ? La simple lecture des tarifs pratiqués sur les bourses d’échange (il en existe plusieurs : EPEX, etc…) fait apparaitre des niveaux de prix beaucoup plus bas, même en « heures pleines ». Ils sont, par exemple, actuellement inférieurs à 34 euros le MW/h. Pourquoi une telle différence que ne payent d’ailleurs pas nos entreprises qui, elles, ne supportent plus de tarifs réglementés et règlent un moyenne, toutes taxes comprises, un MW/h à 110 euros au lieu de 150. Le maintien de cette discrimination est difficile à comprendre d’autant que contrairement au discours officiel, le français n’est pas celui qui paye son électricité le moins cher en Europe.
Yves De Gaulle à la gauche de François Hollande sur la tombe du Général
Concurrence faussée
Il y a certes un début de concurrence puisqu’existent des fournisseurs alternatifs à EDF qui offrent des prix un peu plus bas que le tarif bleu réglementé. Mais cette concurrence est évidemment faussée par le monopoleur EDF. Pourquoi ? Parce que ces fournisseurs fixent leurs tarifs en combinant l’achat sur le marché libre, le poids de leurs propres coûts de « fabrication » s’ils sont eux-mêmes producteurs d’électricité, mais aussi l’impact d’un autre prix « administré » plus élevé que le prix du marché qu’est le tarif d’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (ARENH). Cette dénomination compliquée n’est rien d’autre que la possibilité imposée par l’Etat à EDF de permettre aux autres fournisseurs d’acheter une part limitée (100TW/h soit 25% du total) de son électricité nucléaire. L’objectif est, parait-il, de favoriser la concurrence des offres. Malheureusement, il est beaucoup trop élevé : 42 euros le MW/h ce qui est énorme pour des centrales nucléaires dont l’investissement est amorti, et en tout cas plus cher que sur le marché libre. EDF, qui fournit 90% de l’électricité produite en France, impose ainsi une seconde fois son monopole, avec la complicité de l’Etat, en rationnant les autres fournisseurs par les quantités et par les prix.
Consommateur contribuable
Au passage, le consommateur est aussi contribuable. C’est lui qui, par ses impôts ou son épargne, a financé le plan électronucléaire français lorsqu’EDF était encore une administration publique. Il en est récompensé aujourd’hui par des taris électriques chaque année en augmentation, et par des niveaux de prix administrés plus élevés que ceux payés par nos entreprises ou pratiqués sur le marché libre. Le maintien du tarif « bleu », s’il a pu être une protection pour les petits clients, les pénalise aujourd’hui, comme le tarif excessif de l’ARENH pénalise les fournisseurs alternatifs. En accord avec les directives européennes, on a supprimé cette règlementation pour le gaz. Le faire avec l’électricité rendrait mécaniquement du pouvoir d’achat aux français.